[Archivé] Dans le dépouillement le plus total - Fin 2786

La veille de Gladio. La veille de la saison des pluies. Sitara, s'est aventurée dans la forêt Chrysanthème. Sa douceur et son harmonie la rend curieusement attrayante. Sa seconde peau, c'est-à-dire ses vêtements, ont commencés à la démanger après un certain temps passé dans ce lieu paisible. L'aigle ne tient plus et désire se défouler les ailes. La métamorphe décide de se débarrasser de ces marques de civilisation, si difficile à porter, qu'elle ne porte que par politesse envers les races peu habituées au spectacle de l'enveloppe charnelle. Ses deux formes sont ce que la nature lui a donnée, il n'y a pas  lieu d'en avoir honte. Au contraire.

Sitara trouve un arbre qu'elle marque de sa serre brièvement transformé pour l'occasion dans l'objectif de retrouver ses effets personnels qu'elle y cachera. Elle se déshabille sans se préoccuper du regard inquisiteur et curieux des créatures de la forêt. Elle les dépose bien à l'abri dans l'arbre qu'elle vient de marquer. Ensuite, elle se métamorphose en aigle pour voler. Enfin libre. La prédatrice étend ses ailes et dépasse la canopée pour évoluer dans les airs. Le temps n'a plus cours pour elle. Chaque fibre de son corps aviaire est traversé par le plaisir de retrouver le ciel et les sensations qu'il lui procure. Aucune gêne à regarder le soleil, cette étoile ardente qui illumine Elysion. La faim finit par se sentir. Surplombant la forêt Chrysanthème, elle remarque de très loin un lapin bondir dans une clairière.

Son instinct ne fait qu'un tour, Sitara pique à très grande vitesse le pauvre animal et l'attrape dans ses puissantes serres. Le lapin n'a aucune chance. Il meurt sur le coup sans cruauté inutile.  Elle l'emporte en remontant vers les cieux. Elle doit revenir vers le "Nid" que son autre forme a marqué. Pour se nourrir de la proie du jour. Le soleil est son repère. Elle redescend en dessous de la cime des arbres, traversant le feuillage avec le petit corps duveteux et sans vie entre ses serres. Une fois posée au sol à proximité de l'arbre marqué, elle étale le lapin tué par ses soins sur l'herbe. Elle hésite à le becqueter, malgré la sensation de faim. À se perdre dans sa forme animale.  Elle convoque les souvenirs des délicieuses recettes qu'il lui est possible de cuisiner sous son autre forme.

C'est un moment difficile. Dépenser plus d'énergie à préparer le lapin ou le consomme directement sans artifices ? Les images accompagnées du goût aromatisé et cuit qui lui viennent de sa forme humaine sont plus appétissantes. Elle s'abandonne à une seconde transformation, bien plus difficile que la première.  C'est épuisée par la lutte mentale livrée pour ne pas s'abandonner entièrement, par la transformation qu'elle retrouve son corps de femme. Même affamée, elle prend le temps de calmer ses membres tremblants. Elle a peur. Très peur de ce qui aurait arriver. Ce n'est pas passé loin. De vivre pour toujours sous forme d'aigle. Libre de courir après les vents. Libre de se trouver un mâle. Sans soucis du monde des créatures qui s'habillent, troquent entre elles et s'entretuent pour un oui ou un non. Ses yeux dorés continuent garder le lapin mort et d'éventuels contestataires de son repas.

Ses yeux dorés, en partie masqué pas ses cheveux ébouriffés, s'arrêtent sur la femme rousse qui vient de faire irruption entre les buissons et les arbres. Pas une once de désir de se couvrir ou honte d'être surprise ainsi dans son regard. Aucune tentative de cacher le reste. Sitara reste méfiante, ne connaissant pas les intentions de l'inconnue. Envisage-t-elle de dérober sa proie ? Le lapin mort au petit corps encore chaud ?

Lorsque la femme s'approche, Sitara plonge la main pour attraper la fourrure et tirer l'animal vers elle. Ce geste marque sa territorialité, son droit de chasse sur le lapin qu'elle avait tué. C'est mon LAPIN ! Puis, la surprise passe dans ses yeux sauvages. Elle ne s'attend pas à que l'inconnue manifeste de l'inquiétude, à ce qu'elle se soucie de sa santé. Est-ce qu'elle va bien ? Passant en revue l'état de son corps, déjà mieux que quelques minutes plus tôt, elle répond avec une franchise désarmante.

J'ai peur. J'ai faim. J'ai envie du lapin.

Elle pense à sa mère, Kahena. Une Aniformis aigle à l'attitude sévère qui pousse ses enfants à tirer le meilleur d'eux-mêmes sans aide. Sous ses ailes, Sitara avait appris à utiliser ses dons, à perfectionner ses talents et à survivre dans la nature. Sa mère a peu de chaleur à offrir, si ce n'est que les moyens de survivre et des compliments durement gagnés. La métamorphe sait que sa mère aime ses aiglons sans qu'elle ne le dise. C'est papa qui se soucie davantage de leur bien-être et de leur santé. Pour convaincre la femme que tout va bien, la métamorphe a une idée merveilleuse.

Vous en voulez du lapin ? Je partage.

La femme qui vient d'arriver refuse le lapin soulageant Sitara. Elle n'aura pas à partager même si elle l'a volontairement proposé. L'inconnue avance d'un pas avec le sourire et lui propose sa veste. Froid ? Si elle a froid ? Lui prêter sa veste ? Maintenant qu'elle lui pose la question, Sitara réalise qu'elle a également la chaire de poule en plus de trembler  légèrement.  Une réaction naturelle de son corps.  Être vue nue ne la dérange pas. En revanche, se préserver du froid sous cette forme est un facteur motivant pour s'habiller.

Froid ? Veste ?

Sitara répète les mots de l'inconnue en essayant de déterminer s'ils appliquent réellement à sa situation. Elle émet un glatissement. Son corps est solide, résistant au froid et aux privations. Elle sait que la cachette pour ses affaires n'est pas loin. Marquée de ses serres même. L'inconnue qui dit s'appeler Natalia semble vouloir l'aider. Pourquoi ? Depuis qu'elle a quitté son village natal, elle a découvert l'infinie complexité des Elysionniens. Un monde plus vaste que ses montagnes natales. Et leurs intentions ne sont pas toujours bienveillantes et respectueuses de ses convictions.

Doit-t-elle lui demander de l'aider à retrouver l'arbre qu'elle a marquée avec ses serres ? Elle en a besoin pour s'habiller,  pour cuisiner le lapin aussi. Ce n'est pas une petite faim qui l'empêcherait de retrouver la cachette dans laquelle niche confortablement toutes ses affaires. Son arc, ses vêtements, ses utsensiles de cuisine et de Sitara se résigne à coopérer avec Natalia, qui semble toute prête à l'aider.

J'ai caché mes affaires dans un arbre pas loin. Je l'ai entaillé avec mes serres pour le retrouver plus facilement.

Elle regarde les alentours, cherche à repérer le bon arbre avec ses yeux dorés perçants. Elle est sûre qu'il se trouve pas loin. Elle insiste à nouveau sur la proximité de l'arbre en gardant le lapin dans sa main. Sa proie. Elle ne va pas le laisser à la merci des charognards tant qu'elle n'aura pas prélevé tout ce qu'elle peut de l'animal. Y compris la fourrure.

Je suis sûre qu'il n'est pas loin Nathalia.

Nathalia cligna des yeux à plusieurs reprise comme si elle avait une poussière de dans. Mais il était clair que c'était parce qu'elle était étonnée par le comportement de cette jeune femme. Nue comme un ver protégeant un lapin mort surement pour le manger et ayant caché des affaires dans un arbres. Etait elle aussi un aniformus comme elle ? Un aniformus élever par les bêtes ? Sa façon de formuler les phrases laisser à penser qu'elle n'avait peut être pas grandit avec beaucoup d'être humain ou alors que l'Elysionnien n'était pas sa langue maternelle et dans ce cas là Nathalia s'en voulait un peu de son cheminement de pensées.

"Je peux vous aider à le trouver si vous voulez, j'ai une très bonne vue. "

Elle observait la jeune femme avant de regarder les arbres autours d'elles.

"entaillé avec vos serres vous dites ?"

En la prononçant à voix haute c'était maintenant évident elle était une Aniformus. Surement un oiseau prédateur au vu de son comportement avec le lapin.  Nathalia avait beau chercher sur les arbres elle n'en voyait aucun avec des traces fraiches d'entailles de serres. Elle n'était pas même sure de ce qu'elle cherchait. Elle mis sa main en casquette pour se protéger des quelques rayons de soleil qui passaient au travers des arbres.