[Archivé] Chéri je suis rentré ! [sp Ulrik] [Fête de la Prodigalité 2783]

La moindre goutte d’eau faisait déborder le vase et lançait Rust dans une fureur dont briser était un des seuls échappatoires. Depuis le retour de leur Père, ce phénomène s’était intensifié. Il bouillonnait quasiment en permanence, relâchant son énervement par des insultes, toutes les décorations tapissant son antre ayant déjà fini réduites en charpie.
Paradoxalement, il y avait une chose qui ne l’énervait absolument pas : l'ascension d’Eve et d’Achéron dans leur hiérarchie. A dire vrai, il y avait toujours eu un classement sous-jacent entre eux et il avait quasiment toujours été tout en bas. Et tout à coup, deux d’entre eux étaient réellement propulsés au dessus et devenaient leurs supérieurs. Un phénomène qui enchantait Rust par le fait que les autres se retrouvaient jetés en bas de leur piédestal. Ulrik, Hölle, Cyriel étaient maintenant à son niveau. Douceline était un cas particulier évidemment mais elle ne le martyrisait pas.

Une joie volatile et malsaine donc, qui l’avait mené jusqu’au manoir d’Ulrik, le plus orgueilleux et pédant d’entre eux. Trois raisons en réalité l’amenaient ici en réalité : Se moquer de son “Frère”, lui proposer éventuellement de travailler un peu plus ensemble et se permettre de voler quelques décorations car il avait réduit en miettes tout son mobilier.
Arrivant dans l’allée qui menait à la porte d’entrée, le Réprouvé commença à ressasser les souffrances causées par Ulrik depuis toujours. Perdant le contrôle petit à petit sur ses pensées, d’une vitesse de marche normale, il commença à accélérer, puis à réellement courir. Bouillonnant intérieurement, sa vitesse augmenta et il finit par heurter l’immense porte rageusement, faisant l’effet d’un bélier.

La porte s’écrasa sous l’impact, volant en éclats et en échardes qui tapissèrent le sol du hall du manoir.

- Chéri je suis rentré !

Spoiler:

Le plus puissant de tous les Réprouvés, celui qui méritait tout les territoires, toutes les soumissions, tous les honneurs avait bien évidemment entendu rentrer la misérable vermine surexcitée qui s’était introduite chez lui. Le simple bruit des pas de ce sous-homme sur son sol le hérissait, le dégoutait, et lui donnait envie de refaire son parquet afin d’effacer toutes les traces de cet atrophié. Une grimace emplie de méris fit place sur son visage, brisant son masque. Chacun des pas de son Frère débile vers lui faisait augmenter son irritation,et lorsque la porte s'ouvrit à la volée, explosant et s’écrasant sous l’impact de la force de l’arrivant, Ulrik bougea un doigt. Un seul doigt et soudain, Rust explosa. Mort.

L’avantage de mourir si vite, c’était que le commun des mortels ne ressentait pas la douleur, ils n’avaient pas le temps de penser, l’explosion coupait court à tout, nerfs, activité cérébrale et ils retournaient au néant. Bouillonnant de rage comme il l’était, l’adrénaline envoyée à travers ses veines et pompée à travers son organisme atténua légèrement tout de même mais le problème était là : Rust était increvable.

Il restait conscient dans ces moments, la souffrance d’être déchiré et d’aller éclabousser les murs alentours était au bas mot, atroce. Il sentait chaque cellule de son être encore bien vivante, bouillonnante d’énergie et chacun des nerfs de son corps cherchant ses compagnons perdus. Un instant la flaque de sang au sol et les débris de corps tapissaient les alentours - 5 litres de sang ça fait une belle quantité - et la seconde d’après Rust était de nouveau dans la pièce, les genoux au sol, les mains dans les échardes laissées par la porte brisée, en train de se remettre d’une expérience comme toujours éprouvante. Habituelle mais éprouvante.

Il pris une grande inspiration, comme un nouveau-né qui sentait pour la première fois l’air entrer dans ses poumons la souffrance le submergea de nouveau, au début trop puissamment pour qu’un quelconque bruit émane de sa bouche. Une seconde plus tard, il criait, celle d’après cela s’était réduit à un gémissement puis la suivante encore, il se relevait dans un râle. Un râle et un petit sourire narquois qui étirait ses lèvres, Ulrik était en colère et il venait l’aiguillonner et ça n’avait pas de prix, même 100 de ses vies ne suffiraient pas à le faire reculer.

- Ton accueil manquait de chaleur, tu aurais au moins pu m’étreindre et me tuer de tes propres mains mon amour. Tu as passé une mauvaise journée ?

Mort.
Puis vivant de nouveau.
Comme un défi lancé au visage du plus puissant.
Ulrik ne pouvait pas supporter ça. Qu'on le défie, lui... Oh, il était certain de gagner. Mais les faibles doivent s'incliner face aux puissants, pas les affronter. Chacun doit connaître sa place. Et celle d'Ulrik est au sommet. Tous doivent s'incliner.

-Il me suffit de penser à toi pour que ma journée devienne mauvaise, cracha Ulrik, ne pouvant s'empêcher de répondre à l'appel de son Frère. Alors si tu te présentes face à moi, qu'est-ce que tu imagines ?

Les commissures de ses lèvres se relevèrent dans une parodie de sourire affable mais qui laisse transparaître toute la haine et l'orgueil qui composent le Réprouvé.

-Mais tu dois avoir soif. Tu veux peut-être un peu d'eau ?

Avant que Rust ne puisse répondre, les alvéoles de ses poumons se contractèrent tandis qu'un liquide clair se mit à sourde à l'intérieur. L'eau se dilata, sembla gonfler à chacune des inspirations, de plus en plus douloureuses, de l'homme, se répandit dans les bronches, imbibe les tissus... La propagation de l'eau était calculée pour être la plus douloureuse possible. Et quand Rust ne trouva plus d'oxygène pour alimenter son cerveau, l'eau grandit soudain, ressortant par la bouche et le nez, teintée de rouge. Rust s'effondra au sol. Mort.

Il était de nouveau en vie depuis quelques secondes seulement quand son “grand frère” l’insulta. Juste penser à lui pourrissait la vie du grand Ulrik ?

- C’est un b-

Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase mais il s’en doutait. Il eu la sensation de se distendre de l’intérieur et son corps s’étira doucement. Une douleur atroce la parcourut alors que tous ses tissus, sa peau, ses organes irrigués semblaient se gonfler à bloc, être tirés encore et encore jusqu’à l’éclatement. Il vomit littéralement une marée de sang, dans laquelle vinrent se mêler quelques fragments de son intérieur qui s’étaient mêlées en son sein.
Sombrant dans l’oubli, il vit de nouveau la lumière au bout du tunnel, une sorte de douce lueur, le réconfort, enfin le sommeil. Puis il fut de nouveau tiré en arrière, comme attrapé au nombril et par les épaules et ramené sur terre alors que son corps revenait à la normale dans la douleur.
Il posa ses deux mains au sol, leva le visage et dans un sourire de sa bouche pleine de sang, il termina sa phrase :

- -eau compliment ! Je ne pensais pas que je pouvais avoir tant d’impact sur toi et cela me met en joie.

Il se remit doucement debout en espérant que cette fois on le laisserait se mouvoir un peu plus longtemps. Il savait que sa prochaine mort arriverait vite, c’était un peu leur rituel familial avec Ulrik. Ses vêtements étaient couverts de sang et devenaient inconfortables à porter, allourdis par le liquide. Il les arracha directement de son corps, restant torse nu, débraillé avec simplement son pantalon et regarda son “Frère” droit dans les yeux. Il était bien plus grand que lui alors il devait lever la tête pour ça.

- Je te laisse me dire quand je pourrais t’énoncer la raison de ma venue, fais-toi plaisir j’adore ça !

Et il se relevait. Encore. Toujours à le défier, toujours à penser qu'il pouvait tout se permettre face à lui. Pire, il commençait à le provoquer.

- -eau compliment ! Je ne pensais pas que je pouvais avoir tant d’impact sur toi et cela me met en joie.

-Il t'en faut peu pour être heureux, grommelle Ulrik.

S'il prenait du plaisir à ses morts, cela perdait presque de son intérêt. Presque. Ulrik espérait toujours qu'après une de ses résurrection, Rust se retrouve immobile, incapable de prononcer le moindre mot, terrifié par ce qu'il avait ressenti. Ça, ou qu'il ne se réveille pas, tout simplement.

- Je te laisse me dire quand je pourrais t’énoncer la raison de ma venue, fais-toi plaisir j’adore ça !

Ulrik observe une seconde son "frère" avant de se caler plus confortablement dans son fauteuil :

-Après tout, pourquoi pas. Je t'en prie, parle donc.

Mais avant que Rust ne puisse s'exprimer, un étrange fourmillement se fit sentir sous sa peau. Comme des milliers de petites bulles claquant dans ses veines. Et à chaque claquement de bulle, une chaleur, qui s'intensifiait progressivement, sourdait de sous la peau. Son sang...
Son sang entrait en ébullition !
La peau rougissante du Réprouvé se couvrit bientôt de cloques. Des lambeaux s'en détachaient, jonchant le sol autrefois immaculé de la pièce. Les muscles devinrent apparents, mais eux aussi se nécrosaient, glissant au sol en même temps que la graisse ne fondait.

-Oups... Désolé, tu disais que nos retrouvailles manquaient de chaleur, je me suis donc permis de te réchauffer, expliqua Ulrik avec un sourire malsain. J'y suis allé trop fort ?

La chaleur s’intensifia, faisant craquer les os et exploser les organes les plus fragiles - les yeux et le cerveau en premier. Il ne resta bientôt de Rust qu'un tas de chair grésillant et fumant, au fumet maladivement agréable. Mort.

Rust se mit à fondre doucement alors que Ulrik l’enjoignait à parler. Très drôle ça ! Vraiment très drôle ! Il mourrait et souffrait le martyr de nouveau, toujours d’une façon différente de la précédente. Il savait qu’il pouvait compter sur Ulrik pour découvrir de nouvelles souffrances et heureusement qu’il avait déjà plus de mille ans de mort d’expérience pour résister aux dégâts mentaux ainsi infligés. Au fond il ne pouvait que remercier Ulrik car c’était lui qui l’avait forgé et renforcé au niveau mental par ces macabres rituels. Sans lui, il ne serait pas loin de pleurer à la moindre mort mais aujourd’hui, il restait de marbre grâce à son “Frère”. Mais cette connaissance était enfouie bien profondément au fond de son crâne, tellement profondément que même Rust ne le savait pas consciemment.
Alors que ses yeux coulaient littéralement de ses orbites et que sa peau craquelée laissait échapper le tissu adipeux encore présent dans son corps maigrelet, Rust mourut encore une fois. Bien heureusement il ne sentit pas la douleur jusqu’à la fin, son cerveau et ses terminaisons nerveuses ayant déjà grillé avant le reste de son corps.

Le tas fumant au sol repris doucement forme, ses vaisseaux, ses nerfs, ses os, son sang, ses fibres musculaires se reformèrent à partir de la matière au sol pour revenir à leur état d’origine. Rust fut de nouveau.

- Un peu trop fort mais comme toujours, je ne te demande pas de savoir te contrôler ! Je suis juste venu te demander … Tu crois que je pourrais t’emprunter ce lustre et ce meuble ? Mon chez-moi est un peu désué et mon mobilier est abîmé.

Il lui adressa un sourire moqueur.

Le spectacle de Rust revenant à la vie était plus dérangeant, cette fois. Le tas de chair fourmillant lui faisait penser à ce cadavre de jeune fille qu'il avait aperçu, un soir dans les égouts d'Hypnos. Des rats s'attaquaient au festin offert par le corps et leur agitation donnait presque vie au spectacle macabre. Ulrik sourit à ce souvenir. Il avait laissé les rats vivre parce qu'ils l'avaient amusé.

- Un peu trop fort mais comme toujours, je ne te demande pas de savoir te contrôler ! Je suis juste venu te demander … Tu crois que je pourrais t’emprunter ce lustre et ce meuble ? Mon chez-moi est un peu désué et mon mobilier est abîmé.

Ulrik soupira, mais plus de lassitude que d'énervement, cette fois. Rust commençait presque à ressembler à un petit frère venant embêter le plus grand pour qu'il lui prête des jouets. Ulrik se demanda un instant s'il devait esquisser une moue faussement attendrie, mais ça aurait été de trop. A la place, il répondit :

-Allons, Rust, ces meubles sont bien trop luxueux pour ce que tu appelles "maison". Tu ne voudrais pas quelques cartons, plutôt ? Ce serait plus approprié.

Il sourit de nouveau, comme à chaque fois qu'il s'apprêtait à tuer Rust. Celui-ci ouvrit la bouche, probablement pour répondre.
Il l'ouvrit.
Grand.
Très grand.
Trop grand.
Son crâne bascula en arrière avec une lenteur terrifiante tandis que sa mâchoire inférieure rejoignit le cou. La peau des joue se retourna lentement, laissant apercevoir les dents, puis le palais, puis la glotte. Avec un craquement sinistre, le Réprouvé sembla se ratatiner au niveau des membres inférieurs... mais c'était parce qu'ils remontaient. Chacun des organes de Rust grimpait vers sa bouche, tandis que celle-ci continuait à s'ouvrir. Les os glissaient eux aussi vers cette liberté mortelle. Les intestins furent les premiers à se retrouver à l'air libre, tandis que le reste des organes suivait. Le pire, c'était qu'aucune goutte de sang ne souillait le sol, cette fois. Comme si Ulrik tenait à offrir une mort propre à Rust.
Au bout d'un long moment, Rust se retrouva retourné comme un gant, ses organes et ses os placés autour de lui comme des décorations de Noël, essayant désespérément de retrouver leur emplacement d'origine. Mais Ulrik n'en avait pas terminé. Rust continua de se déformer, ses bras et ses jambes s'arquant dans une position insoutenable, se relevant vers le ciel. Enfin, d'un claquement de doigt, Ulrik fit appel à ses premiers pouvoirs de Fils du Feu pour allumer une flammèche à leur but. Rust ressemblait véritablement à un lustre vivant.

-Un peu macabre, mais plutôt joli.

Le Réprouvé s'avança de son œuvre, l'étudiant sous toutes les coutures.

-Je me suis arrangé pour laisser ton cerveau intact. Est-ce que tu es encore en vie, Rust ? Peut-être que tu l'es, mais que tu ne m'entends pas. Est-ce que tes tympans sont encore intacts ? Hum... De toute façon, ce n'est pas comme si tu allais pouvoir me répondre.

D'un geste vif, il planta sa main dans le cerveau de Rust. Celui-ci s'effondra, disloquant le lustre qu'il formait. Mort.