[Terminé]Siffroy Holmes et docteur Béhékine [sp Siffroy et Béhékine]

Odéline était partie se promener. Oui, c’était chez elle une habitude récurrente que d’aller se promener. Aujourd’hui, ce n’était pas pour aller faire le marché, ni pour suivre les oiseaux, mais pour aller cueillir des fleurs. Siffroy était resté à la maison, pour travailler. Elle savait qu’il aimait bien avoir des fleurs dans la maison : cela faisait de la couleur et des odeurs agréables. Et puis, c’était plus joyeux. Alors, malgré les prévisions d’orage, elle était sortie cueillir ses fleurs, promettant à Siffroy d’être de retour d’ici deux heures.
Elle était loin, très loin d’Elysée et avait déjà un joli bouquet lorsqu’une goutte de pluie s’écrasa sur son joli nez, aussitôt suivi d’une avalanche d’autres. Les nuages noirs cachaient le soleil ; impossible de savoir l’heure. Elle soupçonnait cependant d’être partie plus longtemps que prévu, beaucoup plus longtemps …  En moins d’une minute, sa robe blanche était détrempée, son bouquet gâché, ses cheveux étaient devenus bruns et lui collaient à la peau. Le vent se levait et la pluie la cinglait.

- Fuis. La Tempête arrive. Fuis …

C’était un murmure sifflant. C’était le vent, elle le comprit immédiatement, sans en être réellement étonnée.

- Où ?
- Vers les montagnes … Fuis, princesse, fuis …

Elle suivit la direction indiquée en courant, poussée par le vent qui l’enveloppait comme un ami.

- Fuis, vite, fuis ou tu seras écrasée par les éléments déchainés …

Elle courrait vite, le plus vite possible. Arrivant aux montagnes, les poumons en feu, elle avisa une cavité noire, elle s’y précipita, et se blessant contre les rocailles, elle y entra. Elle était là à l’abri de la pluie et du vent. Celui-ci s’était tu, se contentant d’hurler, encore et encore. Le temps était horrible, réellement horrible. Il faisait chaud dans la caverne, et elle enleva es vêtements trempés, restant un sous vêtements, sa peau nue écorchée par endroits. Elle n’avait pas vraiment mal cependant.
Derrière elle, il y eut un grognement.
Elle se tourna vivement et vit dix yeux brillants qui la fixaient, dans l’obscurité.

- Qui … qui est là ?

Une forme énorme sortit de l’obscurité. Un ours. Un énorme ours brun. Odéline resta ébahie devant la splendeur sauvage et dangereuse de l’animal. Trois oursons sortirent alors de l’ombre, adorables, et leur mère, plus petite que le mâle. La jeune fille était épatée par cette présence inattendue. Un ourson vint vers elle, et elle lui sourit. Il la renifla, plus lui lécha la main, avant de se jeter contre elle, par jeu. La jeune fille éclata de rire.

La tempête éclata au dehors alors que le vieil homme, assit sur son canapé en cuir rouge si agréable au fessier sans que personne ne le remarque vu les positions qu'ils prenaient tous dessus en arrivant, était en train de lire un livre, certes qu'il avait déjà lu mais il l'appréciait beaucoup.
Au moment ou le premier éclair frappa, la même chose arriva presque dans sa tête !

- Oh mer ... ! Odéline !

La petite était allée faire il ne savait quoi et maintenant une tempête venait d'éclater, et sortie depuis un moment, il se demandait franchement où elle avait pu se fourrer la petite ! Il posa son livre, mis un manteau et se prépara à sortir mais se rendit compte ne ouvrant la porte qu'il ne savait absolument pas où elle était. Il referma don cette porte et commença à faire les cents pas. Comment allait-il la retrouver ?
Après quelques minutes de pérégrination mentale, la seule idée lui étant venue à l'esprit était d'appeler de l'aide mais qui aurait-il pu appeler à l'aide, qui connaissait Odéline franchement ? Mis à part cet espèce de matou brumeux qui s'était introduit chez lui en même temps qu'un tas d'autres gens ... Mais lui il ne voyait même pas comment le contacter

Les orages...
Voilà bien quelque chose que Béhékine détestait tout autant que les fleurs à pollen. Non pas qu'il en eut peur - il avait de loin dépassé l'âge ! - mais la pluie et la brume ne faisaient pas bon ménage, de même que la foudre, qui était l'une des rares choses à pouvoir réellement le blesser.

Sous la forme d'un chat de brume à la gueule un peu trop grande pour paraître normale, le Démon de Brume grommelait.
Dès les premières gouttes, il avait foncé à travers les rues d'Elysée pour se mettre à l'abri, avait considéré l'idée de se loger dans les égouts - mais il avait vite cherché ailleurs, par fierté - avant de finir sous un tas de bois à l'angle d'une maison qui s'était avérée être... celle où ce vieil homme hébergeait Odéline.

- Décidément, je passe mon temps à croiser cet enfant...

Béhékine avait l'impression d'être pris au piège. Lui ! Le Démon élémentaire de Brume, presque millénaire, dont les pouvoirs immenses et la ruse avaient causé convoitise et mort chez des décennies de mages puissants... piégé par un orage !
C'était intolérable !
Bon, il devait avouer que son Essence était un peu à plat, après tout ce qui lui était tombé dessus ces dernières semaines : deux invocations, une balade dans un champ de fleurs, une danse avec Odéline...
En fait, s'il cherchait à faire des folies - traverser la pluie ou se prendre un éclair sur la figure, par exemple - il risquait fort de ne pas pouvoir maintenir son incarnation et de finir entièrement désincarné.
Et ça, ce n'était pas, mais alors pas du tout, agréable.

Il aurait pu rentrer dans la maison, comme pendant le vaudeville, mais par respect pour Odéline, il préférait éviter de créer un conflit avec le vieil homme qui l'hébergeait.
Il avait senti une certaine... tension la dernière fois qu'ils s'étaient parlés.
Et oui, on peut être un Démon élémentaire de Brume millénaire aux incroyables pouvoirs... et toujours faire preuve de respect et de tact.

N'empêche que tout ça manquait de classe, pour un Démon élémentaire de Brume millénaire aux incroyables pouvoirs.

L'orage résonnait dehors, une horreur pour les pauvres gens qui se trouvaient encore à l'extérieur ... Et pour Odéline ! Pourtant sur Minos ce genre de problèmes climatiques étaient rares et il fallait vraiment qu'ils aient aussi peu de chance et que la petite s'éloigne ce jour-là !
Il était toujours à court d'idées, il ne savait pas qui Odéline connaissait et il allait franchement devoir se mettre à la page la-dessus pour savoir où la chercher, bref il ne lui restait plus qu'à la chercher tout seul, si il attendait encore, le pire risquait d'arriver.
Il enfila un manteau à capuche en vitesse, et sortit dans le vent et la pluie, lutttant contre les courants, son manteau voletant derrière lui.

- Odéliiiiiiiiiiiiine !

Le vent était fort, très fort mais Siffroy avait des capacités vocales assez impressionantes, les gens ne s'en rendait pas compte généralement mais il arrivait presque à couvrir ce vent à la force des cordes vocales ... Presque
Pas de réponse en tout cas, et puis il doutait qu'il l'entendrait.
Il regarda autour de lui dans la rue, pas grand chose, des maisons, un tas de bois à un angle de son logis qui n'avait d'ailleurs rien à faire ici, c'était pas à lui ça ! Mais pas de traces d'Odéline. Il avança pour continuer ses recherches.

Béhékine pencha la tête hors de son trou en entendant le vieil homme sortir et hurler le nom d'Odéline dans le vent.
Tiens, la jeune fille était sortie ? Par ce temps-là ?
Hmm... elle s'était sûrement faite piéger comme lui par l'orage, alors qu'elle était déjà dehors... c'était plus probable.
Imaginer Odéline dehors sous les assauts du vent - légère comme elle était, elle aurait bien pu s'envoler ! - et de la pluie, le Démon de Brume grommela de plus belle.
Depuis sa "sortie d'ermitage", il n'avait pas rencontré grand monde qui lui fasse bonne impression et il aurait été dommage que l'une d'entre elle soit retrouvée morte d'épuisement sous un orage ou frappée par la foudre !

En espérant avoir encore assez de jus, Béhékine sortit de son trou et rattrapa le vieil homme. Chaque goutte qui tombait le traversait et le déformait. A chaque fois, il fallait un court instant pour qu'il retrouve sa forme...
Ça tiendrait le temps que ça tiendrait...

- Odéline est toujours dehors par ce temps ?

Un léger mouvement sur le côté, une chose bizarre se rapprochant.

- Odéline est toujours dehors par ce temps ?

Le chat ! C'était le chat ! Il était revenu ! Enfin le truc de l'autre fois qui n'était même pas forcément un chat ! En tout cas il avait pas l'air en forme le chat quand on voyait ce qui lui arrivait à chaque goutte d'eau qui tombait.

- Ca va ? T'as pas l'air particulièrement ... en forme sous l'eau.

Il aurait bien ouvert son manteau pour que le machin vienne s'y réfugier mais honnêtement , il ne lui faisait absolument pas confiance ! Il aurait put lui sucer toute son énergie vitale en lui tendant un piège !

- Elle est partie en ville et n'en est pas encore revenue ... Je suppose que tu n'as même pas une idée sur l'endroit où elle pourrait se trouver ?

Il n'en espérait pas grand chose de toute façon, pas confiance !

Béhékine sourit mais, avec les gouttes qui ne cessaient de le déformer, le résultat ne ressemblait pas à grand chose.

- Ça fait aller. Mieux vaut la pluie qu'un champ de fleurs et leur pollen.
Odéline est partie en ville dis-tu ? Hmmm... dans mon état et par ce temps, mes sens sont similaires aux tiens. Je peux t'aider à la retrouver, si tu m'aides à récupérer un peu de mes pouvoirs.

Il voyait bien que le vieil homme se méfiait de lui.
C'était une bonne idée de sa part, mais le Démon de Brume ne comptait pas blesser celui qui hébergeait la petite.
Par contre, il se demandait s'il avait chez lui de quoi le requinquer...

Lui il préférait les champs de fleurs et leur pollen odorant et agréable plutôt que la pluie, il était tombé sur un truc assez bizarre en tout cas avec ce chat. Et ayant vu l'effet d'une goutte d'eau sur son corps, il se demandait quel pouvait être celui des fleurs pour lui déplaire aussi intensément.

- ... Je peux t'aider à la retrouver, si tu m'aides à récupérer un peu de mes pouvoirs.

L'aider à retrouver ses pouvoirs ? L'alarme attrape-couillons se déclencha dans la tête du vieil homme, même né de la dernière pluie on ne pouvait tomber dans ce genre de pièges surtout venant de cette chose à la forme si indistincte !
Et puis il pensa à Odéline, seule dans la rue dans cette tempête, ou pire s'étant réfugiée chez des gens mal intentionnés, le genre qui aime beaucoup les enfants ou même pire si ça existait !

- ... Comment on te fais retrouver tes pouvoirs ? Truc ?

Il avait malgré tout une autre carte dans sa manche, son seul problème étant qu'elle était ici du genre plutôt absolument pas sure du tout et pouvait le mener sur n'importe quelle fausse piste.
Il tendit son bras qui tressauta et s'entoura sur lui-même prenant de la longueur et s'affinant, affublant de son bras la corne de son animal fétiche, Narval, prenant la place de son poing. Cet appendice, ce que les gens ne savaient absolument pas, ne servait ni à se battre ni à parader mais était en fait rempli de terminaisons nerveuses permettant de ressentir chaque déplacement à des kilomètres à la ronde ... Dans l'eau. Sur la surface terrestre, il ne pourrait jamais être sur du résultat. Il en posa le bout sur le sol

- On va tenter de te rendre tes pouvoirs mais en même temps j'essaie avec ma propre méthode.

Spoiler:

- Mais je t'en prie, fais donc, cher métamorphe.
Si tu as des plantes aquatiques chez toi, sous quelque forme que ce soit, cela ferait bien mon affaire. Sinon, il y a le pacte, mais le lien que cela crée est toujours lent et pénible à défaire. Je doute que tu veuilles aller jusque-là. Personnellement, tant que je peux éviter...

Lier son esprit à celui d'un mortel n'était jamais bien agréable : ça laissait des traces, ça débordait toujours un peu partout et il avait toujours des bouts qui restaient collés dans son Essence, même après des années.
Il sourit, avant de faire un tour complet sur lui-même pour éviter une goutte particulièrement grosse.
Béhékine commençait à en avoir sérieusement marre d'être bloqué dans cette forme chétive : il s'y sentait à l'étroit, et avait juste envie de s'étirer dans un brouillard de plusieurs dizaines de kilomètres carrés !

Si ce vieil homme n'avait rien chez lui pour le remettre en forme, il irait voir dans les jardins du Palais : il s'y trouverait bien un ou deux lotus, ou même de la Sig Salua...
Et par ce temps, les autres plantes ne le gêneraient pas avec leur pollen.
Mais par ce temps justement, il allait avoir du mal à atteindre le Palais !

- Grmmblbmm.... tu es obligé de rester dehors pour essayer ta méthode ?

-Si ça te va, j'ai un aquarium avec quelques poissons et une ou deux algues artificielles ... Sinon j'ai bien peur de ne pas pouvoir te donner grand chose Truc

Il continuait à se concentrer sur sa corne en parlant mais ressentait vraiment beaucoup trop de déplacements dans le sol et absolument pas assez détaillées pour que ça marche, et l'autre qui continuait à parler

-Oui je suis obligé, arrête de parler Truc s'il-te-plaît ...

Il se rendit bien vite à l'évidence, sa corne ne le mènerait à rien, il leva le bras qui reprit sa forme initiale. Le seul moyen de retrouver Odéline maintenant c'était de faire retrouver ses pouvoirs à la chose pas très sure qui l'accompagnait ... Il allait devoir s'en contenter mais il resterait sur ses gardes.

-Si tu sais où trouver ce que tu cherches pour récupérer de l'énergie, je t'y amène ... Si tu veux tu peux même t'abriter un peu dans une poche de ma veste si t'y rentres ...

Dieu qu'il espérait qu'il ne rentrerait pas dans sa poche. C'était un pari qui lui semblait relativement risqué mais si il le fallait ...

- Dire que je suis sorti de mon ermitage pour Ça !

Béhékine venait de murmurer cette phrase surtout pour lui-même.
Le Démon de Brume commençait à sentir la moutarde lui monter au nez. Se voir proposer des algues artificielles pour requinquer son Essence passait encore : ce pouvait juste être l'ignorance qui était en cause.
Par contre, se faire appeler "truc" par un vieil homme qui n'avait rien fait d'autre pour le moment que poser une corne au sol...
Il avait passé l'âge où on pouvait se foutre de sa gueule, nom d'un glyphe !
Il pensa un instant à envoyer bouler le métamorphe en usant de magie d'air, mais il se retint au dernier moment, pour Odéline et pour éviter d'épuiser ses dernières réserves d'énergie.
Ceci dit, c'était tentant.

- Tu es bien gentil, petit gars, mais on va pas rester copains longtemps si tu continues à m'appeler truc. Je ne vais pas te faire le cadeau de te donner mon vrai nom et je me moque bien du tien, mais appelle-moi Crocs et tout se passera mieux dans cette collaboration.
Garde tes fausses plantes, elles me sont inutiles. Garde aussi ta poche, j'évite les contenants, quels qu'ils soient.
Par contre, j'ai besoin d'aller voir du côté des jardins du Palais. En tant que conseiller, tu ne connaitrais pas un chemin à l'abri de la pluie par hasard ?

La pluie, justement, continuait à le déformer, mais le Démon de Brume ne gaspillait plus d'énergie à essayer de maintenir ou réparer sa forme de chat.
Après réflexion, il pouvait toujours laisser tomber son incarnation ici pour voyager à l'abri du monde jusqu'au Palais, et se rematérialiser là-bas en créant une autre forme simple...
Mais ça épuiserait ses dernières réserves à coup sûr, et s'il n'y avait pas dans les jardins de quoi le requinquer il serait bloqué là-bas pour un moment.

Le machin: Crocs qu'il allait donc l'appeler maintenant venait de piquer une crise... Alors même les entités les plus étranges comme celles-ci pouvait faire ce genre de choses, c'était intéressant que le machin ne restait pas de marbre tout le temps et qu'il pouvait être déstabilisé même si ce n'était pas le but initial du vieil homme. D'ailleurs il avait visiblement laissé tomber sa forme animale et ressemblait maintenant distinctement à complètement rien du tout.
Et puis finalement il devait bien l'aider pour retrouver Odéline

-Il y a bien des fleurs aquatiques au jardin du palais, c'est simple pour y aller tu prend la prochaine à droite puis tu continues tout droit tu devrais pouvoir passer sous les toitures, ensuite tu contournes la charrette du vieux Michel, toujours au milieu de la route tu pourras peut-être même t'y abriter, tu pars tout droit sous l'es toitures encore une fois, tu vas arriver à une Tonnelle parfaite pour te permettre de rester au sec, tu continues tu entres dans le palais par la petite porte toujours ouverte à l'arrière, dans les couloirs tu seras tranquille et tu te dépêches pour aller à la serre. Par contre je ne t'accompagnerais pas, je vais continuer comme ça pour essayer de retrouver Odéline

...

- T'as bien suivi ce que j'ai dit au moins Crocs ? Ou je répète ?

- Ça devrait aller. Pendant que je vais au Palais, je te suggère de te diriger vers un endroit en hauteur.

La voix de Béhékine sortait un peu de nul part lorsqu'il était sous cette forme plus que basique. En fait, peu importe la forme qu'il avait, sa voix était toujours désincarnée, mais les gens avaient du mal à entendre et comprendre des paroles sans pouvoir voir et imaginer la bouche qui les prononçait.
Sans préciser pourquoi il venait de parler d'un lieu en hauteur, le Démon de Brume fila dans la rue, slalomant entre les gouttes au ras du sol.

L'avantage de cette forme de filament tenait dans le fait qu'il ne dépensait quasiment pas d'énergie pour se déplacer.
Slalomant entre les gouttes et d'un abri à l'autre, il arriva bien vite au Palais, et à cette fameuse porte de derrière toujours ouverte. Bon, là, elle était fermée, mais il put se glisser dessous sans problème.
Béhékine croisa un garde qui s'enrhumait dans son armure trempée, un couple de domestiques qui se bécotaient dans un coin en gloussant et un étrange être ressemblant à un home-lézard en habit de serviteur qui portait un plateau imposant. Aucun ne remarqua le filament de brume gros comme un petit serpent qui filait au ras du sol.

La serre se dévoila enfin.
Au moment où il entra à l'intérieur, Béhékine ne put retenir une expression surprise : protégée des éléments dans un petit bassin intérieur joliment décoré flottait la fleur immense ressemblant vaguement à un lotus.
La Fleur aux esprits.
Sig Salua.
Le Démon de brume se rapprocha de la plante rarissime. Pour lui, il n'y avait pas mieux. C'était dommage de devoir extraire l'énergie d'une fleur pareille, mais c'était pour la bonne cause...

Un rituel simple et quelques minutes plus tard, un brouillard particulièrement dense se propagea dans toute la ville d'Elysée.
Béhékine se sentait beaucoup mieux, maintenant qu'il avait une incarnation plus spacieuse dans laquelle promener son Essence. Rechargé à bloc, la pluie ne le gênait plus.
Après un instant à apprécier le changement, il se reconcentra sur la disparition d'Odéline et entreprit de fouiller la ville.
Mais il ne trouva rien, malgré son omniprésence dans tous les coins et recoins de la capitale.
Soucieux, le Démon de Brume reporta son attention sur Siffroy.

Béhékine prit sa forme humanoïde à tête de félin devant le vieil homme.

- Elle n'est plus dans la ville.

[Je te laisse choisir où notre duo d'enquêteurs se trouve ]

"Croc" comme il ... elle ... ce machin s'appelait semblait littéralement avoir repris du poil de la bête puisqu'il ressemblait maintenant beaucoup plus à un félin en bonne et due forme que juste avant de partir vers la serre, il devait avoir trouvé ce qu'il cherchait.
Plus dans la ville ? C'était bien leur veine, si elle était loin, ils auraient forcément du mal à les retrouver, il quitta la petite estrade sur une place d'Elysée où il s'était mis dans l'espoir de pouvoir capter plus de signaux de vie provenant d'Odéline, si elle n'était plus là alors ils devaient sortir d'ici et aller la chercher dehors malgré la tempête qui faisait rage et le vent qui allait de plus en plus fort, ça allait de mal en pis !
Il fit signe à Croc de le suivre et il se dirigea vite vers la sortie, lui sa corne commençait à être inefficace surtout si ils devaient sortir ça n'allait qu'empirer mais l'être de brume semblait assez capable de la retrouver si il savait qu'elle n'était pas en ville et il était bien obligé de lui faire confiance. Il maudissait vraiment sa propre inutilité dans ce genre de cas !
Les animaux avaient un comportement étrange dehors, surement à cause de la tempête qui était su eux, même si c'était quand même très étrange de voir un élan coller son museau contre la tête d'un vieil homme en le regardant dans les yeux avant de repartir !
Et puis derrière un éclair, au loin c'est la tornade qui apparut, elle ne semblait pas se diriger vers eux mais elle était bien là.

- Cet élan était un vieil ami à toi ?

Le Démon de Brume observait la tornade au loin, pensif. Si Odéline était sur le chemin de ce monstre climatique...
Il secoua sa tête vaporeuse, marmonna dans sa barbe avant de soudain s'enfoncer une main dans la poitrine ; il sembla chercher quelque chose un instant, puis sortit de son incarnation avec entre les doigts une minuscule boule de feu bleu.

- Hmm... j'ai bien fait de garder ça finalement. A mon tour, vieil homme, de te montrer un tour de ma fabrication...

Béhékine approcha la boule de feu de sa bouche, et se mit à murmurer des paroles incompréhensibles pendant près d'une minute. Il expira ensuite, longuement, attisant la flamme de la sphère qui atteignit une belle taille avant de la jeter devant lui.
La chose enflammée et bleue s'immobilisa dans les airs - la pluie se vaporisait à son contact brûlant - et prit peu à peu la forme d'une drôle de méduse au visage humain. Pour être plus précis, elle avait le visage d'Odéline.

- Une flamme spirituelle alimentée par mon souvenir de la jeune fille. Elle ne tiendra pas longtemps sous cette tempête, mais sa tendance à pouvoir retrouver son modèle devrait nous mettre sur la bonne voie... En route.

Histoire d'y voir plus clair, Béhékine prit le temps de faire rentrer le brouillard environnant dans son incarnation.
Il se mit ensuite à suivre l'étrange élémentaire de feu qui voletait vers les contrées sauvages, parfois poussée et secouée par les bourrasques de vent.
Drôle de temps pour une promenade...

La chose qui fit son apparition était dans un sens assez effrayante, un visage de jeune fille sur un corps de méduse si on peut appeler ça un corps donnait un curieux mélange qui se trouvait être vraiment très très glauque. Mais si c'était le seul espoir de retrouver Odéline avant qu'elle ne soit engloutie par le tempête qui approchait lentement mais sûrement d'eux, il la suivrait volontiers jusqu'aux confins de Minos.
Il avait connu des gens avec assez de puissance magique brut pour arrêter une tornade qui auraient été ici de la plus grande utilité mais c'était tous des personnes assez exceptionnelles qui ne partageaient pas leur temps et il ne se faisait pas d'illusion, si lui ou même Croc avec lui essayait de s'opposer à la catastrophe météorologique, ils ne pourraient rien faire mis à part se faire avaler et ressortir avec un ou deux membres en moins si ils avaient de la chance.

- Tu es sûr de la fiabilité de ton machin ?

C'est en disant ça que se dessina au loin, entrecoupé par la pluie un creux dans la montagne, un creux qui dénotait et vers lequel se dirigeait la méduse, la lueur d'espoir que Siffroy espérait se montra enfin, il aurait à remercier Croc mais ça il le ferait plus tard, il marcha vite derrière la méduse.

Béhékine aussi gardait un oeil sur le ciel déchainé qui semblait descendre vers eux un peu plus chaque minute. Entre le rugissement du vent, le martèlement de la pluie et les explosions du tonnerre - de plus en plus proches - il se serait cru au beau milieu d'une bataille céleste !
Chassant là ces pensées de poète, le Démon de Brume tourna sa tête vers le vieil homme qui venait de parler :

- Je suis sûr qu'elle va dans la bonne direction. Par contre, la distance à parcourir reste un mystère...

A cet instant, l'élémentaire de feu qui leur servait de guide vacilla sous une rafale plus forte que les autres. Il put voleter encore sur quelques mètres, rétrécissant à vue d’œil, puis s'éteignit doucement, vaincu par la pluie.
Béhékine marmonna quelque chose d'incompréhensible.

- Mmmhmmumm... voilà qui règle la question. Dis-moi, mes yeux ne sont pas aussi bons qu'avant, mais ne serait-ce pas l'entrée d'une caverne que j'aperçois là-bas ?

Ne daignant même pas répondre à la créature quand elle lui parla et que la méduse s'effaça dans les airs, le vieil homme accéléra, ralenti par les rafales de vent, il se dirigeait vers la grotte qui se dessinait de mieux en mieux un peu plus loin. Avec difficultés, il se fraya un chemin jusqu'à ce que le pic devant lui bloque en partie les courants d'air, lui permettant de se relâcher.
Il ne se relâcha pas, il se jeta en avant de plus belle pour entrer dans la gueule béante au milieu de la paroi rocheuse, le ciel gris et les nuages firent place à des  rochers. La caverne s'étendait sur une distance inconnu et dans le noir, il lui était impossible de savoir quand est-ce qu'il arriverai au bout. Elle aurait pu être toute petite comme se prolonger sur des centaines de mètres.
Il n'eut pas besoin d'aller jusqu'au bout, un éclair blond dans le noir sauta à ses yeux et il se jeta sur Odéline qui était là, assise sur le sol, la serrant contre lui, heureux de l'avoir retrouvée, les mots ne purent se frayer un chemin jusqu'à sa bouche.
Un grognement sourd, animal se fit entendre derrière lui mais il était trop obnubilé par la jeune fille pour ne serait-ce qu'entendre quelle bête pourrait être prête à l'attaquer.

Odéline  jouait avec l’ourson depuis un certain temps déjà, et la présence des ours lui avait fait oublier l’orage qui la terrorisait tant. Elle discutait avec eux comme avec des humains. Elle pratiquait avec le petit un jeu de mans –et de pattes, donc- très drôle accompagné de chansons. Aussi, lorsque soudain on se jeta sur elle, et on la serra jusqu’à l’étouffer, elle fut légèrement surprise. Mais elle reconnut la rugosité et l’odeur des vêtements, le piquant des joues contre les siennes.

- Siffroy !

Elle se blottit contre lui avec joie. Elle aussi, elle était contente de le retrouver. Non pas qu’elle ait eu peut ou quoi, mais elle l’aimait bien. Et puis, il la prenait rarement contre lui, comme ça.
C’est alors qu’elle entendit l’ours. La voix était grave. Il prenait ça pour une attaque.

- Non, non, ne t’inquiète pas ! C’est mon ami !

Elle se leva tout en disant ces mots, échappant à l’étreinte de Siffroy, dont elle prit la main.

- Monsieur Ours, je te présente mon ami Siffroy Belgan. C’est chez lui que je vis. Il est très gentil. Il est venu me chercher je pense.

Elle se tourna vers lui.

- C’est bien ça, hein ? Tu es venu me chercher ? Comment m’as-tu retrouvée ? Toi aussi, c’est le vent qui t’a aidé ?

Elle le harcelait de question, sans se rendre compte de l’étrangeté de ses actes, et de ses paroles. En effet, tout lui paraissait tout à fait normal.

Une rafale de vent plus forte que les autres empêcha Béhékine de rejoindre Siffroy immédiatement, à l'abri de cette caverne.
Il grommela un instant, son incarnation déformée par les éléments mêlés qui s'abattaient sur lui, puis le Démon de Brume reprit sa forme de chat, plus petite et stable, avant de pénétrer d'un bond dans la caverne.

Il prit le temps de jeter un regard de défi à la tempête dehors, puis reporta son attention sur ce qui se passait à l'intérieur de la caverne.
Odéline était là, Siffroy déjà à ses côtés. Plus au fond, une famille d'ours...
La surprenante jeune fille achevait de faire les présentations.
Béhékine ricana, sa gueule trop grande lui étirant le faciès jusqu'aux oreilles, puis il réagit à la dernière question d'Odéline :

- Quelque chose comme ça...

Ses yeux brillaient dans la lumière faiblarde.
Il se sentait soulagé de la voir en sécurité - sans avoir envie de le montrer pour autant ! - mais il était aussi bien curieux de savoir ce qui l'avait amené ici, avec ce temps...

Odéline faillit lâcher la main de Siffroy de surprise en voyant Béhékine afin de lui sauter au cou à lui aussi, avant de se souvenir qu’il n’avait pas de corps. C’était compliqué de serrer contre soi quelqu’un sans corps … Elle lui fit un immense sourire. Elle allait lui dire sa joie de le voir, et le remercier d’avoir mené Siffroy ici –elle se doutait que c’était grâce à lui : ses pouvoirs démoniaques étaient surprenants- lorsque soudain, ils furent submergés par une marée vivante de petits oiseaux bruns et trempés. Odéline eut assez peur en les voyant tous rentrer ainsi, mais surtout eut un pe mal lorsqu’ils lui picorèrent les pieds : ils avaient sûrement faim. Derrière, elle entendit les ours grogner. Tout en se demandant pourquoi Siffroy et Béhékine ne leur parlaient pas, eux, et pourquoi c’était à elle de tout faire pour éviter les déchiquetages successifs, elle prit la parole.

- Du calme, du calme ! Ce ne sont que des oiseaux !

Elle en prit un dans sa main et le montra à la famille ours.

- Regardez, vous ne craignez rien ! Ils sont tout petits, tout gentils et tout mouillés.

Elle sourit aux grosses bêtes et se tourna vers les petites.

- Vous avez eu peur de l’orage vous aussi, c’est ça ?

Il y eut un cœur d’acclamation. Elle rit.

- Oui, je vous comprends : moi non plus je n’aime pas beaucup ça. Vous avez faim ? je dois avoir quelques gâteaux secs sur moi, si vous voulez … Mais il faudra vous les partager, hein, sinon, personne n’en aura, ou ceux qui ne partagent pas iront dehors sous la pluie !

Elle avait pris un ton de maman en disant cela. De l’extérieur c’était sûrement très drôle –et peut-être un peu inquiétant- cette gamine qui parlait à une armée d’oiseau et à une famille d’ours comme à des frères et sœurs. Ils promirent de ne pas tout manger tous seuls, et elle sortit d’une poche les gâteaux un peu gorgés d’eau, qu’elle émietta tant bien que mal, avant de les poser à terre. Puis, elle se tourna vers les autres.

- Dites, vous n’auriez pas quelque chose d’autre à leur donner, dans vos poches ou dans la caverne ? Ils ont vraiment très très faim, et je ne crois pas que ces deux petits gâteaux les calent, les pauvres !

Elle regarda Béhékine en riant.

- Bon, toi tu n’as pas assez de poches pour ça, je crois !

Elle tenta de se rapprocher de lui, toujours main dans la main avec Siffroy.

- C’est toi qui l’as amené ici ? C’est toi qui m’as trouvée ?

Elle lui souriait, tout en surveillant la famille ours qui semblait chercher quelque chose à donner aux petits oiseaux, et Siffroy.

La marée d'oiseaux déferla dans la grotte, et Béhékine prit vite de la hauteur lorsque son incarnation se fit malmener en tous sens par des centaines de petits corps.
Comme il avait une certaine image à respecter, et que ses incarnations félines commençaient à déteindre sérieusement sur son comportement, il fabriqua un petit coussin vaporeux lévitant dans les airs sur lequel le chat de brume vint s'allonger, alors qu'il se retenait de bondir sur les kiwis pour en manger un ou deux...

La vue d'Odéline maternant l'armée de kiwis le surprit assez pour qu'il oublie ses pulsions irrationnelles de mortel, et il se mit même à rire en voyant les oiseaux piailler à l'unisson en réponse à la jeune fille.
Sa question le fit redevenir sérieux.

- Disons que j'ai aidé, oui. Comment t'es-tu retrouvé ici par ce temps ?

Siffroy resta bouche bée devant le spectacle qui prenait place. Sous ses yeux, la jeune fille qu'il hébergeait s'était mise à parler avec les petits animaux qui étaient entrés dans la caverne. Mais elle ne leur avait pas parlé comme une enfant ou un adulte gaga habituel. Elle dialoguait avec eux comme si ils la comprenait et le plus étonnant est qu'ils semblaient la comprendre ! Les yeux écarquillés il bégaya en la tirant vers lui, toujours sa main dans la sienne:

- Odé-Odéline ? Depuis quand parles-tu le Kiwi ?

Les oiseaux après avoir dévoré le bout de gâteau se remirent à leur picorer les pieds, semblant tous affamés. Il leur jeta deux saucissons qui traînait au fond de la poche de son gilet pour de sombres raisons.

Odéline se sentait tout à fait harcelée. C’était donc ça le quotidien d’une femme avec des enfants ? Elle n’osait même pas imaginer comme c’était de vivre ça quotidiennement ! Comment faisaient-elles pour ne pas devenir folles et exploser ? Comment ? Heureusement, les réclamations des oiseaux se calmèrent avec le saucisson –douteux- de Siffroy.

- Siffroy, ne fais pas l’idiot, tout le monde sait faire ça ! Et arrête de laisser trainer de la nourriture au fond de tes poches, c’est vraiment défoutant, tu sais …

Elle lui souriait gentiment.

- C’est très gentil, merci beaucoup ! En fait, je cueillais des fleurs, quand le vent m’a prévenue de l’orage et m’a menée jusqu’ici, où j’ai rencontré cette adorable famille ! Et du coup, j’ai joué ici avec le petit, en attendant que l’orage se termine. ET vous êtes arrivés !

Elle avait toujours son éternel air candide. Tout était tout à fait normal.