[Terminé] La fête des fous [Fête du Couronnement 2782]

Ce n’était pas elle qui avait eu l’idée de ces leçons de natation. Enfin, si, elle avait suggéré le fait de lui apprendre à nager? Pas cette manière là, à laquelle elle n’adhérait pas vraiment. Elle ne se souvenait pas d'avoir appris à nager. Vraiment pas. elle avait l’impression d’avoir toujours su. de ne jamais avoir eu à y réfléchir. Elle était une fille des eaux, après tout. De ce fait, elle ne savait pas apprendre aux autres. Elle les avait donc laissés faire, tout en veillant à ce que Ze ne finisse ni noyé, ni gelé -ce qui n’était pas une mince affaire. Elle vérifiait toujours al corde, afin qu’elle ne puisse céder, et se tenait toujours prête à aller le repêcher en cas d’accident? Ce gamin lui paliasait bien, et elle aurait trouvé dommage qu'il meurre noyé. Plusieurs fois elle avait lancé des regards noirs aux partes qui le laissaient trop longtemps sous l’eau, par jeu. Ils avaient bien senti qu’il vallait mieux ne pas la provoquer sur ce sujet, et l’avaient remonté à chaque fois. cependant, elle constatait joyeusement que le mini-pouce faisait des progrès. Ses gestes, plus coordonnés, lui permettraient bientôt de rester à la surface. Il continuerait à s’épuiser, mais il ne mourrait pas noyé. Juste épuisé. Elle prévoyait donc bientôt de faire en sorte de lui donner de vraies leçons, afin qu’il sache nager, et non plus juste flotter, afin de pouvoir aller vite. Petit et vif comme il était, il serait sans aucun doute très bon à la pêche, une fois qu’il saurait nager.
Un jour, un soir même, alors qu’elle montrait comment faire des noeuds [Xerxès, si tu veux être là à l’atelier nouage, tu peux x)], il lui posa une drôle de question. elle leva un sourcil.

Bah … c’est parce que c’est lui le capitaine enfin !

Il y avait comme un rire dans sa voix.

Finis bien ta boucle, sinon, ça tiendra pas. T’avais pas encore compris ? Tu nous as jamais entendu l’appeler “Capitaine” ?

*On est si irrespectueux que ça enver notre chef ?*

Ses fossettes tremblaient de rire aux coins de sa bouche.

Le Darah avait passé des journées à tenter de se cacher pour éviter les corvées, plus par jeu que par réelle non-envie de les faire. C'était toujours une grande joie d'ailleurs quand on le trouvait. Un peu moins quand on le faisait travailler à coup de pied aux fesses évidemment. Mais au moins il avait gagné un peu d'argent en trichant aux cartes depuis le début ! Il faisait évidemment ça quand les deux plus haut-gradés n'étaient pas dans le coin, histoire que le mal soit déjà fait quand ils l'apprendraient.
Une conversation s'engagea à bord du navire lors d'une agréable soirée. Sur qui était le capitaine donc. Le Darah laissa échapper un hoquet de surprise

- Quoi !? Ce n'est pas toi le capitaine ? Moi qui croyait qu'on avait une raison de t'obéir. Pour moi Alban était un mousse que tu avais gentiment accepté ...

Il sourit en continuant les noeuds qu'il était en train de faire. Il avait posé à côté de lui plusieurs de ses oeuvres d'arts, terminées ou pas, qu'il confectionnait de ses doigts agiles. Faire des noeuds pour donner des formes n'était qu'un casse-tête de plus qu'il tentait de résoudre à chaque fois.

- Haha !

Il montra triomphalement sa nouvelle création. Un chien fait en noeuds comme certains clowns les font en ballons. Il le trouvait assez réussit, la truffe était même humide grâce aux embruns ... Comme le reste du corps. Il était aussi très fier du gilet qu'il portait d'ailleurs, fait en cordage lui aussi.
Il en avait aussi fait un pour les deux compères mais étonnamment, ils n'avaient pas été très motivés pour porter ce qui serait un jour une grande mode.

Bah … c’est parce que c’est lui le capitaine enfin !

... Ah ? Zel était persuadé que c'était Aélya, le capitaine. Maintenant, certaines choses prennent plus de sens. Comme le fait que les ordres d'Alban ont la précédence sur ceux d'Aélya. Ou le fait que tout le monde ait cette lueur de respect dans les yeux en le regardant. Ou le fait que le cuisinier ai déjà fait référence à lui en l'appelant "Le Capitaine".

-Ah oui, j'aurais pu m'en rendre compte, en fait...

- Quoi !? Ce n'est pas toi le capitaine ? Moi qui croyait qu'on avait une raison de t'obéir. Pour moi Alban était un mousse que tu avais gentiment accepté ...

Donc Xerxès aussi pensait que c'était le cas ! Mais Zel se rend compte bien vite au sourire du Darah qu'il ne fait que taquiner Aélya. Ah... Donc il est vraiment le seul à ne pas s'en être rendu compte.

-Désolé, dit-il à la jeune femme. Comme tu nous a embarqué aussi facilement, Xerxès et moi, je pensais que tu étais le capitaine.

Comme pour confirmer ses dires, Xerxès tend une sorte de chien qu'il a fait avec les cordes qu'il manipule. C’était ça qu'il fallait faire ? Zel pensait qu'ils devaient faire un nœud de chaise...

-Du coup, tu es son second, c'est ça ? Comment tu savais qu'il accepterait de nous prendre à bord ?

Aëlia regarda Xerxès d’un mauvais oeil. Il avait intérêt à faire attention, lui, ou il risquait bien de passer par dessus bord ! Ceci dit, sa création en cordes la surprit. Il était doué, mine de rien, celui-ci. Finalement, peut-être qu'elle ne le passerait pas par dessus bord. Elle lui sourit.

T’en fais pas, gamin.

Elle allait répondre que si son frère les avait laissés embarquer, c’était car il était tout entier à sa merci quand soudain:

Je t’entends penser, petite soeur.

Elle sursauta et se retourna, souriant de toutes ses dents, au grand bonhomme qui se tenait derrière elle.

Si je vous ai pris sur ce navire, c’est parce que deux mousses en plus n’ont jamais fait de mal à personne sur une expédition aussi longue. Et que vu la vitesse à laquelle vous avez dit oui à mon embobineuse de petite soeur, vous ne devez pas avoir beaucoup d’attaches. Donc si vous mourrez, je n’aurai personne sur le dos. sinon, vous seriez restés à terre.

*Bah alors, tu fais le grand méchant capitaine ? Admets-le que c’est juste que tu en sais pas résister à mon sourire, Alban.*

Elle lui fit un clin d’oeil.

*Evidemment, tu sais bien que toutes mes décisions se prennent à travers toi !
Rabat-joie !*

Cette fois, ce fut lui qui lui sourit, crâneur.

Et ce chien a beau être très joli, vous êtes là pour resserrer les cordages. Je ne vous nourris pas pour faire des animations de fête foraine !
Mais dis-moi, honorable capitaine, on s’est levé du pied gauche ?
Attention à toi, Lëlie, tu vas finir à la corvée de patates !

Ces derniers mots avaient été lancés en s’éloignant. Aëlia éclata de rire, et se tourna vers le deux mousses.

Un homme adorable n’est-ce-pas ? On s’adore. Ne vous laissez pas trop impressionner. Il est pas bien méchant.

Elle leur sourit.

Bon alors, ces noeuds, vous vous en sortez ?

Quand Alban débarqua, le jeune Darah laissa échapper un petit "Nmph" en soufflant du nez. Il n'avait pas fini de s'amuser et n'avait pas eu le temps de raconter à Zel qu'Alban et Aëlia étaient en fait mari et femme ...
Puis le capitaine l'attaqua sur le fait que son chien était joli "C'est vrai" mais que ce n'était pas ce pour quoi ils étaient là. Alors un deuxième soufflement de nez échappa au Darah qui commença à bouder. Puis quand Aëlia lui demanda où ils en étaient avec leurs noeuds, il leva les yeux au ciel et d'un air hautain, plaça son chien au niveau du mât où il devait resserer le cordage, tira un coup sec sur deux fils et l'animal se délita pour laisser derrière lui un noeud parfait, solide et tous les autres beaux compliments que l'on peut faire à un noeud, en tout cas d'après un Darah.

- Mes noeuds sont parfaits ! Je serai un mauvais magicien si je ne savais même pas faire une tâche si simple de mes mains !

Il sortit un doublon piqué à un pirate de derrière son oreille avant de commencer à le faire passer d'entre deux doigts à entre deux autres, le faisant sauter certains espaces et disparaître puis réapparaître de temps en temps. Il mis sa pièce en place comme pour faire un pile ou face, la jeta dans les airs et au moment où elle allait retomber dans sa main -Il avait déjà prévu de dire à Zel qu'il avait perdu le pile ou face sans même le lui avoir proposé et ricanait intérieurement d'avance-, un oiseau marin passa et attrapa la monnaie au vol.

- Mais !

Puis un autre oiseau du même acabit passa à côté, le Darah ne connaissait pas l'espèce. Puis un autre. Et deux autres. Il regarda ou partaient les oiseaux puis jeta vers l'endroit d'où ils arrivaient et hoqueta de surprise en apercevant un nombre de ces bestioles assez important s'approcher du navire

- Attention elles doivent vouloir voler tout notre argent !!!

Si je vous ai pris sur ce navire, c’est parce que deux mousses en plus n’ont jamais fait de mal à personne sur une expédition aussi longue. Et que vu la vitesse à laquelle vous avez dit oui à mon embobineuse de petite soeur, vous ne devez pas avoir beaucoup d’attaches. Donc si vous mourrez, je n’aurai personne sur le dos. sinon, vous seriez restés à terre.

Zel n'avait pas vu Alban - le capitaine, se rappelle-t-il - arriver. Ce qu'il dit n'est pas faux. Zel n'a plus aucune attache. Maman est morte et la tribu lui a dit de partir, après tout. Par contre, il se demande ce qu'il en est de Xerxes. Est-ce que lui aussi n'a plus personne pour lui ?
D'ailleurs, il fait une drôle de tête, Xerxes. C'est vrai que lorsque Alban est dans le coin, il semble se renfrogner. Au début, Zel pensait que c’était comme avec Aélya, une dispute qui cache une certaine forme d'amitié, mais plus le temps passe, plus il en doute.

Et ce chien a beau être très joli, vous êtes là pour resserrer les cordages. Je ne vous nourris pas pour faire des animations de fête foraine !

Aaaaaah, donc il fallait bien faire des nœuds ! Alban et Aélya se chamaillent et un nom parvient aux oreilles de Zel : Lélye. C'est mignon.
Soudain, Xerxes fait un geste étrange et son chien se transforme en nœud. Zel en reste bouche bée.

- Mes noeuds sont parfaits ! Je serai un mauvais magicien si je ne savais même pas faire une tâche si simple de mes mains !

Magicien ? WOAH !
Le Darah continue et fait apparaître et disparaitre une pièce dans sa main. Zel se met à applaudir. Visiblement encouragé, Xerxes  place la pièce sur son pouce, la fait voler et.. la pièce se fait avaler par une... sorte de mouette ?

"Ça fait partie du tour ?"

Mais vu la réaction de Xerxes, non. Et le nombre d'oiseaux grossissait.

- Attention elles doivent vouloir voler tout notre argent !!!

Ah.. Zel est fauché, donc il ne risque plus rien, non ?
Mais tout à coup, l'un des oiseaux se jette sur lui et lui plante un coup de bec sur le crâne.

-AÏE !!!

Visiblement, si, il risque toujours.

-Sale bête ! J'aime bien les animaux, mais quand même.

Empoignant la corde la plus proche, il la déroule comme un fouet avant de l'agiter autour de lui de façon désordonnée pour effrayer les bêtes.

CHTUNK

-Chtunk ?

Zel regarde la direction du bruit. Le bout de la corde a atterri sur la tête de...

-Oups... Désolé, Xerxes...

Aëlia regarda Xerxès bouder, se renfrogner sous l’oeil étonné de Zel, puis faire passer dans ses doigts une pièce de monnaie, tel el magicien qu’il était, avant de se la faire piquer par une mouette. Une grosse mouette.
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*Alban, qu’est ce qu’elles font là ?! On est trop loin de la terre pour qu’il y ait des oiseaux !
Aucune idée, mais ça fera à manger !*

Elle sourit, et environ au même moment, la plupart des pirates dégainèrent leurs armes à feu, et plusieurs détonations retentirent. La plupart des oiseaux prirent la fuit, mais certains tombèrent sur le pont, morts. La jeune femme souffla sur son canon encore fumant, et sourit.

Vous aimez la volaille ? Il y en a à plumer pour le repas !

Ca allait les changer du poisson ! Elle se tourna vers Zel.

Bon, et toi, après ça, on va t’apprendre à ne pas assommer tes camarades à coup de corde.

Elle fit un mouvement de tête, et alla ramasser les cadavres des volatiles les plus proches, avant de les amener à la cuisine. Avec ça ils allaient avoir un bon repas ! Elle s’attaqua donc à les plumer, tout en gardant les plumes (elle trouvait son oreiller un peu mou).

Les jours passent, lentement mais sûrement. Depuis l'attaque des oiseaux, Zel est passé de la préparation des nœuds à celle préparation des repas (mais Aélya ne le laisse plus s'approcher des cuisines depuis qu'il a versé une potion par mégarde dans la soupe), des repas au lavage de pont (qui lui a fait comprendre le calvaire qu'il a fait endurer à l'équipage quand il vomissait encore), du lavage de pont au rafistolage des voiles (d'ailleurs, il y a encore des petites tâches rouges dessus... Zel n'est pas très doué avec une aiguille), du rafistolage des voiles à l'épluchure des pommes de terre (et encore, sous étroite surveillance) et de l'épluchure des pommes de terre à la préparation des nœuds. C'est un peu redondant mais bon, le garçon est loin d'être un marin, impossible de lui confier une tâche vraiment importante.
Bien entendu, toutes ces tâches sont toujours entrecoupées des leçons de natation à la corde.

"Je ne m'y habituerai jamais..." pense-t-il un soir.

Il n'a pas manqué de se noyer, cette fois, mais pourquoi a-t-il fallu que le bateau croise un banc de poisson à ce moment-là ?

-J'ai encore des écailles entre les dents... C'est dégueu...

Au moins, ils ont pu remplir les filets... une fois qu'ils ont arrêté de rire. Et ça changera des mouettes.
Au souvenir de l'attaque des volatiles, Zel frissonne. Lorsque Aélya a plumé les oiseaux, il a eu l'impression de sentir les plumes de ses propres ailes tomber une à une. Empathie de volatile à volatile, il suppose. Est-ce que ses ailes à lui ont le même goût, d'ailleurs ?

"Mais pourquoi je me pose ce genre de question, moi ?"

Ses pensées sont interrompues alors qu'il aperçoit Xerxes sur le pont. Le Daraah semble plongé dans ses pensées. Zel le salut rapidement avant de s'asseoir à côté de lui, sur le bastingage, ses petites jambes au-dessus de l'eau. Si il tombe, il va se noyer.
Le jour commence à peine à décliner, il reste suffisamment de lumière pour y voir clair. Zel sort son petit carnet. Ses pages se sont remplies au fil des jours. Il les parcours du regard, remontant le temps jusqu'au jour où il a rencontré Xerxes et Aélya. En y repensant, Aélya lui a donné une piste concernant les autres mondes dont parlait Papa. Son aventure progresse. Xerxes, par contre...
Xerxes... était bourré ce soir là ! Il n'a pas entendu ce que disaient Zel et Aélya, et Zel n'a pas pensé à l'interroger ! Triple buse de cochon volant stupide !

-Euh... Dis, Xerxes, t'as entendu parler des autres mondes ? Aélya m'a dit qu'elle n'en savait pas beaucoup là-dessus, alors je me disais que toi, peut-être...

Xerxès avait déjà vécu un voyage sur l'Envolée par le passé, il se sentait bien à sa place parmi les pirates mais le souci des voyages en mer, c'est que le sang se fait rare pour un Darah. Et si il en voulait, le voyage agréable en bateau se transformerait vite en histoire d'horreur et chasse au vampire se nourrissant des membres de l'équipage. Quelle idée aussi d'avoir des tendances chaotique-bon quant au choix de ses repas !

La nuit, il passait du temps sur le pont comme d'habitude, la lumière du soleil ne le blessait que peu comparé aux autres personnes de sa race, il supposait que c'était du au fait qu'il était enfant de Darah et pas devenu Darah comme la majorité. Mais sa peau le tirait quand même et il était plus à l'aise de nuit. Regardant l'eau appuyé contre le bastingage, il observait les poissons de nuit qui passaient un peu plus loin, voyant comme en plein jour. Et il avait faim. Son oeil légèrement rougi par l'envie de sang. Une petite claque ou deux à soi-même avant que quelqu'un n'arrive derrière lui. Zel.

- Bienvenue au comptoir du bateau, je vous sers quelque chose jeune homme ?


Il avait posé devant lui quelques bouteilles qu'il mélangeait de temps en temps pour s'entraîner, le but étant bien sûr d'être plus rapide que ne pouvait le voir l'oeil et de tromper celui-ci. Il eu un sourire, carnassier sans le vouloir, et ne plantant pas son oeil injecté dans celui de Zel, il répondit :

- Bien sûr que j'ai entendu parler des autres mondes ! J'y suis même peut être allé mais je ne m'en souviens plus malheureusement. En tout cas ce que je peux te dire c'est qu'il existe une multitude de façon d'y entrer. Passer par des armoires, foncer dans le mur d'une gare, rouler dans des engins mécaniques et atteindre 88 miles par heure. J'ai aussi entendu parler d'un homme entrant dans le monde de la Création qu'utilisent les Créateurs pour leur pouvoir !
On n'a pas beaucoup parlé jusque là, je suis un Darah mais toi t'es quoi exactement ?

Aëlia avait donné moults missions à Xerxès et Zel afin qu'ils ne s'ennuient pas ni n’aient le temps de faire des bêtises. Les jours sur le bateau passaient, et se ressemblaient pour la plupart -il fallait l'avouer, un voyage était souvent assez monotone si on n'était pas attaqué, or leur seule grosse attaque à ce jour était celle des mouettes ce qui était, avouons-le assez peu glorieux-. Elle regardait ses cartes, assistait Alban, et menait l'équipage. Elle passait aussi beaucoup de temps à scruter l'horizon. Ils avaient dépassé les deux tiers de leur périple, et comme, souvent, il commençait à tarder à Aëlia d'arriver. Entourée uniquement d'hommes, qui la considéraient tous comme une petite soeur intouchable, mais ni comme une amie, ni comme une égale quoiqu’ils reconnaissent ses compétences, la vie était parfois un peu longue sur l'Envolée pour elle. Oh, bien sûr, elle était en sécurité mais ... Mais parfois, Garmyr, malgré tous ses défauts lui manquait. Cette sensation s'effaçait vite cependant lorsqu'elle se remémorait les derniers mois de leur relation.
C'est ainsi que ce soir là, alors que le soleil se couchait, elle s’apprêtait en sortir de sa cabine pour grimper au mât et aller crayonner un peu tout en surveillant l'horizon, car pourquoi pas. Cependant, voyant Xerxès et Zel, assis sur le bastingage et en pleine conversation, elle décida de ne pas se montrer, et de rester en retrait. Ainsi, dissimulée par un poteau, elle préféra ne pas les déranger, en pas les couper dans leur conversation, car ce serait très certainement arrivé s'ils s'étaient aperçus de sa présence. Et elle laissa traîner un peu ses oreilles, un peu son pouvoir, afin de pouvoir, non pas les espionner, amis intervenir si cela virait au vinaigre. Elle n'avait pas encore entière confiance dans le Darah, d’autant que celui-ci ne s'était pas nourri sur le bateau.

[Jvous laisse papoter jusqu'à ce que ce soit pour moi le bon moment d'intervenir ! ]

-Bien sûr que j'ai entendu parler des autres mondes ! J'y suis même peut être allé...

Zel sent son cœur s'arrêter de battre. Xerxes y serait allé ? L'excitation monte en même temps qu'un sourire sur son visage, mais Xerxes reprend :

-... mais je ne m'en souviens plus malheureusement.

Tout retombe d'un coup, excitation et sourire. Comment est-ce possible ? Xerxes est-il amnésique ? Bien sûr, s'il ne s'en souvient pas, mais a-t'il perdu d'autres souvenirs ou seulement ceux de ces autres mondes ?
Xerxes se lance ensuite dans une explication des différents moyens qu'il connaît d'atteindre d'autres mondes et le garçon les note tous. Passer par des armoires... Zel se voit difficilement aller chez un ébéniste et entrer dans les armoires qu'il a fabriqué pour voir s'il atteint un autre monde. Foncer dans le mur d'une gare... S'il essaie, il va récolter beaucoup de bleus. Rouler à 88 miles à l'heure ? Est-ce qu'un seul véhicule terrestre peut atteindre cette vitesse ? Zel s'imagine aller à une telle vitesse... le paysage doit être indescriptible. Il n'est même pas sûr que l'Envolée aille aussi vite. Et un homme entrant dans le monde de la Création... C'est bien trop pour l'esprit de Zel qui n'arrive pas à se représenter un tel monde. S'il rencontrait un Créateur, il pourrait lui demander...

-On n'a pas beaucoup parlé jusque là, je suis un Darah mais toi t'es quoi exactement ?

Zel se fige. « T'es quoi » ? Bonne question... Il ne sait pas trop pourquoi, mais s'il a su s'expliquer sans soucis devant Aélya, il a plus de mal devant Xerxes. Pas parce qu'il l'intimide, mais... il dégage quelque chose... Zel n'a pas envie qu'il le considère comme une Abomination, lui aussi... comme la tribu. Et si Xerxes demande à voir son dos nu... A cette simple idée, Zel frissonne e les mots sortent tout seuls :

-Je... C'est compliqué. Papa était un Voyageur. J'ai été élevé dans une tribu d'Aniformus, mais je n'ai jamais été exactement comme eux.

Zel marque une pause. Il n'ose pas dévoiler son statut d'infirme. Et puis zut

-Du coup, je n'en sais pas beaucoup sur moi-même. Je n'ai jamais approché un portail, donc je ne sais pas si j'ai les mêmes capacités que les autres Voyageurs... Il paraît que je leur ressemble physiquement, mais c'est tout.

Ça, au moins, c'est la vérité.

-Du coup, tu peux considérer que je suis un Voyageur... Je suppose.

Bien, ça devrait être suffisant. Zel en a dis assez, il l'espère, pour satisfaire la curiosité du Daraah, et il a masqué l'essentiel. Et avec le recul, c'est cohérent avec ce qu'il a déjà dit à Aélya. S'ils discutent tous les deux de lui, il ne devrait pas y avoir trop de contradictions et s'il y en a, il pourra toujours trouver une excuse.
Les yeux verts de Zel croisent celui unique et rouge de Xerxes. Aussitôt, le jeune garçon se sent coupable. Coupable de ne pas avoir tout dit. Coupable d'avoir menti à la première personne qu'il a rencontré. Mais cette culpabilité est plus faible, se dit-il, que la détresse qu'il ressentirait si Xerxes le repoussait pour ce qu'il est.
Peut-être que la tribu avait raison, finalement.
Peut-être est-il une Abomination.

Xerxès observe le jeune homme pendant sa réponse, semblant moyennement sûr de lui alors qu’il lui parle d’Aniformus et de Voyageurs… Il lui adresse un grand sourire qui se veut aimable mais les canines et la complexion pâle du Darah lui donnent un air sinistre à tout moment.

- Eh t’as pas l’air d’être bien au courant sur toi-même pour un petit érudit ! J’admet que je n’ai pas grand chose à faire en ce moment et tu sembles à la recherche de connaissances : Si ça te tente plus tard je m’incruste dans ton épopée ! Et puis remplir le gruyère qu’est ma mémoire ne peut que m’être bénéfique non ?

Il hésita un instant.

- Si t’as pas peur de voyager avec un Darah éventuellement … Qui aurait voyagé entre les mondes dans une autre vie ou un passé oublié !

Il lui fit un clin d’oeil

Xerxès sourit - enfin, Zel suppose qu'il sourit. Au moins, il a l'air de croire son histoire...

- Eh t’as pas l’air d’être bien au courant sur toi-même pour un petit érudit !

... Ou peut-être pas, tout compte fait. Mais bon, il ne pousse pas le sujet plus avant. Ce qui n'est pas sans soulager le garçon.

J’admet que je n’ai pas grand chose à faire en ce moment et tu sembles à la recherche de connaissances : Si ça te tente plus tard je m’incruste dans ton épopée ! Et puis remplir le gruyère qu’est ma mémoire ne peut que m’être bénéfique non ?

Voyager avec Xerxès ? Voilà qui est tentant ! Le Darah semble savoir se débrouiller, et son expérience sera certainement bénéfique. Aucune raison de refuser... Mais ça ne risque pas d'être dangereux ? Et si il fini par découvrir le pot aux roses ?

"Ça devrait aller. Tant que je fais attention et que je n'utilise pas mes ailes à tort et à travers, tout devrais bien aller. De toute façon, je ne vois pas trop à quoi elles me serviraient..."

- Si t’as pas peur de voyager avec un Darah éventuellement … Qui aurait voyagé entre les mondes dans une autre vie ou un passé oublié !
ajoute-t-il avec un clin d’œil.

Zel esquisse un sourire :

-Ce n'est pas pire que d'aller avec un Voyageur qui n'a aucune idée de qui il est, non ?

Le garçon ne peut réprimer son fou rire et le laisse sortir à gorge déployée.

"Si je voyage avec lui, je suis sûr que je rirai comme ça très souvent."

Zel se mit à partir d’un seul coup dans un fou rire à une blague qu’il avait lui-même lancé en réponse à celle du Darah. Xerxès le regarda une seconde, penchant la tête sur le côté interloqué puis se lança lui aussi dans un grand rire de son cru. A eux deux, en train de rire fort sur le pont d’un bâteau durant la nuit, ils auraient pu parfaitement conclure un épisode de sitcom très moyenne.
Une scène signifiant qu’ils venaient de sceller une sorte de pacte d’amitié bizarre sûrement. Le Darah n’arrivant pas à dormir et Zel non plus visiblement, ils continuèrent à discuter un moment.

Le voyage se poursuivit doucement, sans incident majeur qui ne se rappelle à la mémoire défaillante du Darah en tout cas. Ils finirent par accoster bien plus tard pour aller rejoindre un groupe de personne qui partaient d’Hypnos.

L’Expédition. Un nom grandiloquent qui ne semblait finalement pas si attirant que ça mais pourquoi pas !

Aëlia resta un moment en retrait, observant avec une certaine fascination la naissance d’une amitié incongrue. A vrai dire, plusieurs fois, elle avait souri et hésité à aller se joindre à eux, puis s’était rappelée de toutes leurs différences, et surtout de cette distance qui les séparerait toujours: elle serait en mer, et eux sur terre. Ils n’avaient pas besoin d’elle, et elle resta à l’écart: après tout, l’équipage lui avait bien suffi, durant des années, non ?
Au bout d’un moment elle reprit son poste de vigie, et le voyage reprit normalement pour plusieurs semaines. Elle mentionna quelques fois des connaissances à elle -Kyril et Odéline, Natalia aussi- devant Zel, afin que peut-être il puisse les contacter. Elle lui parla aussi de Garmyr, sans mentionner l’intégralité de leur relation. Lui, avec son histoire de cimetière dimensionnel, peut-être qu’il pourrait lui donner des informations ? En tous cas, elle prit le temps, durant ce périple, de s’attacher aux deux énergumènes, et lorsqu’ils débarquèrent, elle continua à correspondre de temps en temps avece ux, y compris lorsqu'ils étaient au milieu de Crannsliabh (et qu’elle était, sans se l’avouer, inquiète) même si elle aussi était parfois difficile à contacter. Le gamin l’intriguait, et elle se refusait à le perdre de vue totalement. Quant au Darah, plus elle le voyait, plus elle le trouvait sympathique et drôle; d'ailleurs, il s’était débrouillé à la fin du voyage pour gagner sa confiance.