[Archivé] La Descente [libre]

La pluie cinglante et froide fouettait les pics rocheux et mortels. Le vent s'engouffrait dans les failles des roches, hurlant à la mort et menaçant chaque animal de les tuer par sa force.
C'était l'endroit parfait pour un meurtre. Trop parfait.
Angel n'aimait pas la perfection. Lui, s'il était accroché, torse presque nu (puisque sans vêtements mais avec des armes), à  ces dangereuses montagnes, c'était simplement par envie. Parce qu’il voulait s'entrainer, et que ces conditions assez ... extrêmes lui plaisaient. Inlassablement, il montait, contre vent et pluie. Il était tout simplement trempé. OU fou, selon les points de vue. Mais lui, ce que l'on pensait de lui, il s'en fichait. Peu de choses avaient de l'importance dans la vie de cet homme. Et les choses qui avaient de l'importance n'en avaient souvent que peu aux yeux des autres.
Par exemple, lui, ce n''était pas la montée qui lui importait. C'était la descente. D4aillurs, puisque maintenant il était au sommet, elle allait avoir lieu.  
Il enleva les deux sabres de ses côtes. Il s'avança jusqu’au bord de montagne. La pointe de ses pieds était dans le vide.
Combien de mètres le séparaient du sol ? 500 ? 600 ? 900 ? 1300 ? Beaucoup en tout cas.
Il fléchit les genoux, allongea le bras à l'horizontale. Son corps se détendit. Il sauta dans le vide.
Le vent lui fouettait le visage, la pluie l'emmenait vers le bas.
Il volait;
Il s'équilibrait grâce à ses armes, grâce aux extensions de son corps.
Le sol approchait dangereusement. Il pointa ses armes. Elles s'enfoncèrent dans le sol, l'arrêtèrent. Il pivota sur ses propres épaules et se retrouva sur ses pieds. Un peu ébouriffé.
ET quelqu'un face à lui.

Face à lui, quelqu’un. Une gamine. Une adolescente. Angel la fixa de ses yeux sanglants. Contrairement à lui, la pluie avait l’air de l’incommoder. A ses cheveux rouges et ses yeux orange, il en conclut qu’il avait affaire à une fille du feu. Il restait immobile. De toute façon, que faire ?
Elle avait sur le visage un air étonné, ébahi. Il voulait bien lui accorder que voir un homme plonger du haut d’une falaise et faire une galipette avec des sabres était assez peu commun. Mais ne savait-elle pas que fixer ainsi quelqu’un était d’une impolitesse à toute épreuve ?
Le silence s’étira, s’étira. Puis, comme une lanière de caoutchouc, il céda. Mais ce n’était pas du côté d’Angel. Elle fit un sourire qui lui donnait un air très bête.

- Bonjour, dit-elle.

Angel garda son masque de froideur. Pourquoi la saluerait-il ? Il se retourna et alla récupérer ses deux armes, plantées dans le sol tel des piquets. En les enlevant, il se rendit compte qu’kl avait planté son sabre dans un petit animal.
Il haussa les épaules, secoua le fer, fit tomber le truc. Puis se retourna, de nouveau face à elle. Il détestait être longtemps dos aux gens. Il essuya ses armes avant de les replonger dans leurs fourreaux sans quitter la gosse des yeux.

Angel n’était pas enclin à bavarder. Ca ne changeait pas, et ça ne changerait sûrement jamais. Heureusement pour lui d’ailleurs. Car parler pourrait signifier sa mort. Quand on parle, il n’est pas rare que l’on fasse des gaffes. Or, dire de but en blanc que l’on était tueur à gages, marchombre renégat et sbire de l’Ombre, en général, ce n’était pas génial pour les gens en face.
Angel ne bougea pas. La jeune fille face à lui le regardait. Puis elle mit sa main devant sa bouche et lança que le truc dont il venait de se débarrasser puait. Angel faillit hausser les épaules. C’était juste l’odeur de la mort. Lui était rodé. Cette odeur ne provoquait plus rien.
Le regard imposant et supérieur d’Angel avait l’air de gêner la jeune demoiselle qui rougissait à vue d’œil. Elle semblait vouloir faire connaissance sous cette pluie battante et ce vent glacial. Alors, elle lui demanda si le cadavre par terre était un putois. Lui savait bien que c’était un de ces animaux qui se nourrissaient des petits d’autres espèces mais il n’avait pas envie de parler, de faire une longue phrase.

*Ce n’est plus rien d’autre qu’un cadavre qui sera bientôt dévoré par des charognards affamés.*

- Un repas pour charognards.

Son regard sanglant était toujours posé sur elle. La réponse était claire et nette. Il se foutait de ce que cette chose était comme il se foutait de qui étaient les gens qu’il assassinait froidement. Il voyait juste le résultat, et parfois, ce qui allait se passer après.