[Terminé] Les petits bâteaux qui vont sur l'eau ont-ils des ailes... Quoi ? [Libre]

Odéline éclata de rire à la réflexion d’Aëlia.

Mais non haha !

En réalité, elle s'était demandé ce qu’était donc ce sortilège, lorsque sa voix était intervenue.

*Les paroles prononcées sont celles de la chanson phare du dessin animé de 1968, Merlin l'Enchanteur, produit par Walt Disney Productions et réalisé par Wolfgang Reitherman. La chanson s’appelle Higitus Figitus, et s’inscrit dans la ligné de Bibidi Bobidi Boo, formule magique interprétée par la Fée Marraine dans le Cendrillon de Walt Disney.*

Et l’air lui était venu, aussi, elle n’avait pas pu s’empêcher de le fredonner.

Je connais juste la chanson.

Elle n’ajouta rien, malgré l’air très surpris d’Aëlia. Et regarda Kyril, amusée et surprise de regarder quelqu’un faire quoi que ce soit en cuisine sans qu’elle ne participe. C’était une sensation très étrange pour elle. Aussi elle le laissa faire, puisqu’il avait l’air de bien s’en sortir, alors qu’elle-même tentait de ne pas se laisser envahir par tous ces questionnements sur ses origines. C’était quelque chose qu’elle parvenait souvent à tenir à distance. Alors pourquoi pas aujourd’hui ?
En plus, pourquoi serait-elle arrivée d’un autre monde ? Puisqu’elle même ne pouvait pas passer d’un monde à l’autre, en tous cas pas à sa connaissance, quelqu'un l’y aurait-il envoyée ? Qui aurait pu faire ça ? L’arracher à chez elle ? Qu'avait-elle bien pu faire ?
L’arrivée du repas sur la table la coupa dans ses réflexions.

Oh ça sent booon ! C’est quoi ?

Elle sourit à Kyril, alors que près d’elle Aëlia salivait manifestement.

Spoiler:

Kyril tira la langue aux filles lorsqu'elles s'interrogèrent sur la nature du repas qu'il préparait, mais ne répondit pas à leur question, préférant garder la surprise de façon roublarde. Renard un jour, renard toujours après tout.
Pendant que la cuisson se faisait, il prit le temps de mettre le couvert, ou plutôt de bombarder la table avec ce qu'il fallait, les assiettes volant comme des avions de chasse pour venir se poser sur le meuble, freinant juste avant de se briser. Il lui avait fallu beaucoup d'entrainement pour maîtriser ce tour - et beaucoup d'assiettes en avaient fait les frais - mais l'atmosphère familière du Marikshar l'aidait à ne rien casser.
Son esprit avait toujours été un peu plus grand que son corps, sur le navire ; à force de se concentrer sur chaque parcelle de la coque, il avait l'impression que le Marikshar et tout ce qui s'y trouvait était comme une extension naturelle de ses membres, rendant sa télékinésie plus simple à utiliser et à maîtriser.
Ou alors c'était la joie de retrouver le navire après tout ce temps, il n'était plus très sûr...

Finalement, il fit voleter vers la table la lourde marmite qui fumait, répandant un fumet qui sentait bon les repas d'hiver, les diners de famille ou entre amis, la simplicité mise sous le signe de la jovialité. Ça sentait bon, aussi, et Kyril ne tarda pas à dévoiler le mystère sur ce qui provoquait ce parfum appétissant :

- Le plat des familles. Ragoût de pommes de terres avec haricots et les restes de viande des provisions qu'on avait. Les plus courageux peuvent ajouter un peu de fromage fondu, si vous craignez que ça tienne pas assez au corps. Ce n'est pas de la haute cuisine, car ce sont des restes, mais je vous garantis que ça va être bon !
Dommage que je n'avais pas d'oignons, mais bon...
Tendez vos auges !

Kyril surprit l'air songeur d'Odéline pendant un court instant.
Il lui semblait bien que ce petit air là apparaissait sur le visage de la jeune femme lorsqu'il évoquait les mondes parallèles, et le kitsune espérait que ce n'était pas cette perspective qui mettait la Déesse du Savoir mal à l'aise. Il préféra ne pas reprendre le sujet de lui-même.
Servant ses compagnes de voyage avec une grosse louche leur offrant des portions fumantes et délicieusement odorantes de ragouts, Kyril s'assit ensuite à table avec elles, se servant une nouvelle tasse de café avant de passer au ragout.
Oui, car il comptait bien manger au café.

- Bon appétit ! Prenez des forces, surtout toi Aélia, parce qu'après, on va finir la visite par ce qui te concerne directement ; le gouvernail !

Le kitsune sourit à la pirate. La coque du navire grinça autour d'eux, par à coups, comme si le Marikshar riait.
Ce qui était une idée plutôt perturbante, avouons-le.

- Je déconne, ce n'est pas si terrible. Et je serai là pour te guider tout du long. Sans parler de notre Déesse du Savoir ici présente, qui pourra jouer les mousses pour aider aussi, si elle le veut bien.

Spoiler:

Aëlia salivait effectivement, et se jeta sur son assiette avec appétit -et prit même une seconde part ! Elle se régala, à croire qu’elle était affamée, et arrosa le tout d’assez de café pour se donner de l’énergie au moins jusqu’à … pfiouuuuuu … Non, vraiment, Aëlia aimait trop dormir pour louper une nuit à cause du café. En plus, au vu des journées précédentes, et de l’excitation de l’exploration du bateau, elle savait que si elle trouvait un lit ce soir, elle s’effondrerait telle une masse blonde et sentant moyennement bon -ça manquait de douche les expéditions.
Elle guettait aussi les pensées d’Odéline, qu’elle avait sentie un peu mélancolique juste avant le repas, mais ne dit rien car ce sentiment ne sembla pas revenir. Elle même avait un drôle de sentiment sur ce navire, comme si le bâtiment était une extension vivante de l’esprit du kitsune. Elle tenta de chasser de son esprit cette drôle de pensée, et sourit à Kyril, prête à aller continuer la visite.

Bon, alors ? il est où ce gouvernail ? Tu m’as intriguée avec des bêtises là !

Odéline bondit sur ses pieds et battit des mains.

Oh ouiiiiii ! Allons visiter le gouvernaiiiiiiiil ! Et merci Kyril pour ce bon repas, je suis super en forme !!

Elle fit même une petite pirouette sur elle-même, et c’est à cet instant qu’Aëlia, comprenant leur erreur, échangea un regard éloquent et amusé avec Kyril: la future Déesse du Savoir avait bu trop de café et se comportait à présent comme un écureuil dopé au sucre …

Bon … Eh bien … Allons-y ?

Disant ceci, elle posa une main sur la tête d’Odéline, histoire d’éviter trop de sautillements.

Spoiler:

Les filles, semblait-il, se régalèrent, ce qui fit se gonfler de fierté le kitsune, déjà bien grossi par son pelage d'hiver. Lui-même mangea avec appétit, arrosant le tout avec plus de café que de raison, sachant qu'il lui faudrait des forces pour faire voler le Marikshar jusqu'à Elysée, comme convenu. Même si les enchantements contenus dans le navire l'aideraient à mener à bien ce voyage, c'était une sacrée distance.
Mettant de côté ses réflexions, Kyril prit un instant pour s'occuper de la vaisselle sale à mesure que plats et assiettes se vidaient, usant de sa télékinésie comme toute ménagère rêverait pouvoir faire.

Finalement, le moment de sortir de table pour aller voir le gouvernail arriva.
Kyril se laissa tomber de la chaise lui servant de perchoir, s'étira et se tourna vers les filles.
Boing Boing Boing...
Odéline sautillait sur place, allant même jusqu'à faire une pirouette très mignonne. Kyril l'observa d'un oeil rond, ne comprenant pas que la faute en revenait à une surdose de caféine. Il sourit pourtant en réponse à Aélia et sa manœuvre de poser une main sur la tête de la Déesse du Savoir pour la maintenir au sol.

- Allons-y vite avant que la Déesse du Savoir s'envole !

Menant la petite troupe, Kyril les guida jusqu'au pont supérieur, puis jusqu'au gaillard arrière surplombant le reste du navire. Là, en plus du mât d'artimon, se trouvait le gouvernail cité si souvent par le kitsune.
La roue en bois permettant de diriger le Marikshar était semblable en tout point à celle pouvant être vue sur n'importe quel autre navire. En revanche, il y avait de chaque côté des caissons en bois ouvragés qui enfermaient le pilote au milieu d'un "U". Sur chacun de ces caissons, des séries de cristaux pointaient le bout de leur nez à facettes brillants. Des inscriptions cabalistiques et des instruments de mesure reliaient les différentes gemmes entre elles.
Kyril s'approcha, se dressant sur ses pattes arrières pour venir souffler sur les panneaux qui n'avaient pas encore tout à fait dégelés.

- Voilà la bête. Le gouvernail gère la direction, et les cristaux tout le reste. Inclinaison, assiette, vitesse, voilures, ancre, chaloupes et... radar de recul aussi.
Pour ça que je t'avais dit qu'il faut être au minimum deux pour piloter le Marikshar. Moi, je serai en bas et aurai à ma charge de faire voler le navire avec mes pouvoirs. Le reste se commande d'ici, même si je peux reprendre la main en cas de soucis, c'est vite épuisant si je dois tout faire.
Heureusement, il n'y a jamais beaucoup d'obstacles à éviter en plein ciel, alors ce sera sûrement le démarrage qui va être sport, mais une fois en haute altitude et le bon cap trouvé, on pourra tous apprécier le voyage.

Spoiler:

Aëlia laissa échapper un sifflement admiratif entre ses dents. Elle n’avait, bien évidemment, jamais vu d'engin pareil, et était très impressionnée. Le gouvernail était plutôt gros, certes, mais l'attirail de cristaux qui allaient très certainement l’enfermer dans leur U attirait bien plus son attention -honte à elle, pirate en carton !!-, et elle s’en approcha doucement afin de les effleurer du bout des doigts alors que Kyril lui en expliquait l’utilité. Elle hochait la tête doucement, à la fois admirative et songeuse devant tout ceci. c’était, il fallait l’admettre, extrêmement ingénieux, et l’idée de piloter un bateau volant lui plaisait énormément; cependant elle était un peu inquiète, évidemment, par rapport à la partie qu’elle ne maîtrisait pas du tout, c’est à dire les cristaux, leur fonctionnement. Elle supposait, à raison, elle l’espérait, qu’ils ne pouvaient pas tomber en panne, ce qui serait plutôt une bonne nouvelle. Au moins, ils ne se retrouveraient pas coincés -et chutant dans leur cas- comme un bateau sans pétrole, une galère sans rameurs ou un voilier sans vent …
Elle tordit le nez légèrement, puis hocha la tête.

Ouais, je vois l’idée. Ca m’a l’air plutôt sympa, et pas trop compliqué pour moi, tant que ton bouzin tombe pas en panne quoi !

Elle lui fit un clin d’oeil. Puis …

Bon, c’est bien joli, tout ça, mais je dois aller faire pipi, moi !!

Et elle s’éclipsa.

Odéline avait bien évidemment suivi le mouvement et même émis un “ooooh” fasciné lorsqu’ils étaient entrés dans la salle du gouvernail. Elle avait papillonné un peu dans tous les coins durant l’explication de Kyril, doublée d’une voix off dans sa tête qui l'éclairait sur les termes techniques -comme l’assiette- et surtout qui lui apportait plus d’informations sur tout ce qu’elle voyait et qui déclenchait évidemment une explosée d'interrogations chez la curieuse jeune fille. Elle avait dévoré des yeux toutes les inscriptions, tous les instruments de mesure, se gorgeant avec délices de nouvelles connaissances. Ses yeux brillaient, et elle semblait extrêmement heureuse, et ceci l'avait un instant détournée de sa surdose manifeste de caféine, qu’elle-même interprétait comme la joie d’être enfin sur le Marishkar combinée à la fatigue indéniable de ce long voyage -elle était donc complètement à côté de la plaque, ce qui était dommage pour une Future Déesse du Savoir selon l’appellation consacrée.
Puis, soudain, alors qu’Aëlia était partie, elle sortit de sous son haut la fine chaîne au bout de laquelle se trouvait son cristal poli aux belles lueurs bleues, et l’amena devant ses yeux, puis l’examina avec attention ce qui la fit loucher. Ensuite, elle l’écarta un peu, et reporta son attention sur les cristaux qui entouraient le gouvernail. Sa voix restait étrangement silencieuse alors qu’elle s’interrogeait sur la nature de ces gemmes. Enfin …

Dis, Kyril, c’est quoi comme cristaux ? Ils viennent d’où ? Tu les as eus comment ?

Bien évidemment, elle se demandait si tout cela ne pouvait pas avoir un lien avec elle, son histoire, ses origines, son arrivée. Si cela ne pouvait pas la mener quelque part, finalement, quelque part où on l’attendait.

Spoiler:

- Ravi que cela ne t'effraie pas tant que ça Aélia ! Un brin déçu aussi, je dois l'avouer. Je vais devoir mettre la barre un peu plus haut pour te faire peur alors.

Le kitsune s'assit, observant Aélia partir vers les toilettes en ayant l'air de réfléchir. Peut-être qu'il pourrait faire faire un looping au Marikshar pendant qu'elle était dans les cabines...
Il se reprit bien vite devant la dangerosité de l'idée, car elle risquerait de se blesser. Même si cela lui ferait sans nul doute peur à coup sûr.
Reportant son attention sur Odéline, le renard la vit en train d'inspecter un pendentif qu'elle avait sorti de sous son vêtement, comparant le cristal bleu magnifique avec ceux des consoles de commandes du navire.
Sa question le fit sourire :

- C'est quelqu'un qui s'y connait vraiment en cristaux, de là d'où je viens, qui nous les a fournis. Ils proviennent d'une caverne enfoncée très profondément sous la terre. Je n'ai pas pu la voir de mes propres yeux ; apparemment c'est comme être une fourmi enfermée dans une géode, d'après ce qu'on m'a décrit.

Spoiler:

- Ces cristaux sont parfaits pour transférer de l'énergie magique provenant d'enchantements, pour garder des informations pendant longtemps. Ma Dame et mon Béhékine ont travaillé pendant des semaines pour les rendre le plus compatible possible avec les enchantements existants du Marikshar, pour les lier à certaines fonctions des sortilèges de vol. Et pour les rendre réceptifs à mes pouvoirs. Je devais tout faire moi-même avec ma télékinésie avant qu'ils soient installés ; la sustentation, l'assiette, les virages, l'altitude... et c'était fatigant.
Avec ces cristaux, tous ces paramètres peuvent être maintenus une fois en vol, et je n'ai qu'à maintenir le flux d'énergie pour que tout file droit. Il y a même une sécurité qui garantit un retour au sol en douceur au cas où il y ait un problème avec moi ou les enchantements.

Il laissa passer un instant, puis une idée lui vint :

- Tu veux que je regarde ton pendentif de plus près pour voir s'il est fait dans le même genre de cristal ? Je ne suis pas un expert des gemmes, mais je commence à bien sentir les cristaux lorsque je les "attrape" avec mes pouvoirs.

Spoiler:

Odéline regarda intensément le kitsune, écoutant avec attention son explication. Evidemment, cela l’intéressait beaucoup. Elle était toujours curieuse de tout, et elle aimait faire des découvertes par centaines. Cette histoire de cristaux l’intriguait bien évidemment, et lorsqu’il lui parla d'une grotte, et de fourmi et de géode, son imagination s’emballa, et un sourire rêveur se mit à flotter sur ses lèvres tant l’idée lui paraissait à la fois folle et plaisante. Et l’idée que ces cristaux puissent avoir un effet sur la magie, et permettre à Kyril de pratiquer ses pouvoirs, en se fatigant moins, le tout grâce à un travail acharné du Béhékine de l’autre monde et de la dame de Kyril, tout cela l’enchantait. Quant aux sécurités dont son ami lui parla, elle ne put qu’en rire. A vrai dire, elle lui faisait tout à fait confiance, et n’avait pas la sensation d’être en danger, à aucun moment, même si elle se retrouvait dans les airs, se disant que le kitsune maîtrisait tout à fait sa télékinésie.
Puis, il lui proposa d’examiner son cristal et elle eut un temps d’arrêt. Si effectivement il découvrait ce que c’était, d’où il venait … Cela l’éclairerait-il réellement sur son passé, ses origines, tout ce que sa mémoire avait avalé ? Et si … Et si cela changeait tout ? Si cela bouleversait tout ce qu’elle avait ? Sa relation à Siffroy ? Sa relation à ce monde ? Si elle devait rentrer ? Si elle devait partir ? Si elle avait fait quelque chose de mal, quelque chose d’inavouable ? Quelque chose qui devait être puni ? Comment ferait-elle, alors ?
Oui, mais si on l’attendait ? Si on l’aimait ? Si on s’inquiétait ? Si on la cherchait, si on la pleurait ? Si quelqu’un voulait la revoir ? Si elle avait une quête à remplir ? Un coeur à égayer ?
Elle déglutit, et tendit son bijou au kitsune.

O … Oui, je veux bien.

Sa voix était un peu étranglée cependant. Elle avait un peu peur du résultat, comme si par ce simple cristal, Kyril pourrait lire sa vie complète.

Spoiler:

Kyril observa Odéline quelques secondes avant de se saisir du bijou qu'elle lui tendait avec sa télékinésie. L'hésitation de la jeune femme ne lui avait pas échappé.
Le kitsune s'assit et posa les yeux sur le cristal qui flottait devant ses yeux, tournant doucement alors qu'il en inspectait toutes les facettes, toutes les aspérités avec ses sens et son pouvoir.

- Hmmm... c'est intéressant... ce cristal a été travaillé longuement et avec soin. La taille a l'air d'avoir été faite de façon artisanale, mais la précision est quasiment parfaite ; les coupes ont provoqué des éclats internes presque symétriques. Je suis passé à Efferias, et ils travaillent des cristaux à peu près comme ça, mais eux le font de façon mécanique. Ici, c'est l'huile de coude et une sacrée expertise.
Je ne sens pas de magie à l'intérieur. Enfin je ne suis pas un expert pour sentir celle latente dans les objets. En revanche, je peux t'assurer que si tu demandes à quelqu'un de lancer un sortilège sur ce cristal, il pourrait rester à l'intérieur pendant un long moment avant qu'il ne se dissipe vue la qualité de la gemme.

En vérité, il n'avait jamais vu de gemme aussi finement ciselé ; le travail de coupe avait crée une arborescence interne, des fissures infimes qui formaient un réseau complexe et parfaitement ordonné. Presque comme un micro-processeur.
En souriant, il redonna son bijou à Odéline :

- J'espère que ma petit analyse t'a un peu aidée. Et où est passée Aélia ? Elle n'est pas tombée dans le trou j'espère ?

Odéline, anxieuse, écouta avec attention ce que lui disait Kyril,  sans qu’aucun d’eux ne se rende compte qu’Aëlia, en réalité, était déjà là. Mais elle n’était pas revenue sur le pont. Elle avait entendu ce qui se disait alors qu'elle entrouvrait la trappe, et n’avait pas voulu interrompre ce moment, qui, elle l’avait deviné en sondant les sentiments d’Odéline était important pour la jeune fille. Alors qu’elle était toute anxieuse et concentrée sur l’analyse du kitsune, la pirate avait, elle, fouillé un peu plus loin, et compris les raisons de cette angoisse. Elle décida de se taire, de ne plus parler des mondes parallèles. Si c’était une question qui la tourneboulait, cela affectait manifestement Odéline de façon bien plus profonde, et sans aucun doute, dangereuse qu’elle-même.
A vrai dire, la pirate savait que si elle avait été à la place de la petite blonde, elle n’aurait fait ni une ni deux et serait partie à la recherche de son passé, afin de trouver des réponses. Mais elle avait bien compris qu’Odéline et elle-même étaient très différentes, et que la jeune fille avait trouvé son bonheur de manière inopinée en atterrissant chez Siffroy Belgan. D'ailleurs, elle aurait été prête à parier que ces deux-là allaient se marier un jour ! En tous cas, elle comprenait qu'une fois tout ceci en place, elle n’avait pas envie que tout soit bousculé, tout en étant parfois mue par la curiosité.
Elle sentait d'ailleurs cette curiosité, cette soif de savoir en elle, comme un gouffre insondable, impossible à remplir. Elle esquissa un sourire, car elle sentait toute l’importance que l’analyse du cristal revêtait pour elle, tout son espoir et toute sa peur mêlés. Elle perçut aussi sa surprise face à la mention d’Efferias, cette cité nouvelle et encore mystérieuse. Sa surprise aussi d'avoir un lien possible avec eux. Pourquoi alors, serait-elle tombée du ciel, si la cité était sous terre ? Pourquoi n’avait-elle pas poussé comme une fleur ? Elle sentit aussi sa curiosité face à tout ceci, mais aussi son soulagement que Kyril n’ait rien découvert de grave, ni de … trop précis ? Etait-ce vraiment cela ? Oui, c'était vraiment cela. Et soudain, il y eut un flot de questions, à nouveau, qui submergea la pirate, qui coupa le lien, cessa de chercher, pour rester en surface et ne pas se laisser noyer par les émotions d’Odéline à quelques mètre, pour rester elle, et cesser d’être si indiscrète -elle se sentait d’ailleurs un peu honteuse. A cet instant, Kyril parla d’elle, et elle monta tout à fait sur le pont.

Dis donc toi ! Ton bateau est grand, eh, laisse moi donc profiter de mes pauses pipi pour faire du tourisme enfin !

Elle leur fit un clin d’oeil.

Bon, c’est bien joli tout ça mais, maintenant qu’on a mangé, on part quand ?

Spoiler:

Kyril tourna son faciès de renard vers Aélia lorsqu'elle réapparut sur le pont supérieur.

- Mais on pourra partir dès que tu auras appris et retenue à quoi servent les différentes commandes de vol, jeune effrontée ! Odéline ? Tu veux bien écouter aussi la leçon que je vais faire ? Ça pourrait servir si Aélia a un trou de mémoire pendant le voyage. Je serais juste en bas et je pourrai prendre la main si besoin, mais si tout peut se passer le mieux possible, ce serait mieux.

Il passa ensuite de longues minutes à faire la leçon aux filles - Aélia surtout, car c'était sa mission que d'être la navigatrice pour ce vol - en leur montrant à quoi servait chaque cristal autour du gouvernail et comment les manipuler, se perdant parfois dans des anecdotes.
Notamment cette fois où lors de l'installation du cristal gérant l'assiette, des réglages incorrectes trop sensibles avaient amené le Marikshar cul par dessus tête et envoyés tout le monde à la flotte. Mais d'après le kitsune, ça ne risquait plus d'arriver. Normalement...
Généralement, il suffisait de faire pivoter légèrement un cristal dans la direction souhaitée pour que le Marikshar suive le mouvement. Kyril insistait beaucoup sur le "légèrement" ; nul doute que c'était important.

Une fois la leçon terminée et que Aélia ne se trompait plus en désignant tel ou tel cristal, Kyril se dirigea vers l'escalier menant au pont du navire :

- Bon, on va pouvoir y aller. Doucement tout d'abord. Là, il s'agit de décoller et de s'éloigner de la paroi. On prendra ensuite le temps de tranquillement s'aligner sur le bon cap et on pourra mettre la gomme. Je ferai les appels de commandes à faire Aélia, et si tu as un souci ou un trou de mémoire, crie fort et j'interviendrai. Faudra pas que je le fasse trop souvent sinon on devra s'arrêter pour que je reprenne des forces, mais du moment que l'on se parle, tout devrait bien se passer.
Odéline, tu peux rester donner un coup de main à Aélia avec les commandes si tu veux. Ou alors te balader sur le pont et profiter de la vue.

Le kitsune descendit donc l'escalier et aller s'asseoir à un point précis au beau milieu du pont. Là, il prit le temps d'inspirer-expirer à fond. Ses queues commencèrent à danser un lent ballet dans son dos.
Le bois du navire commença à vibrer doucement, comme un gros animal sur le point de se réveiller.

Spoiler:

Puis, il y eut une légère secousse, et le navire commença à s'élever dans les airs, tout doucement, la sensation de mouvement ressentie par les passagers comme celle dans un ascenseur paresseux. Sans tourner la tête ni se départir de son air concentré, Kyril cria, enthousiaste :

- On décolle ! Aélia ! Éloigne-nous tranquillement de la paroi ! Le cristal de mouvement transversal ou simplement le gouvernail, c'est toi qui choisis !
Nom d'un gorille géant ! Vous pouvez pas savoir à quel point faire voler cette coquille de noix m'avait manqué !

Spoiler:

La pirate fit une grimace à Kyril lorsqu’il mentionna le fait qu’il fallait qu’elle sache se servir des commandes de bord avant le décollage. Ca semblait logique mais eh elle était une pirate, et savait donc maîtriser n’importe quel navire, n’importe quel gouvernail, non ? Non. Et elle allait le découvrir trop  rapidement à son goût. Le mécanisme était selon elle d’une complexité jamais égalée dans la simplicité. Elle tordit le nez plusieurs fois, dubitative devant toutes ces explications et anecdotes, tout en ayant des doutes sur sa capacité à diriger ce .... truc. Elle mit d’ailleurs un bon moment à ne plus se tromper dans la désignation des cristaux -Kyril avait beau être un bon professeur, elle n’avait jamais été une bonne élève. D’ailleurs lorsque celui-ci partit et la laissa seule, avec Odéline, face aux cristaux, elle sentit une petite vague de panique fort désagréable la submerger. Elle grommela pour chasser cette angoisse, alors qu’Odéline suivait la suggestion de Kyril et allait s’installer sur le pont. AËlia lui aurait ben conseillé de s’harnacher, mais elle se dit que ce trait d’humour serait très certainement mal venu, alors elle se tut.
La pirate sentit le sol sous ses pieds commencer à vibrer doucement, et soudain avec une légère secousse, le navire commença à s’élever dans les air. Aëlia sentit ses doigts se crisper sur le gouvernail, et se dit qu’il fallait absolument qu’elle se détende, et vite. elle tenta de suivre la consigne du kitsune, faisant tourner le gouvernail et …

BORDEL !!!

Le kitsune avait eu raison d'insister sur le “légèrement” et al pirate avait eu tort de ne pas assez y croire, et de se comporter comme sur l’Envolée. La direction était beaucoup plus sensible, et elle venait de leur faire faire une embardée de tous les diables, allant percuter le flanc de la montagne, et les secouant tous au passage. Pour autant, elle ne se laissa pas démonter, et sourcils froncés, elle reprit son gouvernail.

Tout va bien ! On peut continuer, désolée de la trouille !

Et elle s’y réattela de nouveau, concentrée sur l’horizon, le paysage, les obstacles et son objectif: sortir de là. Sans blesser qui que ce soit, perdre quoi que ce soit ou abîmer le bateau.
Et soudain, face à elle, il n’y eut plus que le ciel. Elle sourit. LE premier gros obstacle était franchi, et elle naviguait dans les nuages.

Yay !! Tout va bien pour vous ?

Elle restait concentrée sur ce qui se déroulait dans les airs: il s’agissait de ne pas heurter d’oiseau, ni de racler la coque avec les sommets.

Spoiler:

Kyril grinça des dents lorsque l'arrière du Marikshar heurta la paroi. Il n'y eut pas de véritable dommage - la coque en avait vu d'autres ! - mais le choc était quand même rude. Il se cramponna de toutes ses griffes pour ne pas bouger de sa position sur le pont ; il y avait une raison pour laquelle il devait rester à ce point précis du navire lors des déplacements, et ce n'était pas le moment de changer de protocole !
Nom d'un gorille géant, il lui avait pourtant dit, à Aélia, d'y aller doucement avec les cristaux de manœuvres ! Elle avait pivoté l'avant trop vite vers la vallée et avait du coup envoyé l'arrière droit sur la paroi !

Bon, elle avait bien rattrapé le coup, et il se dirigeaient maintenant vers le ciel où les obstacles se faisaient bien moins proches, mais tout de même !
Il ferait une inspection de la coque plus tard, pour être certain que tout allait bien à ce niveau...
Le ciel s'ouvrait devant la proue du Marikshar et, comme à son habitude, Bunshin - le sosie en bois de Kyril - semblait vouloir aller plus vite que le navire pour plonger tout entier dans l'immensité bleue. Le vent était cinglant, glacial, tandis qu'ils gagnaient en vitesse, poussés par les voiles qui venaient de se gonfler.
Le kitsune s'enfonça dans un sursaut de concentration un peu plus profondément dans les enchantements du navire, et activa le système de régulation de température pour le pont.
Après quelques secondes, le vent coupant se réduisit à une brise légère autour d'eux, rendant la situation bien plus supportable pour tout le monde, du côté de la température en tout cas. Il restait la vitesse et l'inclinaison du navire qui pouvaient suffire à donner le mal des transports.

Concentré sur ce que pointait l'avant du navire, Kyril cria, sans bouger les yeux :

- On va prendre un peu d'altitude maintenant ! Aélia, les cristaux d'élévation et d'assiette ! Fais-nous monter en maintenant le navire le plus horizontal possible ! Joue avec les deux doucement. Odéline ! Tu veux bien aller l'aider ?
...
Odéline ?

L'absence de réponse de la blonde fit rapidement paniquer Kyril, qui se mit à tourner la tête à gauche et à droite en la cherchant des yeux.

Spoiler:

Un oiseau. Il y avait un bien étrange oiseau dans le ciel minosien. C’était un drôle d’oiseau que cet oiseau-là.
Il n’avait pas une allure d’oiseau, et semblait flotter plus qu’il ne volait . Peut-être était-ce à cause d’une totale absence d’ailes.
Cela faisait à peine quelques secondes que son vol avait débuté. Jusque là l’oiseau était une joyeuse jeune fille sur un bateau volant, enthousiaste comme rarement, galvanisée par l’idée de voler au-dessus des montagnes de son continent, enchantée de la présence de ses amis autour d’elle, et par celle de bientôt retrouver l’homme qu’elle aimait, son hippogriffe, ses kiwis. Puis, tout avait dégénéré.

Le bateau avait fait une grande embardée, elle avait perdu l’équilibre. Sa tête était allée heurter la rambarde au-dessus de laquelle, un instant plus tard, elle basculait dans le vide, inconsciente, sans que ses amis ne l’aient remarquée, préoccupés de remettre le navire volant dans sa trajectoire. Au début, ce n’était qu’une chute libre, rapide, farouche, sauvage, dangereuse. L’oiseau tombait comme une pierre, trouant les nuages, sans bruit, sans cri.
Puis, une lumière bleue s’était levée. Et la chute était devenue un vol paisible, tranquille et apaisé. Soudain, tout s’était calmé,les crêtes avaient cessé de se rapprocher à une vitesse effrayante, le vent avait cessé de l’agresser, et l’oiseau vêtu chaudement s’était mis à doucement flotter vers la terre, tendrement enveloppée d’une lumière bleue. L’oiseau vivait et les rayons semblaient amoureusement caresser cet étrange volatile. Ils captaient l’incroyable blondeur de ses cheveux mi-longs dispersés autour de son visage aux traits fins, purs et jeunes. Elle semblait dormir, tranquille, inconsciente de sa chute. Ses mains fines, l’une ornée d’un bijou, étaient croisées sur sa poitrine qui se soulevait à intervalles réguliers, prouvant qu’elle vivait. De son haut fourré, adapté aux longues randonnées d’hiver, s’était extrait un collier en argent, au bout duquel était fixée une pierre bleue, d’une bleu incroyable et lumineux, une pierre brillante, incrustée d’un motif en or, en forme de poire. C’était de lui qu’émanait la lumière, cette lumière douce qui avait semblé ralentir la chute, qui avait transformé une poupée désarticulée en un bel oiseau flottant doucement vers le sol.

Non, Odéline ne se ferait sans doute pas mal. Sans doute se poserait-elle sur une montagne, dans un endroit sans danger, jusqu’à ce qu’elle se réveille, et ne puisse rentrer chez elle.
Mais Odéline tombait dans les airs, droits vers la montagne. Et c’était cela qui se voyait depuis le bateau.

- On va prendre un peu d'altitude maintenant ! Aélia, les cristaux d'élévation et d'assiette ! Fais-nous monter en maintenant le navire le plus horizontal possible ! Joue avec les deux doucement. Odéline ! Tu veux bien aller l'aider ?
...
Odéline ?

Aëlia avait paniqué exactement au même moment que Kyril, et ses yeux balayèrent le pont en même temps que ceux du kitsune, alors que son esprit s’étendait comme les tenatcules d’une pieuvre, jusqu’au vertige, jusqu’à la nausée pour trouver la jeune fille.

Rien.

Rien.

*Rien.*

PUTAIN ! Odéline !

Et soudain, une immense vague de culpabilité la submergea, alors qu’elle coinçait le gouvernail avec ce qui passait à sa portée afin de maintenir le cap droit entre les montagnes pour pouvoir se précipiter vers la rambarde.
Et là, elle la vit. Elle la vit tomber, furieusement.
Non.
Pas tomber, voler. Voler doucement, flotter, comme accompagnée, nimbée d'une lumière bleutée et entourée des rayons du soleil. La pirate cligna des yeux, n’y croyant pas.

C’est … Impossible … Elle … Vole ?!

Et soudain elle se tourna vers Kyril.

Je rêve hein ? Elle ne peut pas …

*On s’en fout ! Elle tombe, pauvre conne, et c'est ta faute ! Qu’elle vole ou pas, elle va finir dans les montagnes ! Il faut la récupérer, et vite !*

Il faut la repêcher ! Tu peux faire quelque chose ? Ou je plonge l’attraper pendant que tu baisses l’altitude ?

Elle était extrêmement sérieuse. D’ailleurs, elle avait déjà commencé à s'attacher à une corde longue et manifestement solide qui était sur le pont. Elle avait déjà sorti des hommes de la mer. Aller affronter le ciel pour récupérer Odéline tombée par sa faute ne effrayait pas. Pas plus que la culpabilité qu’elle ressentirait si la jeune fille mourrait sur la montagne. Par sa faute.

Spoiler:

Ce qu'il craignait fut confirmé par Aélia : Odéline venait de passer par-dessus bord ! Un frisson glacé remonta le long de sa colonne vertébrale, alors qu'il imaginait la jeune femme faire une chute à cette altitude. Frisson qui se répercuta au Mariskshar lui-même, causant une vibration qui accentua le malaise.
En une seconde, il vit le visage souriant d'Odéline, se remémora sa gentillesse et son rire, et imagina avec horreur découvrir un corps brisé contre les rochers dans la vallée...
La piratesse se précipita vers le rebord, et cria quelque chose qui lui fit l'effet d'un électrochoc :

- Elle... quoi ?

L'idée était folle et pourtant, rien n'indiquait qu'Aélia mentait, surtout en cet instant d'urgence !
Aélia semblait aussi surprise que lui, et il lui fallut un peu plus de temps qu'elle pour digérer l'information. Il se reprit lorsqu'elle acheva d'attacher une longueur de corde autour de sa taille. Elle avait raison, pas le temps de se poser de questions, il fallait agir, pour tenter de la récupérer avant que ce miracle décide d'aller voir ailleurs !
Il cria à la piratesse, sa voix déformée par l'urgence :

- Non, vas-y, plonge pour la récupérer ! Si je bouge, le Marikshar risquerait de tomber, et je ne peux pas manœuvrer pour la récupérer sans la voir ! Guide-moi avec ta télépathie, je vais t'ouvrir mon esprit !

Peu importait ses secrets, sa mission et sa promesse de ne pas trop en révéler sur qui il était et ce qu'il faisait dans ce monde : si cela permettait à Odéline d'être secourue, Aélia pouvait bien avoir un aperçu de ce qu'il avait dans le crâne !
Repoussant sa peur pour Odéline, le kitsune inspira à fond et laissa tomber ses barrières mentales. Il se sentit aussitôt bien plus apte à se concentrer et plongea plus profondément dans les enchantements du navire, amenant à lui les commandes de manœuvres comme autant de fils tendus par un marionnettiste. C'était plus facile que prévu, mais Kyril savait que cela devait être l'adrénaline et qu'il le paierait au centuple plus tard.
Ou alors ses barrières mentales lui coûtaient plus chères qu'il croyait...

"Sois mes yeux Aélia, et je t'aiderai à atteindre notre Déesse du Savoir. Fais attention. Et ramène-la, s'il te plait."

Il pensait fort et, si Aélia ne l'entendait pas, son regard était suffisamment expressif pour faire passer le message.

Spoiler:

Elle expira profondément. Alors, elle devait plonger. Kyril lui demandait d’être ses yeux, afin de récupérer Odéline, et elle le serait, bien évidemment.
Elle finit son noeud, et entra dans l’esprit du kitsune, combattant les larmes qui naissaient dans ses yeux aux paroles de Kyril, et tentant surtout de résister à la vague d’émotions de Kyril lui-même, accompagnée de souvenirs, qui la submergeaient.
Elle alla se mettre debout, à présent qu’elle était bien attachée, sur la rambarde.

*Décale-nous vers la gauche, et descends-nous doucement. Elle est juste là. Je vais tenter de garder les yeux ouverts. Tu verras ce que je verrai.*

De nouveaux, elle expulsa tout son air. Et elle s’élança dans le vide. Il y eut soudain en elle un cocktail de sensations indescriptibles.

Un chignon blond, et un air doux, accompagné d'une odeur de nourriture. Le ciel et la mer qui se mêlent, le vent, les embruns, le sel, et un sentiment de joie sereine.

Il y avait l'adrénaline,évidemment, qui portait tout, rendait tout plus fort et plus urgent, et dopait son cerveau.

Des chaussures dans une foule bigarrée.

Il y avait l’estomac qui remontait et chatouillait, le ventre qui ne savait pas où il en était, le sang qui pulsait aux oreilles et le vent qui assourdissait.

Un bureau aux murs blancs. Un stylo sur une table basse, qui vibre sous l’effort.

Il y avait le ciel et la terre inversés, la violence de la chute, et soudain, une forme d’équilibrage, d’aisance.

Des origamis, une voix flûtée et d’immenses yeux bleus, qui semblent se superposer à …

Il y avait le contact de la corde à sa taille, qui l’entaillait, la retenait au monde, qui était le cordon ombilical.

Le bois de la coque contre le bois des troncs, les feuilles qui bruissent contre les parois.

Il y avait le sol qui se rapprochait mais restait lointain, si lointain, bien plus lointain que la mer lorsqu’elle avait fait ce genre d’opérations.

Des mains blanches qui tendent une assiette contenant un gâteau.

Il y avait les couleurs qui se mêlaient et qui étaient à la fois extraordinairement claires, vives et précises.

Un homme brun et un travail acharné.

Il y avait la peur surtout, et la détermination. Et enfin, il y avait …

Le bruit hypnotisant d’un manège, des rires, et une voix fluette.

Odéline juste devant elle. Le soulagement dans sa poitrine. Elle aurait voulu pouvoir tomber plus vite encore vers elle, l’attraper, al serrer contre elle, la ramener. De seconde en seconde elle s’approchait et …

Des yeux qui semblent immenses et candides qui demandent de la tendresse.

Elle était là, elle lui attrapa la taille afin de ne pas lui faire mal, ni risquer de lui démettre une épaule, et soudain l’air autour d’elle sembla s’adoucir, et lui faire un coussin, la soutenir en douceur, l’accompagner avec tendresse.
Elle voulait, elle aussi. Elle était incapable de l'expliquer, mais comme Odéline, elle volait, et la pesanteur ne semblait n’avoir qu’un effet très limité sur elles. Elle sentait l’air lui caresser les joues, et médusée, elle regarda autour d’elle. Le sol approchait tout doucement, et le bateau s’éloignait lentement. Odéline, elle, continuait à dormir paisiblement.

*Si on est vivantes, je t’en prie, remonte-nous.*

Même en pensées, elle pouvait entendre sa voix trembler, légèrement effrayée, assez anxieuse. Elle voulait retrouver un sol sous ses pieds, ou la mer autour d’elle, mais plus flotter de manière inexplicable dans les airs, sans aucun support.

*Il y a la montagne à … Trente mètres sous nous et il faut que tu remontes absolument vers la droite, doucement, car sinon, tu vas heurter les parois.*

Elle se forçait à garder les yeux ouverts. Se balancer au bout d’une corde, lestée par le poids d’Odéline, et en même temps défiant la pesanteur, entre deux montagnes, était extrêmement impressionnant. Bien plus que ses fonds marins, trouvait-elle.

*Attention, la montagne se rapproche à droite. Tout droit. C’est bon. A droite.*

Elle serrait les fesses: il fallait à la fois que Kyril les remontes sur le pont et qu’il dirige le navire afin qu’il ne s’emplafonnent pas dans une paroi.

Spoiler:

Aélia établit la connexion entre leurs esprits et Kyril eut l'impression qu son esprit se transformait en géode aux multiples facettes avec tout ce qu'il devait faire en même temps. Contrôler le navire était devenu une seconde nature, mais le faire dans un tel état de stress et embrouillé par l'adrénaline était dangereux. Surtout que dans l'urgence, le contact mental établi par Aélia manquait de subtilité, et que des flashs de sensations passaient à travers, des souvenirs et des émotions qui ne lui appartenaient pas et qui menaçaient sa propre concentration.

Kyril ferma les yeux, se concentrant sur le Marikshar, sa position dans le ciel et les flashs de la vision d'Aélia pour guider cette dernière vers Odéline. Il ne comprenait pas, cela faisait longtemps qu'elle tombait, non ?

Odéline dans une robe bleue aux côtés d'un hyppogriffe massif, entourée d'oiseaux, qui se retourne pour lui faire face avant de sourire.

Le navire suivait ses pensées, sa télékinésie presque plus nécessaire pour faire fonctionne les enchantements tant il était entré en profondeur dans la magie du Marikshar.

Une chute le long d'une coque, l'émerveillement qui laisse place à la peur et à la douleur en heurtant l'eau, puis des bras protecteurs qui viennent l'aider à retrouver le chemin de la surface.

Suivant les indications pensées et visuelles de la piratesse, il manœuvra pour les rapprocher le plus possible...

Une vieille maison, des cris, une odeur nauséabonde.

Aélia avait réussi ! Le soulagement qu'il ressentit manqua lui faire perdre sa concentration, et il doit mettre les bouchées doubles pour rattraper les fils de manoeuvres du navire.

Le souvenir d'une fête, sur un navire, avec des hommes, et un grand blond qui lui ressemble.

Le kitsune redressa le Marikshar et laissa la corde retenant les deux filles se tendre doucement, la saisissant avec ses pouvoirs avant de les remonter. Etrangement, elles semblent trop légères... ou alors c'est lui qui ne sent plus leur poids avec ses pouvoirs.

Le salon des Belgan, un blessé inconscient sur le canapé qu'il ne reconnait pas à cause des larmes lui embrouillant la vue. Odéline qui amène du thé.

Aux indications mentales d'Aélia, il rouvrit les yeux pour découvrir qu’effectivement, il y avait une montagne face au navire ! Il entama une grande courbe vers tribord pour l'éviter, tout en continuant à remonter les filles qui se balancèrent un brin dans le mouvement.
L'obstacle hors de leur trajectoire, Kyril fit ralentir le Marikshar jusqu'à l'immobiliser dans les airs.

"C'est bon, je finis de vous remonter !"

Une fois Aélia et Odéline suffisamment proches de la coque, le kitsune les attrapa directement avec son pouvoir - ne pouvant imaginer autre chose que les saisir délicatement avec une immense pince de crabe - et leur fit parcourir les derniers mètres en un instant avant de les déposer sur le pont.
Là, il rouvrit les yeux. Qui étaient entièrement rouges, sans iris ni pupilles.
Sans bouger de sa position, il cria à Aélia :

- Comment va-t-elle ?

Il voyait bien qu'Odéline semblait inconsciente, mais ne pouvait courir à son chevet sans risquer de voir le Marikshar tomber comme une pierre. Le générateur n'était pas encore assez chargé pour permettre la sustentation sans lui comme opérateur.

Spoiler:

La montagne s’était éloignée, et Aëlia avait pu recommencer à respirer. Et soudain, il y eut sous son dos le pont du navire et elle se laissa aller dans un gros soupir de soulagement. Elle sentait ses muscles commencer à trembler de soulagement d’avoir récupéré Odéline, et d’être revenue en vie sur ce bateau volant. Sa bouche était étrangement sèche, et elle sentait sa tête tourner, pourtant elle se redressa, regarda Kyril qui venait de lui demander comment allait Odéline. De nouveau, ces yeux rouges, globes sans iris ni pupille, qui créèrent un violent frisson le long de son échine. Elle décida de s’en préoccuper plus tard; il avait raison: la seule urgence, c’était Odéline.
Lorsqu’elle l’avait attrapée, elle lui avait juste semblée endormie; il n’y avait pas de sang, et elle l’avait sentie respirer. Pourtant, elle alla lui prendre le pouls, mettant deux doigts au niveau de sa carotide, et une autre main dans la face interne de son poignet. Celui-ci battait, lent et régulier, alors que la poitrine d’Odéline se soulevait doucement. Elle n'avait pas l’air de souffrir.
D’ailleurs, à peu près au même instant, odéline se mit à battre des paupières, se réveillant comme après une paisible sieste. Elle regarda Aëlia un instant puis … :

Mais pourquoi tu as l’air si inquiète ?

Et la pirate éclata de rire.

Odéline ne comprit pas. Pourquoi donc Aëlia lui riait-elle au nez ainsi lorsqu’elle lui demandait les raisons de l’air soucieux qui lui occupait le visage alors qu’elle était penchée au dessus d’elle ? Puis, elle regarda autour d’elle. Mais que diable faisait-elle allongée au milieu du pont ? Et pourquoi donc Aëlia avait elle une corde autour de la taille, alors que Kyril avait les yeux entièrement rouges ? Elle cligna des yeux, se redressant. Puis assise, elle regarda Aëlia.

Tu ne te souviens de rien ?

Il y eut un silence. Cette phrase faisait résonner en elle des souvenirs, justement, douloureux, de son arrivée, où elle s’était sentie complètement perdue. Et soudain elle eut mal à la tête, se frotta le crâne en grimaçant. Elle avait une petite bosse.

Je … me suis cognée ?

En le disant ceci lui paraissait logique. Elle se concentra très fort en tentant d’ignorer la douleur dans son crâne. Oui, elle se souvenait du bateau qui vibrait, puis décollait, et soudain, faisait un grand mouvement. Elle se souvenait de sa vision qui se troublait, d’une douleur, puis il n’y avait plus rien jusqu’à son réveil sur le pont. Aëlia rit de nouveau, amis Odéline sentait bien que c’était un rire nerveux.

Si seulement ! Si seulement tu t’étais juste cognée ! Tu es passée par dessus-bord Odéline, et nous t’avons repêchée, alors que tu flottais dans le ciel.

La jeune fille écarquilla les yeux. C’était ça la corde ? Les yeux rouges ? L’air paniqué ?

N’importe qui d’autre se serait écrasé. Tu peux me dire comment t’as fait pour voler ? T’as supprimé mon propre poids, quand je t’ai touchée, je suis sûre que Kyril aussi l’a senti, hein, Kyril ?

Odéline regarda Kyril, perdue, puis, sans attendre, répondit:

Je … Ne sais pas. C’est déjà arrivé, une fois avant, je crois, quand je suis arrivée mais je ne sais pas. Je … dors toujours à ces moments là, je ne sais pas comment je fais, ni ce qui fait ça, je ne le contrôle pas je … Je crois que c’est mon cristal, mais … J’ai mal à la tête … Siffroy me manque …

Et soudain, elle se mit à pleurer à chaudes larmes. Elle ne vit donc pas le regard complètement paniqué qu’Aëlia lança à cet instant à Kyril, manifestement complètement démunie face à ces larmes soudaines alors qu’elle-même était encore toute baignée d’adrénaline, ne se rendant pas compte de son propre manque de tact.

Spoiler:

Kyril écouta l'échange entre les deux filles, attentif, inquiet pour Odéline. Il hocha distraitement la tête lorsqu'Aélia le cita en évoquant leur état de chute libre anormalement légère. Il avait effectivement senti qu'elles étaient diablement légères, en les saisissant dans sa pince de crabe géante, même s'il avait cru que la sensation était dûe à l'adrénaline et l'urgence du moment.
En entendant Odéline évoquer l'hypothèse de son cristal, il réfléchit à toute vitesse : étais-ce possible ? Y avait-il réellement un enchantement dans la gemme qui ornait le collier de son amie ? Il n'avait pas senti de magie lorsqu'il l'avait examiné mais, après tout, il était loin d'un expert dans ce domaine. Et il avait bel et bien détecté toutes ces nervures parfaitement taillées...
Odéline éclata en sanglots.
Kyril se figea une seconde, puis activa les enchantements du Marikshar une dernière fois, espérant que cela tiendrait le coup.
Dans un fracas de chaine se déroulant à grande vitesse, l'ancre descendit de la coque en chute libre, terminant de stabiliser le navire volant dans les airs. L'air vibra légèrement lorsque le générateur prit le relais de la sustentation, et le kitsune se remit debout sur ses pattes avant d'avancer vers Odéline.
Ses yeux rouges étaient inquiétants, mais il les ferma au moment où il arriva assez près d'Odéline. Il posa son front tout contre son épaule, sa truffe venant effleurer son coude, geste qui était la contrition personnifiée.

- Pardon Odéline. J'aurais dû être plus prudent.

Le kitsune ne bougea pas, gardant yeux fermés et oreilles basses en attendant que les sanglots d'Odéline refluent, murmurant parfois des "It's over now. You're safe." pour tenter de la rassurer.
Finalement, il releva la tête pour sourire à Odéline, rouvrant ses yeux qui étaient redevenus normaux.

- On repartira lorsque tu te seras reposée. Viens, il y a une lotion en bas pour soigner ta bosse. C'est la "potion qui pue mais qui fait du bien."

Spoiler:

De grosses larmes jaillissaient des yeux clairs d’Odéline. Lorsque Kyril vint poser son front contre son épaule, sa truffe contre son coude, ses sanglots redoublèrent un instant, alors qu’elle caressait par moments sa fourrure. Pourtant les paroles apaisantes de son ami firent leur effet, et peu à peu son angoisse reflua, et ses pleurs se tarirent. Lorsqu’il la regarda et lui parla de nouveau, ses yeux brillaient encore et non visage était mouillé, mais peu de larmes sortaient encore. Elle hocha la tête à ce qu’il lui disait, et se leva pour le suivre plus bas. Le nom de la potion l’avait même faite sourire, c’est dire !

Dis, Kyril, qu’est-ce qu’il y a dans ta potion ?

Sa voix était un peu cassée par la fatigue.

Et tu crois que je pourrais dormir un peu, après ? Vous pouvez repartir tant que je dors, hein, ne t’en fais pas. Je me sens juste un peu fatiguée.

Comme pour prouver ses dires, elle bailla.

Spoiler:

Le kitsune avait vraiment eu peur pour son amie. Il s'était promis de veiller sur elles lors de cette Expédition, alors l'accident qu'ils venaient de vivre l'avait sérieusement secoué dans ses poils. Grâce au miracle qu'avait permis le mystérieux pendentif d'Odéline et la réactivité d'Aélia, ils avaient pu éviter le drame, mais ce n'était jamais bon de trop compter sur la chance. Et cet accident ne se serait jamais produit s'il avait été plus vigilant au moment du décollage.
Il aurait dû se charger du décollage et laisser Aélia aux commandes dans un moment moins délicat pour son baptême de l'air...
Enfin... ils avaient évité le pire.

Son moral remonta lorsqu'il vit Odéline reprendre du poil e la bête, parvenant à sourire malgré ses yeux humides et il ne put que hocher la tête pour accepter ses demandes :

- C'est un anti-septique et un anti-inflammatoire combinés dans un flacon. Ce n'est pas très fort, mais l'odeur piquante est très forte, elle. Et bien sûr que tu peux aller te reposer. Dans quelle cabine tu veux aller ?

Il fit signe à Aélia et laissa Odéline se relever lorsqu'elle se sentit prête.
Restant très près d'elle - limite dans ses jambes - il guida-suivit Odéline jusqu'au pont inférieur et son couloir où s'alignaient les portes des cabines. Il la laissa choisir celle qu'elle voulait, veilla à ce qu'elle soit installée le plus confortablement possible, disparut un instant pour filer dans une réserve et revint avec un flacon de verre noir dans la gueule : la fameuse "potion qui pue mais qui fait du bien."
Dévissant la fiole avec précaution en usant de ses pouvoirs, la cabine s'emplit aussitôt d'une odeur piquante et froide, semblable à l'éther, même s'il semblait évident qu'à la fabrication il y avait eu des tentatives de cacher ça avec des parfums de fleurs. Le résultat n'était pas particulièrement nauséabond, mais l'intensité garantissait de garder éveillé.

- L'odeur se dissipe vite, heureusement. Voyons voir cette vilaine bosse...

Se servant du pinceau accroché au couvercle, Kyril badigeonna doucement la blessure d'Odéline avec le liquide légèrement marron contenu dans le flacon.
Rangeant le tout, il sourit à Odéline :

- Voilà, c'est fait. Repose-toi Odéline. La première fois que l'on dort sur le Marikshar en vol est toujours un peu spéciale. Fais de beaux rêves.

Le kitsune sortit de la cabine, et alla retrouver la piratesse. Une fois seul avec elle, il demanda :

- Que fait-on ? On se repose aussi et on attend Odéline ? Ou on continue pendant qu'elle dort ? Je pense pouvoir tenir encore un peu si on a pas d'autres urgences. Au pire, je peux essayer de nouveau le Grosbillator 3000, s'il en reste encore tout au fond de la fiole...

Spoiler:

Odéline suivit Kyril à peu près autant qu’elle le guidait aussi. Ils avançaient au même rythme, et manquaient de se marcher dessus. Elle se sentait encore sonnée, mais sentait aux réactions de son ami que lui avait été sérieusement secoué par l’incident. Elle s’efforça de lui sourire avec un air un peu rassurant alors qu’elle s'installait dans une des cabines. Le temps qu’il revienne, elle s’était allongée, la tête reposant dans un des oreillers, les yeux se fermant déjà en partie. Lorsqu’il revint cependant, l’odeur la réveilla. C'était très particulier, et correspondait bien à l’odeur qu’en avait fait Kyril. Alors qu’elle respirait, elle eut l’impression que cela lui brûlait les muqueuses nasales, et elle éternua soudain. Lorsqu’il lui badigeonna sa bosse, elle eut une légère grimace, due à l’odeur et à la sensation de froid autant qu’au fait que quelque chose touchait une bosse toute récente. Lorsqu’il rangea le tout et lui sourit, elle lui rendit son sourire, les yeux encore un peu brillants. Elle se renfonça dans son oreillers, et laissa à l’odeur le temps de se dissiper, alors que peu à peu son corps s’engourdissait. Sans même en avoir conscience, bercée par le mouvement du bateau, elle s’endormit en ayant la sensation de s’envoler.

Lorsqu’elle s’éveilla, elle crut, désorientée, être dans de l’or. Une lumière dorée l’entourait, l’enveloppait. Le temps avait filé, manifestement. Elle dut cligner des yeux plusieurs fois, et regarder autour d’elle un petit moment avant de se rappeler ce qu’elle faisait là, et surtout, pourquoi elle y était, et la raison de ce léger tiraillement au niveau de la tête. Lorsque cela lui revint, elle sourit, rassurée, au fond, de savoir ses amis pas loin, sans doute juste au-dessus d’elle à en croire le bruit des planches.
Sa gorge était sèche, et, très vite, un tiraillement dans son estomac se fit sentir. Elle se leva, mit un instant à retrouver son équilibre, et, après un détour aux toilettes, elle remonta sur le pont, toujours un peu ensuquée de sa longue sieste.
C’est alors qu’elle découvrit ce qui devait sans doute être un des plus merveilleux spectacles auxquels elle aurait pu rêver. Sous ses yeux ébahis Elysée arrivait en vue. Jamais elle n'aurait cru voir ainsi sa ville. On distinguait le toit des maisons, évidemment, qui paraissaient comme des miniatures. ils étaient encore bien trop loin pour voir les gens, mais déjà, elle pouvait deviner où se trouvait la place du marché, d’où partaient les boulevards. A sa droite, il y avait quelque chose de magnifique, étincelant. Il y avait le palais Royal, avec ses dômes scintillants, niché tel un joyau au coeur des montagnes. Au loin, elle apercevait le scintillement de la mer. Le tout était baigné par la lumière du soleil couchant, qui transformait tout en pépites d’or. Dans le ciel, il y avait des nuances de feu, assorties à des mauves sublimes; Un instant, elle en eut le souffle coupé, incapable de respirer face à tant de splendeur, et elle sentit les larmes lui monter aux yeux.

Ah non, hein, tu vas pas te remettre à pleurer ! Je sais que c’est beau, mais tout de même !
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La réplique de la pirate la sortit de sa contemplation dans un sursaut, et elle rit.

Aëlia avait détaché la corde autour de sa taille, contente que Kyril ait pris le relai auprès d’Odéline. ELle avait toujours été très mauvaise dans ce type de situation, étant complètement incapable de consoler et de rassurer les gens. Ceci ajouté à un certain manque de tact, lui même amplifié par l’adrénaline, pouvait donner des résultat catastrophiques, assez proches finalement de la soudaine crise de larmes d’Odéline harcelée de questions par la pirate.
Elle fit le tour du pont, afin de vérifier que rien n’était réellement abimé, ou en tous cas trop abimé pour qu’ils puissent voler. CEla lui permettait de s’occuper l’esprit, et d’ignorer les tremblements de ses mains. ELle détestait trembler. Cela ne lui arrivait pas souvent, et c'était tant mieux. Lorsqu’elle eut terminé, elle remit en place ce qui en avait besoin, et enroula de nouveau la corde sur elle-même. C’est environ à cet instant que revint Kyril, alors qu’elle tentait d’effacer le sentiment de culpabilité qui l’oppressait.Après tout, c’était sa faute si Odélien, al plus fragile d’entre eux avait basculé. C’était aussi sa faute si, agressée au réveil, elle avait fondu en larmes. La pirate serra les dents. Il y avait finalement eu bien plus de peur que de mal -et heureusement-, il fallait donc qu’elle cesse de se tourmenter avec ça. c’était de toute façon aussi inutile que contre-productif. Elle écouta les propositions que lui fit Kyril, jusqu’au moment où …

Le Grosbillator ? Non, ça suffit.

*J’ai eu suffisamment peur comme ça pour la journée.*

Elle n'aimait pas le kitsune version orbites sanglantes et bave aspirée. Il la faisait toujours frissonner.

Si tu peux tenir encore un peu sans trop te fatiguer, on peut continuer; Tu vas pouvoir m’expliquer un peu mieux le fonctionnement de tout ça, et ça nous permettra sans doute d’éviter un autre accident du genre. Un seul basculement par dessus bord, c’est très largement suffisant.

Elle lui fit un clin d’oeil, et retourna à son poste. C’est ainsi que, suivant les instructions du kitsune, elle apprit à manoeuvrer un navire volant, maintenu en l’air par des enchantement qu’elle était bien incapable de comprendre. Elle ne se laissait cependant pas perturber, et prenant un certain plaisir à diriger ce type de bâtiment.
La journée se déroula tranquillement, et assez rapidement par rapport au temps passé à marcher à grimper, ils furent en vue d’Elysée.  La pirate ne se laissa pas perturber par la vue: elle avait la sensation, d’avoir déjà vu aussi beau. Elle se savait plus sensible aux vues que lui procurait la mer, à la splendeur de l’horizon qui s’embrasait, à l’espace dégagé devant elle, qu’au constructions humaines.
Ce ne fut pas le cas d’Odéline tout juste réveillée, dont Aëlia se moqua gentiment. Puis, elle se tourna vers Kyril.

Atterissage prévu dans combien de temps, mon capitaine ?

Elle lui fit un clin d’oeil.

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