- Kaoren [Esquisse]Invité
BàT IF XVIII - Épreuve 5 par Kaoren
Sam 16 Déc 2023 - 9:57
- Introduction:
- Pas besoin de faire une longue introduction de l'Esquisse pour ce texte, dites-vous simplement que c'est un univers étrange au ciel rose où les lois de la physique tendent à faire un peu ce qu'elles veulent, et dans lequel des humains de la Terre comme vous et moi sont projetés sans raison un beau matin de 2012.
Mon personnage, Heather Aurélie Penrose (Aurie pour les plus intimes), c'était une doctorante en cristallographie sur Terre qui a été balancée dans l'Esquisse pendant sa thèse. Mais arrivée dans ce nouveau monde avec une toute nouvelle physique, elle a sauté sur l'occasion de "changer de sujet de thèse", dirons-nous ; elle a rejoint la communauté des Cyantifiques, des personnages curieux qui étudient l'Esquisse sous toutes ses facettes, et a commencé à établir une théorie pour expliquer ses incohérences. Sa théorie marche pas diablement bien en pratique, mais elle s'y accroche en se disant toujours qu'elle arrivera à la corriger. Autre signe particulier, elle est férue de délires mathématiques en tout genre, du style une obsession viscérale pour les nombres premiers ou le nombre d'or (au point qu'elle compte en base 5, typiquement).
Dernière chose pour ceux que ça intéresse, ce texte fait suite à deux autres textes d'interforum : celui-ci, que j'ai pondu dans cette édition sur l'épreuve 3, où je jouais une version jeune d'elle (nommée Allison parce que c'est son nom d'avant qu'elle devienne Cyantifique), et celui-là, que j'ai écrit à l'édition de Damned Town. Normalement, y'a pas besoin d'avoir lu l'un ou l'autre, mais si vous avez du temps à perdre, vous pouvez aller regarder ça au préalable.
Sur ce, bonne lecture à tous ! o/
TW : Maths
AH = dr(H) = (ε3.3r2/2E).(1/n++1/n-)
AN = (ε3.3(ρ-r)2/2E).(1/n++1/n-)
H ≤ ∫AH.dr + ∫∫AN.dr.dρ
H ≤ (1/E).∫∫[(ε3.3r2/2).(1/n++1/n-).dr + (ε3.3(ρ-r)2/2).(1/n++1/n-).dr.dρ]
AN = (ε3.3(ρ-r)2/2E).(1/n++1/n-)
H ≤ ∫AH.dr + ∫∫AN.dr.dρ
H ≤ (1/E).∫∫[(ε3.3r2/2).(1/n++1/n-).dr + (ε3.3(ρ-r)2/2).(1/n++1/n-).dr.dρ]
« Tu vas rien gagner à réunir les deux termes sous la même intégrale, surtout que tu connais déjà le résultat du premier.
– Pas faux. »
H ≤ (1/E).∫(ε3.3r2/2).(1/n++1/n-).dr + (1/E).∫(ε3.3(ρ-r)2/2).(1/n++1/n-).dr.dρ
HE ≤ ∫3ε3r2/2(1+ε3r3).dr - ∫3ε3r2/2(1-ε3r3)).dr + ∫∫3ε3(ρ-r)2/2(1+ε3(ρ-r)3).dr.dρ - ∫∫3ε3(ρ-r)2/2(1-ε3(ρ-r)3)).dr.dρ
HE ≤ (ln(√(1+ε3R3)) - ln(√(1-ε3R3))) + ∫ε3(ln(1+ε3(ρ-r)3)/2).dr - ∫ε3(ln(1-ε3(ρ-r)3)/2).dr + cte
HE ≤ ∫3ε3r2/2(1+ε3r3).dr - ∫3ε3r2/2(1-ε3r3)).dr + ∫∫3ε3(ρ-r)2/2(1+ε3(ρ-r)3).dr.dρ - ∫∫3ε3(ρ-r)2/2(1-ε3(ρ-r)3)).dr.dρ
HE ≤ (ln(√(1+ε3R3)) - ln(√(1-ε3R3))) + ∫ε3(ln(1+ε3(ρ-r)3)/2).dr - ∫ε3(ln(1-ε3(ρ-r)3)/2).dr + cte
« T’as pas besoin d’ajouter une constante, ça s’annule en soustrayant les bornes de l’intégrale.
– Oui, je suis conne… »
HE ≤ (ln(√(1+ε3R3)) - ln(√(1-ε3R3))) + ∫ε3(ln(1+ε3(ρ-r)3)/2).dr - ∫ε3(ln(1-ε3(ρ-r)3)/2).dr
« Ça va être moche.
– Il y a des chances, oui. »
HE ≤ ath(εR)3 + rε3ln(1+(ρ-r)3)/2 - rε3ln(1-(ρ-r)3)/2 + 3.∫(ρ-r)2r/(1+(ρ-r)3).dr - 3.∫(ρ-r)2r/(1-(ρ-r)3).dr
HE ≤ …
HE ≤ …
…
HE ≤ ath(εR)3 + [3r.(ln(ε3.(ρ-r)3+1) - ln(ε3.(ρ-r)3-1)) - 3ρ.((ln(((ε3.(ρ-r)3+1)/2)) - ln(((ε3.(ρ-r)3-1)/2)))) + 3/(2.ε)*[ln(((ρ-r)(ε3.(ρ-r)+ε2)+ε)) + ln(((ρ-r)(ε3.(ρ-r)-ε2)+ε)) - 2(ln((ε3.(ρ-r)+ε2)) + ln((ε3.(ρ-r)-ε2))) + (2√3(atan(2.ε(ρ-r)+1)/√3) - atan((2.ε(ρ-r)-1)√3))]]±
HE ≤ …
HE ≤ …
« J’ai pas l’impression que tu puisses simplifier beaucoup plus.
– Ouais. »
Je pose le stylo.
« Ça a quand même moins de gueule que « HE ≤ ath(εR)3 ».
– Ça, t’y peux pas grand-chose.
– Je sais. »
Un soupir lâché, je pousse la feuille sur le côté du bureau ; puis je me lève de ma chaise pour faire quelques pas vers la fenêtre. Même le dos tourné, je devine que Moser me regarde avec des yeux compatissants ; elle et moi, on a pris l’habitude de cette routine. Comme à chaque fois, elle va me demander si j’ai besoin de quelque chose, et je vais lui répondre de me laisser seule.
« Si tu mets des bornes à l’infini, ça converge ?
– À mon avis, ça s’annule entièrement.
– Oui, donc ça résout pas le problème. »
Ça le résout pas, non. Et de toute façon, si je décrète que l’Esquisse est infinie, ça remet en question quasiment tout le modèle. En plus de rendre mes résultats invérifiables. Derrière moi, j’entends encore Moser gratter quelque chose sur le papier ; mais au rythme saccadé de son écriture, j’ai pas l’impression qu’elle arrive à grand-chose. Je finis par entendre son crayon se poser, puis sa chaise racler le sol.
« Tu veux en rester là pour aujourd’hui ?
– Ouais. »
Quelques pas résonnent dans la salle.
« Besoin de rien de plus ?
– Juste d’être seule, comme d’hab’. »
Les pas se rapprochent, un bras se pose autour de mes épaules. Je tourne la tête, et me retrouve nez à nez avec ce fameux regard compatissant.
« Tu prends soin de toi, ok ?
– Promis. »
Je suis pas du genre menteuse, mais je sais qu’il lui faut ça. Elle, en revanche, son visage est sincère ; avec un air tirant entre la sévérité et l’attendrissement, elle me donne une tape dans le dos, me lâche un « À tout à l’heure » quasiment machinal, et se dirige silencieusement vers la sortie. C’est à peine si j’entends la porte se fermer à son départ.
Je dois vraiment être une collègue insupportable.
Derrière la fenêtre, mes yeux déambulent dans le paysage, que je n’observais pas vraiment jusqu’ici. Il n’y a pas grand-chose qui attire mon attention : je connais tous les bâtiments par cœur, depuis le temps que je suis installée ici, et même les cycles saisonniers de la flore locale n’ont plus tellement de secrets pour moi. Il y a un type, en bas, que je crois pas avoir jamais vu, mais il ne m’occupe le regard que quelques instants. Même ce bon vieux ciel, perpétuellement changeant, ne sait plus vraiment me le retenir. Si je le contemple, c’est juste pour détourner les yeux de mon bureau.
J’entends à nouveau des pas, derrière moi, moins discrets que ceux de Moser ; puis une paire de mains qui farfouille entre mes feuilles. Sur une grande inspiration fatiguée, je me retourne lentement, pour faire face à une petite tignasse blonde que je connais désormais bien.
« Salut Aurie !, elle me lance.
– Salut Allie, je lui réponds.
– Comment ça va, ta théorie ? »
Elle agite mes brouillons dans sa main, avec son sourire innocent.
« Pas tellement mieux, lui dis-je en m’approchant. J’ai eu une nouvelle idée, mais elle me plaît pas.
– C’est quoi, ta nouvelle idée ? »
Je réfléchis à comment expliquer ça à son esprit d’enfant. Arrivée à sa hauteur, j’attrape une feuille, un crayon, et je commence à lui faire des dessins :
« En gros, tu imagines qu’en plus du centre d’hégire… tu te rappelles ce que c’est, le centre d’hégire ?
– Oui, c’est là d’où partent les incohérences d’Esquisse !
– Voilà ; donc en plus de ça, tu imagines qu’il y en a plein d’autres partout dans l’espace, qui font constamment des petites incohérences invisibles à l’œil nu, et qui sont "excités" par celles du centre. Du coup, l’univers aurait besoin d’encore plus d’énergie que dans mon autre version pour empêcher l’incohérence, parce qu’il devrait empêcher celle du centre en même temps que celles qui le parsèment naturellement. Tu vois l’idée ?
– Oui ! C’est pour ça que t’as pu faire une Tempête dans la vallée d’énergie, l’autre fois ?
– C’est ce que j’imagine. Mais j’ai pas encore fait les calculs. »
Elle agite à nouveau le brouillon.
« Et ça, c’est quoi ?, me charrie-t-elle tout sourire.
– Ça, c’est juste la formule, je t’ai déjà expliqué. Derrière, il faut que je remplace les lettres par des nombres.
– Et pourquoi tu le fais pas ? »
Je souffle du nez, à la fois par amusement pour sa question un peu naïve et par appréhension pour la réponse que je vais lui donner. Comme on est sans doute parties pour une longue discussion, je récupère ma chaise à côté d’elle, et je réponds simplement :
« J’aime pas ma formule. Elle est pas jolie.
– Pourquoi tu la trouves pas jolie ?
– Tu la trouves jolie, toi ?
– Moi, je l’aime bien. Elle a onze bouts, et puis que des 2 et des 3 dedans. »
Je regarde ma ligne de calculs, en constatant que je peux lui concéder au moins ça.
« Par contre, reprend la petite avec amusement, je comprends toujours rien dans ce que t’écris.
– Il y a pas grand-chose à comprendre, c’est juste qu’il y a trop de trucs partout.
– T’aimes pas, quand y’a des trucs partout ?
– Pas tellement, non.
– Pourquoi ? »
C’est forcément difficile à expliquer à quelqu’un qui n’a pas un esprit scientifique, qu’une formule est généralement d’autant plus élégante qu’elle est simple. Je lui gratte les cheveux en la raillant sur sa curiosité parce que je sais qu’elle déteste ça, pour me donner le temps de réfléchir à ma réponse pendant qu’elle proteste.
« Tu imagines, reprends-je, si tu avais une peluche avec plein de pattes et d’yeux partout ?
– Ça ferait un joli nombre ?
– Imagine qu’elle aurait treize yeux et quatre-vingt neuf pattes.
– Ben c’est des jolis nombres !
– Ouais, mais tu les trouves normaux ?
– Ben oui.
– Tu connais des animaux qui ont treize yeux et quatre-vingt neuf pattes ?
– Ben non, mais c’est pas grave, ce serait un animal qui existe pas !
– Eh ben ma formule, elle est censée représenter des phénomènes qui existent. »
Intense moment de réflexion chez la gamine, suivi d’un adorable petit rire nerveux ; heureusement que je suis toujours si fière, quand j’ai le sentiment d’avoir compris quelque chose de nouveau, parce que sinon, elle ne m’aurait jamais lâchée.
« Et toi, d’ailleurs, la reprends-je, tu m’avais dit que t’allais avoir des nouvelles peluches ? »
Elle troque temporairement son sourire pour un air grognon pour me répondre :
« Ouais, mais j’ai pas eu celle que je voulais. ‘fin, pas vraiment.
– Ah oui ?
– Ouais. Il y avait un lapin doré que je trouvais trop beau, mais j’ai pas pu l’avoir en première. Du coup, je suis obligée de le partager avec quelqu’un.
– C’est toujours ça, un demi-lapin.
– Moi, j’aime pas. C’est comme ta demi-théorie. »
Elle regarde vers le sol avec sa petite moue, et pour être franche, je me retiens de faire la même chose. J’imagine que je l’ai pas volée, celle-là. Tendrement, je passe mon bras autour de ses épaules, parce que je sais qu’elle adore ça ; elle, elle cale sa tête sur une des miennes.
« On parle d’autre chose ?
– Ouais. »
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