[Terminé] Choir et déchoir [pv Belgan]

C’était un drôle d’oiseau que cet oiseau-là.

Il n’avait pas une allure d’oiseau, et semblait flotter plus qu’il ne volait ? Peut-être était-ce à case d’une totale absence d’ailes.

Le jour venait à pine de se lever lorsque l’envol avait débuté. L’oiseau s’était-il jeté d’un nuage, ou bien l’avait-on expulsé d’un paradis aérien ? Au début, ce n’était qu’une chute libre, rapide, farouche, sauvage, dangereuse. L’oiseau tombait comme une pierre, trouant les nuages, sans bruit, sans cri. Puis, une lumière bleue s’était levée. Et la chute était devenue un vol paisible, tranquille et apaisé. L’oiseau vivait.

Le ciel changeait peu à peu de couleur. De rosé, il était devenu bleu, d’un bleu éclatant, puis presque blanc au fur et à mesure de la course imperturbable du soleil, dont les rayons semblaient amoureusement envelopper cet étrange volatile. Les vivants ne pouvaient pas encore l’apercevoir, il était trop loin, bien trop loin, simple tâche un peu sombre peut-être. Mais le soleil continuait à courir, et bientôt, le ciel fut sanglant ; Cela, pourtant, ne semblait pas perturber l’oiseau, qui paisiblement, continuait sa lente descente vers Elysion. Même le vent qui commençait à se lever ne semblait pas pouvoir le faire dévier.
Il ne commença à réellement s’approcher du continent lorsque la Lune commençait à monter dans le ciel. Enfin, il aurait pu être visible pour les habitants, qui à ce moment-là pourtant dormaient ou bien ne regardaient pas le ciel, magnifique cette nuit là.  Puis, les maisons ne furent plus d’étranges points, les jardins prirent forme, on pouvait distinguer les petits chemins. L’oiseau allait droit sur une maison. Une maison qui s’approchait.
L’oiseau, long corps horizontal aux yeux clos, aurait dû s’empaler sur la pique décorative du toit. Pourtant, il n’en fut rien. Il passa à travers le toit comme il était passé à travers les nuages. Et son vol s’arrêta sur un canapé rouge, peut-être un peu élimé, quoique ce ne fût pas visible, même aux lueurs du soleil levant, qui nimbait de violet le ciel d’Elysée.

L’oiseau n’en était d’ailleurs pas un. C’était, comme le dévoilait le soleil levant, une jeune fille. Les rayons captaient l’incroyable blondeur de ses cheveux mi-longs dispersés autour de son visage aux traits fins, purs et jeunes. Elle semblait dormir, tranquille, inconsciente de sa longue chute. Ses mains fines, l’une ornée d’un bijou, étaient croisées sur sa poitrine qui se soulevait à intervalles réguliers, prouvant que la vie était encore en elle. Dans le décollette très léger de sa robe bleue nuit, qui s’arrêtait au dessous du genou, dévoilant ses pieds nus, très propres était caché une pierre bleue, d’une bleu incroyable et lumineux, une pierre brillante, incrustée d’un motif en or. Elle avait une forme de poire, et au dos du motif était gravé un nom. Elle était reliée à une chaîne d’argent. Lorsque ses paupières fines, bordées de cils blonds, se soulèveraient, la personne à qui l’habitation appartenait pourrait découvrir les yeux de la jeune fille, du même bleu que celui de cette pierre. Lorsque ses lèvres roses s’animeraient, l’habitant pourrait comprendre que la jeune fille ne conservait aucun souvenir de rien, par contre, son cerveau, lui, avait amassé des informations sur tout, transformant la demoiselle en une encyclopédie à la voix incroyablement douce.
Mais pour l’instant, ses yeux étaient clos, ses lèvres immobiles. Elle était allongée sur le canapé rouge. Peut-être dormait-elle, en effet ?

Une main secoua le bel oiseau, dont les yeux s’ouvrirent d’un coup. Des yeux d’un bleu incroyable par sa pâleur. Etait-il réellement possible d’en posséder de tels ? Face à la jeune fille, il y avait un homme.

*La soixantaine, u moins. Regarde les marques sur son visage ! Vois ses cheveux ! C’est la marque d’un certain vieillissement de la peau et des cellules, qui cessent alors de produire de la mélanine, ce qui explique cette couleur peu habituelle.*

La voix avait surgi dans sa tête. Elle, elle prêtait surtout attention à la brosse coincée entre les dents du vieil homme, qui lui parlait de canapé.

*Le canapé est ce sur quoi tu es. C’est un meuble, souvent rembourré et confortable, qui est dans des pièces nommées salon en général. Il date de bien avant notre monde. Ce qu’il a dans la bouche est une brosse à dents. C’est fait pour nettoyer l’intérieur de la bouche, afin d’en préserver l »hygiène. On s’en sert une à trois fois par jours environ si l’on veut bien faire.*

Il lui demandait également qui elle était. Cette fois, la voix se tut. Elle cligna des paupières, le regarda, semblant ne pas comprendre. Etait-ce son prénom, Mademoiselle ?

*Mademoiselle est un titre que l’on utilise pour les femmes jeunes, ou non mariées. C’est rarement un prénom. Ce terme est utilisé depuis quelques millénaires déjà.*

Bon, donc, elle ne se nommait pas Mademoiselle. Et cette voix, silencieuse lorsqu’elle avait vraiment besoin d’elle. Soudain, une autre voix s’activa. Elle était, elle bien différente. C’était corps entier qui parlait, comme s’il boulait lui souffler quelque chose qu’elle aurait oublié. Une sorte de mélodie lui revint. Elle regarda le vieil homme, encore un peu de ses immenses yeux pâles. Puis elle comprit.

- Je m’appelle … Odéline. Je crois.

Sa voix était douce, caressante, celle d’une enfant sans la dimension agaçante.

Il la regarda très bizarrement, un peu comme s’il la passait sous un scanner très puissant. Elle soutint son regard sans ciller, toujours un peu interrogatrice. Il lui demanda comment elle était entrée, et elle posa un doigt sur ses lèvres, en pleine réflexion. Comment était-elle entrée ? C’est vrai, ça, comment s’était-elle retrouvée ici ? Elle n’en savait rien. Elle ne se souvenait plus. Apparemment, rien n’avait été forcé. Elle n’avait pas fait de bruit alors que c’était impossible. Alors, comment avait-elle fait ? Elle regarda l’homme de ses grands yeux.

- Je ne sais pas monsieur.

Elle avait l’air désolée, et ses yeux brillaient un peu plus, comme si elle allait se mettre à pleurer soudain.

Il semblait être affolé par sa tristesse et son amnésie. Puis, il fit une phrase étrange.

*Te ? Vous ?
- Tutoiement et Vouvoiement sont un concept grammatical relatif aux locutions. Tutoiement (tu, te, toi, ton, le tien, la tienne, etc.) est utilisé pour les proches, les pairs, les subalternes ou dans un registre de langue familier et le vouvoiement ( vous, votre, le vôtre, la vôtre, etc.) est utilisé pour les personnes auxquelles on doit un certain respect, ce qui peut comprendre les inconnus, les supérieurs, les personnes âgées et dans les contextes où un certain formalisme est de rigueur.*

Elle le regarda attentivement, la tête penchée sur le côté. Puis il lui posa une question très étrange. De quoi se souvenait-elle ?
Elle tenta de s’en souvenir, mais chaque fois qu’il lui semblait s’approcher de quoi que ce soit cette chose infime semblait éclater comme une bulle de savon qu’on effleure. Son menton se mit à trembler.

- De rien, monsieur …

Sa voix, elle aussi était prise de tremblote soudain.

Il lui prit la main, et ce simple contact la réconforta beaucoup. Elle sourit au vieux monsieur si gentil, qui, tout en bafouillant, lui proposait de rester encore un peu, et elle ravala ses larmes. Elle lui sourit.

-Merci beaucoup monsieur, je vous suis très reconnaissante ! Je ferai tout pour y arriver vite ! En attendant je vous encombrerai le moins possible …

Elle lui sourit. Elle allait faire tout ce qu’il lui demandait.

- Monsieur … Vous vous appelez comment ?

Siffroy Belgan. Elle allait se contenter de Siffroy, c’était suffisant pour elle. ET il était là pour la servir. Un grand sourire éclaira son visage juvénile. Un peu plus, et elle lui sautait au cou. Elle se retint, tout comme elle se retint de battre des mains. Puis il lui dit q’il aurait besoin d’elle pour ménage et cuisine.

- Ca, ça ne s’oublie pas je pense !

Elle lui sourit.

- De quoi avez-vous besoin ?

Elle lui sourit de nouveau et se poussa pour lui faire de la place. Il prit l’objet sur la table basse et, la tutoyant de nouveau, il lui demanda si la fumée la dérangeait. Elle lui sourit.

- Je ne sais pas … Qu’est ce que c’est ?

Elle désignait l’objet. Cette fois, son encyclopédie répondit en même temps que siffroy.

*La pipe est un objet servant principalement à fumer le tabac mais aussi d'autres substances comme le cannabis, l'opium, le crack...*

Elle le regarda bizarrement. Elle ne comprenait pas bien sa réponse.

*Comment ça peut être mauvais pour la santé et faire du bien aux vieux ?*

Par son silence sa voix intérieure prouvait son ignorance sur ceci. Elle le regarda de se yeux candides.

- Non, rien. Je vous le dirai si ça revient.

Elle lui sourit.

- Comment ça peut être mauvais pour la santé et faire du bien aux vieux ?

Odéline regardait Siffroy fumer et son sourire s’élargissait. L’odeur était étrange, et de la fumée blanche sortait de l’objet, manifestement en bois, qui avait une forme étrange. C’était, en effet, très drôle.

Il lui expliqua une histoire de fumée qui lui fit ouvrir de grands yeux étonnés. De la dépendance ? Qu’est ce que c’était ça encore ?

*L' addiction, ou dépendance est, au sens phénoménologique, une conduite qui repose sur une envie répétée et irrépressible, en dépit de la motivation et des efforts du sujet pour s'y soustraire. Le sujet se livre à son addiction malgré la conscience aiguë qu'il a d'abus et de perte de sa liberté d'action, ou de leur éventualité.*

Ah, c’était donc ça … Merci la p’tite voix ! Elle sourit à Siffroy lorsqu’il lui tendit sa pipe.

- Pourquoi pas …

Elle la prit et la fuma en écarquillant les yeux, donnant l’impression que ses sourcils allaient s’envoler et prenant une grosse bouffée de tabac. Puis elle retira la pipe et resta comme ça, les joues gonflées sans savoir que faire. Et d’un coup sa gorge se mit à piquer, alors qu’elle commençait à apprécier le gout. Et elle toussa, cracha, pleura avec une force peu commune.

- Aaaaaaaah ! Ca arrache ! C’est pas mauvais mais ça piiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiique !

Il éclata d’un rire amusé, et elle se demanda brièvement si c’était moqueur, quoiqu’elle en doute fort. Il n’avait pas l’air à être du genre à se moquer d’elle. Quoique … Elle le regarda, puis rit avec lui. Le bruit de son rire à ses propres oreilles lui fit un drôle d’effet. C’était joyeux, aigu, et ça glissait comme de l’eau. Ca lui paraissait joli. Elle s’arrêta avec lui. Et, alors, il lui proposa de choisir une nouvelle maison. Elle paniqua un instant –voulait-il déjà se débarrasser d’elle ?- lorsqu’elle fit le lien avec les chambres à l’étage. Alors un grand sourire éclaira son visage d’innocente, et elle se leva.

- D’accord ! Je vous suis.

Elle le regardait intensément, attendant qu’il la guide.

Il bondit sur ses pieds, à une vitesse relativement étrange pour son âge. Odéline, elle, se leva doucement, sa robe semblant se mouvoir d’elle-même autour de ses jambes ce qui faisait un effet très étrange. Elle suivit lez vieil homme, ses immenses yeux s’écarquillant dès qu’ils tombaient sur un objet inconnu. Toutes ces choses qu’elle ignorait ! Toutes ces questions à poser ! Et puis ces exclamations, ces indications qui venaient s’entrechoquer dans sa tête de façon soudaine, répondant de façon inattendue et très distanciée à chacune de ses questions … La jeune fille fut son possible pour suivre Siffroy –et ce n’était as une tâche des plus aisées : sa robe menaçait de la faire tomber à chaque pas et les escaliers étaient très raides. Il la regardait fréquemment et elle lui faisait un sourire qui se voulait rassurant –ce n’était en fait qu’un simulacre peu assuré et un peu tremblant, comme une flamme de bougie manquant d’oxygène-. Puis, ils arrivèrent en hait des marches de bois sombre et craquant. Face à eux il y avait un mur, un autre mur en face, un autre par-dessus, un enfin dessous et un trou au centre. Tout au bout il y avait une porte. Mais entre eux et le bout il y avait d’autres portes. D’autres portes qu’il lui désigna tout à tor. Laquelle voulait-elle visaiter en premier ? Elle n’en savait rien. Aussi mit-elle une main sur ses yeux et tendit-elle l’autre bras devant elle. Elle se mit à tourner sur elle même, désignant tour à tout les portes, tout en chantant la comptine qui suit:

- Le chat-eau vole, le cha-teau flotte, le vent souflle et pous-se le cha-teau vo-lant, le cha-teau flot-tant !

Elle regarda la porte que son doigt désignait et sourit à Siffoy.

- Celle-ci !

Il éclata de rire, sans raison. Odéline leva un sourcil mais le suivit. Il poussa la porte et entra, elle sur ses talons. Et elle resta stupéfaite. C’était très beau ! Tout était bleu, en différentes nuances, avec une décoration éclectique mais pleine de goût et de finesse. Elle retrouva là le style de certains objets étranges aperçus dans les autres pièces. Il lui demanda ce qu’elle en pensait et elle se tourna vers lui, le visage rayonnant.

- C’est magnifique, il me tarde de voir le reste !

Et elle joignit le geste à la parole, allant dans l’autre chambre. Sans passer par la porte : elle venait de traverser le mur de séparation comme s’il n’y avait rien eu à la place.

Siffroy la rejoignit dans la pièce après l’avoir appelée. Il lui demanda comment elle trouvait cette pièce. Elle était tellement fascinée qu’elle ne répondit pas tout de suite. Il y avait un lit bateau, et des draps pourpres et dorés. Une lune dorée était suspendue à un mur, et il y a avait des gravures un peu partout, ainsi que des armes. Cela formait un ensemble hétéroclite, un bric à brac sympathique. Se yeux brillaient devant tant d’objets inconnus, incongrus et inutiles. Sa voix la harcelait d’explications. Elle eut un rire.

- Mais c’est génial ! Elle est belle !

Et puis, impatiente d’en voir plus, elle passa à côté, en traversant de nouveau le mur, sous les yeux de Siffroy.
Elle et l’impression de tomber dans la caverne d’Ali Baba et sut que c’était là qu’elle voulait vivre. C’était une chambre qui ne semblait pas en être une. Ses murs étaient verts amande, et son toit était légèrement penché, sûrement devait-elle être à l’extrémité de la maison. Un grand lit en fer forgé était dans une alcôve, que l’on pouvait fermer par un rideau. Au sol, il y avait du plancher massif, couleur miel qui donnait à la pièce une dimension intime et douce, surtout associé aux murs. Mais surtout, surtout … Il y avait un mur entier couvert d’étagères. Dans ces étagères, il y avait des livres, des centaines de livres. Et puis, à d’autres endroits, il y avait un globe terrestre, une horloge ouvragée, un œil qui ressemblait à u bijou indien et tant d’autres choses, totalement indescriptibles, colorées, donnant l’impression que cette pièce rassemblait le monde entier à elle seule.

- Siffroy ! C’est … Magnifique ! Je peux vivre là, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait, s’il te …