[Archivé] [L'Expédition] La petite exploration de la petite ville des petites personnes sous la grande montagne [Libre]

Achéron avait fini par se réveiller après l'attaque de la poêle [mais c'est quoi une poêle ?] et s'était vu affublé d'une magnifique bosse sur le crâne en souvenir de l'affrontement.
Pour lui, le reste du voyage se passa comme avant l'incident de la Passe ; il resta à aider le cuisinier comme il pouvait, trouvant de plus en plus fatigant le rôle qu'Ulrik lui avait trouvé pour participer à l'Expédition sans éveille les soupçons. Fort heureusement, la diminution progressive des vivres simplifia peu à peu les menus, si bien que le cuisinier avait de moins en moins de travail, et donc laissait Achéron tranquille, par extension.
Le garçon en profitait donc pour dormir - quoi d'autre ? - plongeant dans un rêve qui revenait inlassablement, où il se voyait au milieu de la savane brûlante qui l'avait vu grandir. La répétition le faisait penser à sa famille, tant et si bien qu'il était de plus en plus grognon lorsqu'on le réveillait, ne souhaitant que se replonger dans son sommeil.

Il lui semblait parfois sentir une présence avec lui dans son sommeil, comme quelqu'un qui dormirait tout le temps à ses côtés sans jamais se montrer. Achéron croyait que c'était le Chasseur de son père, qui voyageait aussi sur son propre cheval noir avec l'Expédition, mais l'homme ne s'approchait jamais du jeune Réprouvé à moins de dix pas, ni ne croisait son regard.
Comme la présence qu'il ressentait dans son sommeil ne le dérangeait pas - et qu'elle l'aidait un peu à mieux dormir - il cessa bientôt d'y prêter attention.

Le Cirque des Ours et sa proximité avec d'antiques ruines naines le motivèrent assez pour rester réveillé - ce qui était assez rare - car le garçon pensait tenir là l'occasion rêvée d'accomplir sa mission pour Père ! S'il y avait bien un endroit où trouver des artefacts, c'était dans ces ruines !
Et s'il finissait aussi vite sa mission, il pourrait retourner dormir sans que personne l'embête !
Ni une ni deux, Achéron se faufila hors de la roulotte du cuisinier au chômage technique et se prépara tranquillement à sortir du camp pour aller explorer ces ruines, sans dire un mot.

Le jeune garçon à la peau noire, cheveux crépus et Réprouvé de son état passait d'un chariot à l'autre, récupérant là une lampe-tempête - autonomie bien entamée - là un bâton - pourri au milieu - ici une corde - trop courte sans doute - bref, s'équipait pour l'aventure comme tout enfant le ferait, avec plus de bonne volonté que de bonnes idées.
Il pensa un instant demander au Chasseur de l'accompagner, mais décida finalement que non : il ne voyait pas en quoi l'homme pouvait aider pour trouver des artefacts dans une cité naine, il n'allait pas chercher une personne vivante après tout.

Par contre, Achéron savait que le Chasseur avait toujours du matériel sur lui, qui pourrait certainement lui être utile.
Avisant de loin l'homme qui était dans son coin, le jeune Réprouvé repéra vite la sacoche qui contenait à coup sûr du matériel de chasseur de premier choix. Le Chasseur la gardait à son côté, comme un trésor.
Achéron s'arrêta pour réfléchir un instant. Il ne voulait vraiment pas mêler le Chasseur à son aventure, n'aimant pas le fait que l'homme ne lui avait pas dit un mot depuis le début du voyage, ni ne l'avait aidé lorsqu'il était passé devant lui en peinant sous le poids des poubelles de la cuisine !
Mais comment obtenir la sacoche sans révéler pourquoi il la voulait ?
Vole-la, tout simplement.
Plus facile à dire qu'à faire. C'était le Chasseur, il le verrait venir de loin. Il était plus vigilant qu'un chien de prairie.
Je vais t'aider, si tu promets d'arrêter de gigoter dans tous les sens. Tu me fatigues, et les autres font vraiment trop de bruit de toute façon...
Achéron hocha la tête, sans se rendre compte que quelque chose de plutôt inhabituel était en train d'arriver.

Après quelques secondes, il eut une sensation de vertiges, puis de nausées, un court instant, comme si une main appuyait fort sur sa tempe, puis le silence se fit.
Tout s'était arrêté dans le campement. Les gens, statufiés, figés dans leurs actions, au milieu d'un pas, en plein effort de réparations. Les chevaux, immobiles et silencieux. Même les flammes des feux de camp ne bougeaient plus, et ressemblaient à des rideaux de soie incandescentes au-dessus des braises.
Étonné, Achéron déambula un instant dans ce paysage si surprenant, avant de se rapprocher du Chasseur. Il était difficile de savoir si l'homme était aussi affecté par ce qui touchait le campement, tant il bougeait peu même en temps normal, mais il ne réagit pas lorsque le jeune Réprouvé se tint face à lui, s'empara de la sacoche sans efforts et s'éloigna aussi vite qu'il pouvait.
Quelle chance que ses pouvoirs sur le temps se soient activés à ce moment-là !

Finalement équipé pour l'aventure - une lampe qui ne tiendrait pas longtemps, un bâton à moitié pourri, une corde trop courte et une sacoche au contenu inconnu, rappelons-le - Achéron s'éloigna du campement figé en direction des ruines naines.
Lorsque le campement retrouva sa place dans l'écoulement normal du temps, plusieurs personnes clignèrent plusieurs fois des yeux, ayant eu l'impression d'avoir vu le jeune garçon noir disparaître subitement.
Mais rien d'assez probant pour se mettre en alerte, évidemment, le garçon en question était d'un naturel discret après tout...

Son devoir rempli, Anna abandonna son épaisse veste de chasse, au profit d'une tenue plus légère et souple. La cité était ensevelie, escalade et acrobatie promettaient d'être au programme. Elle attacha à sa ceinture, divers piolets, ainsi que deux lames et un pistolet. On n'est jamais trop prudente songea-t-elle. Elle n'oublia pas non plus ce petit globe, couleur nacre, qui lui avait couté une coquette somme, mais qui avait l'avantage, une fois activé, de léviter à côté de son propriétaire, en lui offrant une lumière dévorant les ténèbres les plus denses. Elle prit également une corde ainsi qu'une gourde. Elle enfila de solides gants de cuir et entreposa dans son sac, plusieurs outils servant à l'extraction et au contrôle des artefacts. Satisfaite, elle attendit le retour de Meli, qui guidait l'équipe chargée de la cueillette. Une fois la fée de retour, le duo se mit en route vers les ruines. Un bref instant, Anna crut voir le petit aide cuistot se faufiler vers la grotte, mais ce fut si bref, qu'elle n'eut pas réellement quoi en penser. Toutefois, le frisson qui parcourut Meli au même instant, la convainquit qu'elles allaient devoir être particulièrement vigilantes.

Après une série de contorsions, Anna rejoignit Meli, à travers la faille qui menait à la ville des petites personnes sous la grande montagne.

Achéron marchait depuis un moment déjà, la faible lumière de sa lampe-tempête - allumée par miracle grâce à une allumette humide - lui permettait de voir le chemin devant lui, et c'était tout. Il n'y avait pas grand chose d'autre à voir pour le moment de toute façon, et le jeune garçon impatient devant tout ce qui n'était pas gratifiant dans l'instant commençait à trouver cette expédition fatigante.
Oui, déjà.
Alors que cela faisait quelque chose comme deux minutes qu'il était dans cette caverne.

Après réflexion, cela ressemblait plus à une faille en fait, qui descendait en pente douce et en ligne droite dans la montagne. Les dimensions du passage oscillaient, tantôt large de plusieurs mètres et haut de plus encore, tantôt étroit jusqu'à ce qu'il doive avancer en crabe et se baisser pour ne pas se cogner la tête sur le plafond. Il y avait même de temps en temps des trous dans le plafond, d'où coulaient de l'eau ou un peu de lumière, et le bruit de ces petites chutes couvraient le bruit de ses pas en une myriade d'échos.
L'oeil pas du tout exercé d'Achéron rata les signes de la présence des nains autrefois, passés maîtres dans l'art du travail de la pierre et dans la dissimulation de leurs habitations. Il y avait en effet des signes runiques dessinés sur certaines parois, indiquant les distances restantes avant d'arriver à la ville, pour qui savait lire le runique, évidemment. Il y avait même inscrit dans ce langage antique et un brin magique, plusieurs réclames publicitaires.
A d'autres endroits, c'étaient de petits outils, ou objets du quotidien, tombés là et enterrés dans la poussière qu'une antique inondation avait déposé dans le passage.

La lumière de sa lampe faiblissant, Achéron avança en tentant de réparer sa seule source de lumière jusqu'à un dernier tournant. Concentré sur son examen de lampe, il ne vit pas qu'il était arrivé devant une large double porte à moitié ouverte, en métal clair et couvert d'une riche collection de gravures et de runes représentant les nains, leur mode de vie, leurs habitudes alimentaires, leur habitat et plusieurs autres publicités. C'était vraiment foisonnant, comme gravures.

Évidemment, la flamme de sa lampe s'éteignit à ce moment précis, toute l'huile épuisée, le plongeant dans les ténèbres.
Achéron s'immobilisa et grogna, légèrement agacé.

- Hmm...

Il s'assit à même le sol, pas du tout effrayé par l'obscurité, cherchant à l'aveugle les allumettes moisies qui devaient trainer dans son barda.