Elysion
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Odéline Belgan
Odéline Belgan
Minosien.ne
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La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Empty La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6

Ven 11 Nov 2022 - 16:51
Coucou !

L'épreuve 6 de l'Interforum 15 m'a bien inspirée donc j'ai produit plusieurs textes que je m'en vais vous partager ! C'était un solo, donc voici l'énoncé:

"C’est l’heure d’une petite interrogation surprise ! Vous qui aimez donner votre avis, cette dissertation devrait vous mettre en joie. En voici le sujet : Discuter, est-ce renoncer à la violence ? Vous avez 4 heures."

Le texte choisi pour concourir est celui d'Odéline que voici: https://www.kobehs.org/t18261-epreuve-6-elysion

"Rends-moi mon jouet !
- C’est toi qui me l’a pris ! Il est à moi !


Ca recommençait. Encore. Avec un soupir, Odéline cessa de remuer la béchamel qui napperait les lasagnes (dont des lentilles remplaçant la viande devenue rare) du repas de midi, s'essuya les mains sur son tablier et accourut pour séparer les deux adversaires.
Terrible combat que celui qui avait commencé au milieu de la salle de jeux ! Entourés déjà d’un cercle de bambins et d'enfants fascinés par ce déferlement de violence aussi soudain qu’habituel, les deux adversaires se roulaient déjà par terre dans des cris. Anita avait sorti les ongles, et tentait de griffer Anton qui tenait dans sa bouche sa tresse brune, semblant ronger l’amas de cheveux. Ceci, évidemment, provoquait de grands cris chez la fillette enragée, qui battait l’air de ses bras et faisait de son mieux pour bourrer de coups de pieds son adversaire, lequel tenait en l’air d’une main une figurine de cheval ailé scintillante, et de l'autre, tirait sur la robe de son opposante afin de la maintenir à distance. Les coutures de la petite poche en forme de cœur semblaient prêtes à lâcher, peu habituées à être ainsi écartelées. Quand ce sera fait, Anita serait plus libre de ses mouvements … et Odéline aurait un sacré travail de couture à rattraper ça ! Maudits gavroches !

Ca suffit ! s'exclama-t-elle en avançant vers eux. Arrêtez de vous battre comme des chiffonniers !

A ces mots, elle avait commencé à les empoigner pour les séparer. Elle avait beau ne pas être bien costaude, elle avait suffisamment de force pour séparer deux enfants, tout de même ! Et puis sinon, elle leur jetterait un verre d’eau, pour les surprendre et les faire se lâcher un instant, suffisant alors pour les séparer. Heureusement, elle n’eut pas à en arriver à cette extrémité redoutée: elle avait suffisamment d’autorité sur eux pour qu’ils l’écoutent malgré leur rage.

Mais enfin, qu’est ce qui se passe encore ?! demanda-t-elle aux deux loulous débraillés qui lui faisaient face.
- Il m’a volé mon jouet !
- C’est même pas vrai d’abord ! C’est elle qui l’a pris !


Comprenant bien qu’elle ne s’en sortirait pas comme ça, et surtout pas avec tout le reste de ses petits protégés rassemblés autour d’eux, qui écoutaient, et se permettaient déjà d’intervenir ou mettre leur grain de sel (ou demander à manger, ou à boire, ou un mouchoir, ou un câlin, ou à jouer, ou à faire pipi, ou donner un bouton à recoudre, un dessin, une pierre, une fleur, ou bien encore raconter une histoire, décrire leur derrière éternuement, narrer leur rêve de la nuit dernière, etc, etc.), elle posa doucement la main sur la tête des enfants:

Allez venez avec moi, on va aller nettoyer tout ça, et discuter un peu.

Ils la suivirent, Anita froissant rageusement le devant de sa robe et Anton reniflant bruyamment pour retenir ses larmes. Arrivée à la salle de bains, Odéline les laissa s’asseoir, sortit cotons, désinfectant, gats, et peignes. Puis, avec tendresse, elle remit en ordre cheveux et vêtements, retirant la bave de la tresse (qu’elle débarrassa aussi des cheveux rongés), et commença à discuter avec les petits elysionniens face à elle.

Alors, racontez-moi tout, leur demanda-t-elle avec douceur. Anita, qu’est-ce qui s’est passé avec ce jouet ?
- Ben le pégase, moi je l’aime bien, je dors avec tu sais ! Même s’il est un peu dur, il me rappelle celui qu’on avait … avant.

Ces mots suffirent à serrer le cœur d’Odéline. Chacun des enfants présents à l’orphelinat avait été, d’une manière ou d’une autre victime de la guerre qui bouleversait Elysion, de la violence qui consumait les hommes. Tous se retrouvaient arrachés à leur foyer, à leurs familles qui parfois n’étaient même plus de ce monde, ou avaient sciemment choisi de les abandonner. Qui pouvait dire ce qui faisait le plus souffrir ?
Certains gardaient des souvenirs de leur vie d’avant, de la vie qu’ils avaient eu avant d’arriver dans cette immense maison minosienne où tous les enfants seuls d’Elysion se retrouvaient, où elle prenait soin d’eux, les chérissait, faisait tout pour qu'ils puissent grandir de manière sereine, qu’ils puissent pousser droit malgré les horreurs autour d’eux. Les vies antérieures laissaient des traces.

Je sais, ma puce, lui dit-elle en lui caressant la joue. Je sais. Il était gentil, ce pégase ?
- Oui ! C’était le plus doux, et je faisais des tours sur son dos ! Il était tout chaud, et quand il mangeait dans ma main ça faisait comme un bisou.
- N’empêche que c’est mon jouet ! intervint Anton. Y a même l’initiale de mon prénom, dessous, ajouta-t-il, avant de se rendre compte qu’ils partageaient cette initiale.”

Odéline soupira, terminant de refaire la tresse de la petite fille, avant de passer un coup de gant sur le visage du garçonnet. Celui-ci affichait un air buté et des yeux brillants.

Il est à moi ce pégase, c’est mon grand frère qui me l’avait offert !
- Ah bon ? Et tu l’as pris ici avec toi ?
- Oui … Je l’aimais pas trop, parce que ma soeur a mis des paillettes dessus. J’aime pas les paillettes. Mais … Je l’ai pris quand même, et il est à moi !
- Mais tu joues jamais avec ! protesta la petite fille de son côté.
- Et alors ? C’est MON jouet Anita !

Sentant qu’il n’en faudrait pas beaucoup plus pour que la bagarre recommence, Odéline passa subrepticement le gant sur la bouche d’Anita.

Ouh là là, mais tu as les ongles tout cassés, ma puce, il faut que je te les coupe, attends un peu !

Le coupe-ongle qu’elle venait de sortir offrit une diversion suffisante aux belligérants, et lui laissa le temps de reprendre son souffle.

Anton, je sais que ton grand frère et ta petite soeur te manquent beaucoup, mais son pégase manque beaucoup aussi à Anita tu sais. Peut-être que tu pourrais jouer avec elle, et que vous pourriez inventer une histoire avec ? Et toi Anita, il ne faut pas que tu prennes le jouet d’Anton sans lui demander tu sais ! Si tu veux, on pourra tricoter un pégase en atelier un jour ! Comme ça tu en auras un à toi aussi ? Si tu veux, Anton, on te fera un Krakdent ! Je sais que tu les adores !

Cette simple perspective d’un nouveau jouet (tout doux en plus) sembla ravir les deux gamins, et les divertir de leur conflit.

Eh Anita, tu veux qu’on dise que le pégase, il survole Rhadamanthe pour repérer les méchants qui détruisent les maisons ? Et comme ça il les chasse ?
- Oui ! Et puis il emmène les enfants avec lui comme ça !


Souriant devant ce conflit résolu, Odéline laissa partir les deux enfants avec leur figurine. Il lui fallait ignorer le fait que la guerre était là dans leurs jeux. C’était sain, elle el savait, qu’ils exorcisent ainsi ce qu’ils avaient vécu, mais voir ainsi des horreurs d’adultes s’immiscer dans des jeux d’enfant la glaçait, lui faisait monter les larmes aux yeux. Satisfaite malgré son coeur pincé, elle retourna dans sa cuisine. L’odeur qui s’en dégageait l'alarma cependant.

Oh non ! Ma béchamel !

Les lasagnes se passeraient donc de nappage ce midi … Elle n’avait plus de lait, plus de beurre non plus. Avec la guerre qui durait, le rationnement était arrivé. Le principal des provisions allait aux soldats et c’était bien normal. Heureusement, elle avait un jardin, et des poules pour les œufs. Mais déjà, elle trouvait la garde-manger bien vide, au regard du bataillon de bouches à nourrir, au regard de l’appétit insatiable de tous ces enfants en pleine croissance.
Et déjà de l’autre côté, des cris de dispute se faisaient entendre. Déjà, ça recommençait ? Parviendrait-elle un jour à éradiquer la violence dans l'orphelinat, à force de discuter, à force d’écoute, à force de tendresse ? Ou bien était-ce la nature profonde de chacun qui voulait cela ?

Avec un soupir exténué, Odéline regarda par la fenêtre. Au loin, des fumées s'élevaient. Elle le savait, la guerre s’approchait d’Elysée. On disait que les camps de soldats étaient visibles, à présent, des murs de la ville. On disait qu’il y avait des négociations en cours. Parviendraient-elles à leur assurer un peu de répit ?
Sentant les larmes lui monter aux yeux, elle se détourna. Non, elle refusait d’y penser. Et elle allait résoudre ce fichu conflit qui opposait encore deux autres enfants ! Peut-être qu’à force, elle parviendrait à participer à la création d' une génération qui ne voyait pas la violence comme une manière de régler ses problèmes, qui comprendrait qu’on réglait bien plus en communiquant de manière ouverte.
Peut-être qu’en continuant ses efforts, en continuant à leur apprendre, elle apporterait sa pierre à l’édifice, et qu’ainsi, ils pourraient éradiquer la guerre …

_________________
Peut-être que je gâche ma jeunesse,
Mais peu m'importe,
Peut-être que je ne cherche que de vieilles idées,
Mais peu m'importe,
Je viens de naître,
Et j'ai cent ans,
Je sais tout,
Mais je ne sais rien,
Rien de moi.

Odéline

La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Odzoli10
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La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Empty Re: La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6

Ven 11 Nov 2022 - 16:52
L'épreuve m'ayant pas mal inspirée j'ai aussi posté les différents textes qui vont suivre en boîte à textes.

Il y avait les mains sur les cartes, et le scintillement des armures. Il y avait les emblèmes, les drapeaux, les hymnes. Il y avait les soldats, qui gardaient l’entrée, et regardaient sans avoir l’air d’y toucher vers les pans de la tente qu’un coup de vent faisait parfois claquer. Il y avait les éclats de voix, les discussions âpres. Il y avait les couronnes qui bougeaient, les casques qui restaient immobiles. Il y avait l’odeur des plats sans âme, réchauffés, informes, incolores, l’odeur de la crasse, de la peur, de la boue, l’odeur du froid qui tenait à distance l'odeur de corps qui se décomposaient, l’odeur du sang qui gorgeait la terre, l’odeur des entrailles mortes dont le contenu se déversait. Il y avait l’ordre, la rigueur, la logique, l’organisation, et en face, il y avait le chaos, le bouillonnement, la puissance, la vie.

Et il y avait le sourire d’Eden.

Un sourire qui écrasait tout, dominait tout. Elle avait gagné, ils avaient gagné, c’était évident. Ces rats effarouchés avaient-ils réellement cru pouvoir négocier avec l’Obscur ? Avaient-ils réellement cru que l’Ombre pourrait accepter une quelconque proposition visant à diminuer son pouvoir, visant à contrecarrer ses plans, visant à laisser la moindre lumière ? Avaient-ils été naïfs à ce point ?
Il fallait croire que oui ! Elle avait envie d’en rire, d’en rire à gorge déployée, d’un rire qui ferait trembler son armure et la terre entière. Cloportes ! Punaises ! Pourriture ! Immondes inutiles ! Parasites !

Oh, évidemment, il y avait eu un peu de surprise lorsqu’un émissaire de l’Alliance étit arrivé avec un drapeau blanc,sous les quolibets de toute leur arée, pour leur proposer de négocier. mais ils n'avaient pas refusé, non. Qui refuserait une bonne tranche de rigolade ?
Alors, à l’heure dite, ils y étaient allés. Les Réprouvés dans ces armures noires rutilantes. Les gradés, dans leurs armures chitineuses. Ils y étaient allés, oui. Certains n’avaient même pas pris la peine d'enlever leurs casques, de dévoiler leurs visages, ultime marque d’irrespect. Ils étaient entrés dans la tente préparée entre les deux camps, où trônait une table énorme, des cartes, des traités. Ils avaient rencontrées, oui, les puissances du camp adverse. Le roi et les reines des continents, leurs ministres, leurs généraux, leurs lieutenants, leurs colonels, ils étaient tous là. Ils étaient là, car ils voulaient discuter, négocier.
Découper des territoires, leur en céder, garder le contrôle sur d’autres. Diviser les puissances, sauvegarder les populations, arriver à un accord. Préserver les peuples, protéger les vivants. Se partager le monde, entre perdants.
Entre perdants, oui, car quel gagnant accepterait un tel accord, une telle humiliation ? Quel gagnant accepterait de voir sa puissance divisée, de voir du pouvoir lui échapper ? Aucun ! Non, aucun ! Et l’Ombre n’était pas du camp des perdants, non, bien loin de là.
Eden aurait voulu leur rire au nez, leur renvoyer en plein visage leur ridicule, leur petitesse, en même temps que le punch qui se trouvait dans son verre d’argent repoussé. Mais il y avait des ordures.L’Ombre avait donné des consignes, l'Ombre tenait les chiens, l’Ombre avait raccourci les laisses. Pas de provocation. Ils devaient écouter, hocher la tête comme des toutous bien sages. Ils devaient même faire des propositions, faire semblant d’être prêts à accepter, prêts à plier, prêts à perdre. Puis ils devaient refuser, sans renverser de tables, faire comprendre qu’ils ne feraient pas ces sacrifices, que ce qu’on leur proposait n’était pas assez avantageux.

Pas assez avantageux ? Quel euphémisme ! Avaient-ils vraiment cru que la petitesse de leurs propositions suffirait à satisfaire la grandeur des ambitions de celui qui attendait tapi depuis mille ans, prêt à dévorer le monde ? Non vraiment, y avaient-ils cru ?
La guerre, la faim, le froid leur avait rongé le cerveau !! Ou bien était-ce leur propre bêtise, et leur propre suffisance ? Peu importait. Jamais ces discussions de gamines, des négociations de coin de table camouflées en moments solennels ne pourraient remplacer le déferlement de violence et de puissance de la conquête par la force. Ils ne pourraient jamais leur enlever ça.
Elle avait souri, oui. Eden avait souri à la Reine de Minos, à la Reine d’Eaque, même au Roi d’Eaque. Elle leur avait sourit, comme un serpent qui attend la caresse avant de mordre et de répandre son venin. Eden avait souri aux colonels et aux lieutenants. Elle les avait sentis flancher et rêver de faire dans leur culotte comme les gamins qu’ils étaient. Croyaient-ils vraiment que leur misérable petite vie pouvait se mesurer aux siècles de puissance des Réprouvés ? Cet instant resterait, à coup sûr, l’unique moment de leurs misérables vies de vermisseaux où ils avaient pu apercevoir un instant ce qu’était la vraie puissance la vraie magie. Elle le savait: il aurait suffi d’une parole, d’un geste, d’un frémissement de sa part pour tous les amener à renier père et mère, et à la suivre jusqu’au bout du monde. D’un simple sourire elle aurait pu les ensorceler, d’une oeillade, elle pouvait les faire changer de camp et devenir les laquais les plus fidèles de l'ennemi qu’ils combattaient depuis tant de temps déjà.
Mais non, elle n’avait pas droit, ce n’étaient pas les consignes. Elle devait faire croire à leur bonne volonté. Elle devait, avec ses Frères Et Soeurs, faire croire que face à une proposition raisonnable, ils plieraient. Mais ce n’était pas une proposition raisonnable, et ils ne pliaient pas. Le déferlement de leur puissance n’en serait que plus énorme, plus impressionnant. Ils serait justifié aux yeux de tous par l'absurdité de la manière dont on les avait traités. Il serait justifié par la provocation qui venait de leur être adressée. Et le monde se plierait alors à leur volonté, ramené à la raison par une puissance supérieure.

Alors, Eden, comme ses frères et soeurs, avait tout refusé. Elle avait dénoncé la petitesse des propositions. Et ils étaient partis, capes claquant au vent, armures brillantes au soleil, armes cliquant dans le froid, magie scintillante dans le soleil levant.
Ils avaient traversé le champ de bataille, quitté la zone neutre. Ils avaient remonté les travées, jusqu’à la tente si obscure qu’elle semblait absorber les rayons du soleil, cette tente qui surmonter le camp, où ils étaient rentrés.
Acheron avait pris le temps d’ôter ses gantelets.
Eve avait pris le temps de libérer ses cheveux du casque qui les retenait.
Rouille avait pris le temps d’expulser un crachat noir qui alla s’écarser contre le sol.
Douceline avait pris le temps d’adresser une prière silencieuse au Père.
Ulrik avait pris le temps de s’asseoir dans le plus ornementé des fauteuils.
Eden avait pris le temps de savourer l’instant.
Puis, d’une seule voix, sans un échanger de regard, ils laissèrent tomber la sentence:

Massacrez-les tous.

La Bataille Finale était là, et aucune discussion n'aurait su y soustraire le monde.

Eden éclata d’un rire de démente. Enfin ! Enfin, on y arrivait ! Enfin elle pouvait déchainer sa puissance, laisser libre cours à son pouvoir, satisfaire sa magie ! Enfin ! Le chaos était là, et avec lui la vie.
Et elle était terriblement vivante.
Beldura Glow
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La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Empty Re: La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6

Ven 11 Nov 2022 - 16:53
Il y avait les mains sur les cartes, et le scintillement des armures.
Il y avait les emblèmes, les drapeaux, les hymnes.
Il y avait les soldats, qui gardaient l’entrée, et regardaient sans avoir l’air d’y toucher vers les pans de la tente qu’un coup de vent faisait parfois claquer.
Il y avait les éclats de voix, les discussions âpres.
Il y avait les couronnes qui bougeaient, les casques qui restaient immobiles.
Il y avait l’odeur des plats sans âme, réchauffés, informes, incolores, l’odeur de la crasse, de la peur, de la boue, l’odeur du froid qui tenait à distance l'odeur de corps qui se décomposaient, l’odeur du sang qui gorgeait la terre, l’odeur des entrailles mortes dont le contenu se déversait.
Il y avait l’ordre, la rigueur, la logique, l’organisation, et en face, il y avait le chaos, le bouillonnement, la puissance, la mort.

Et il y avait Beldura qui osait à peine respirer tant elle était effrayée.
A sa gauche, il y avait le Roi d’Eaque, à sa droite la Reine d’Eaque. A eux trois, ils étaient les trois figures de l’Alliance, les trois meneurs du camp, les trois emblèmes. Ils étaient ceux qui organisaient tout, ceux qui tenaient tout. Ceux qui haraguaient le peuple, ceux qui étaient les lumières dans la nuit éternelle promise par l’Ombre.

Mais, elle, n’était-elle pas qu’une flamme fragile et vacillante ?

Non, il fallait qu’elle cesse de penser à elle-même ainsi. C’était elle qui avait proposé l’idée de négociations. C’était elle qui avait insisté, jusqu'à ce qu’on lui cède. C’était elle qui voulait que tout ceci s’arrange sans verser plus de sang, sans détruire plus de vies, sans diviser plus de familles. Elle en avait assez de voir l'orphelinat élyséen se remplir. Ils avaient déjà dû l'agrandir deux fois. Deux fois … tellement d’enfants, seuls. Cette simple pensée la révulsait lui donnait la nausée.
Comme elle avait été triste, quand toute sa famille était morte ! Comme elle avait été malheureuse lorsque celui qui la protégeait s’était écrasé en bas d’une falaise ! Comme Comme elle avait été misérable lorsque celle qui l’avait sauvée d'une vie de misère avait été tuée ! Comme elle avait cru se briser lorsque son meilleur ami était décédé ! Jamais elle n’aurait cru pouvoir s’en relever. Aujourd’hui encore, elle portrait toutes ces pertes, tous ces deuils, toutes ces morts en elle, au plus profond d’elle. Cette douleur l’aiguillonnait encore, toujours. Et ces enfants … Ils avaient tous perdu leurs proches, et à cause de quoi ? De cette guerre affreuse ? Non c’en était trop ! Il fallait faire quelque chose !
Persuadée que la communication pourrait supplanter la violence, les égos, elle avait tout fait pour que ces négociations se mettent en place. Elle avait travaillé avec soin camp, elle avait osé parler, donner son avis. Elle avait osé contredire, débattre. Elle avait osé s’imposer, régner, enfin.

Mais là, là face à ces séides de l’Ombre en armures sombres et rutilante ou mate et chitineuse, parfois encore casqués, aux yeux brûlants, à la haine qui écumait de la bouche, elle ne pouvait que se taire. Toute son assurance était partie. Elle était là, oui, mais muette, rêvant de se rétracter dans sa coquille, observant, presque honteuse, la négociation se dérouler sans elle.
Ce n'était pas vraiment une surprise, non. Chacun s’y attendait, il fallait bien l’admettre. Chacun avait prévu qu’elle ne serait plus capable d’articuler, de voiser. C’était d'ailleurs ce pour quoi ses conseillers et ministres les plus proches étaient là: pour porter sa voix à sa place. Pour faire front, avec leurs confrères eaquiens, menés par leurs souverains.
Mais voilà qu’elle, la Reine de tout un continent se retrouvait de nouveau spectatrice d’un des plus grands événements du siècle. Et elle ne parvenait même pas à enrager, tant elle était terrorisée par ses opposants, tant le regard de feu des Réprouvés la clouait sur place, tant l’aura sombre de leur magie lui donnaient envie de s’effondrer dans un torrent de larmes.

Mais la négociation ne tournait pas en leur faveur.
A vrai dire, ça aurait été inespéré. Mais pourtant, Beldura y avait cru. Le simple fait que le camp adverse accepte cette rencontre n’était-il pas, déjà, un signe positif ? Elle voulait y croire. Elle s’était persuadée de la bonne volonté de leurs opposants, de la réelle motivation d’arriver à un accord, à une paix. Elle serait instable, certes, mais l’armistice serait là, et la vie pourrait continuer.
Mais apparemment, elle s’était flouée elle-même. On le lui avait dit pourtant, mais elle n’avait pas voulu y croire. Pourtant, les faits étaient là.Les réprouvés refusaient tout ce qu’on leur proposait. Ils ne voulaient pas de leurs idées, de cette paix créée de toutes pièces. Ils voulaient le monde entier, ils voulaient Elysion pour eux.
C’est désespérée qu'elle vit les discussions devenir de plus en plus âpres, de plus en plus virulentes. C’est terrorisée qu’elle crut qu’une ministre eaquienne allait envoyer son poing en plein visage d’un Réprouvé. C’est à bout de force qu’elle vit leurs adversaires quitter calmement la tente sans être arrivés à rien.
L’air tout entier était lourd d’une menace sourde, et elle mourrait d’envie de pleurer.

C’est sans une larme pourtant qu’elle suivit ses confrères hors de la tente, en silence. Ils traversèrent le champ de bataille, quittèrent la zone neutre. Ils remontèrent les travées jusqu'à l’énorme tente blanche aux motifs dorés qui semblait refléter les lueurs du soleil levant. Avec eux elle y entra. Le Roi d'Eaque passa une main fatiguée sur son visage, tandis que la Reine d’Eaque exhalait un soupir lourd de sens. Beldura, elle, ne put que s’asseoir, les jambes coupées par la peur et la tension.
Les ministres, conseillers, généraux et lieutenants posèrent les cartes, les pions, les papiers, les cachets, les compas, les règles, les plumes, les encriers,avec plus ou moins de délicatesse. Tous ces bruits, même minimes, semblent heurter les oreilles de Beldura, comme une cacophonie insupportable. Elle était au bord des larmes. Elle savait, évidemment qu'elle savait ce qui allait suivre. Cette simple pensée lui serrait le cœur, lui broyait les entrailles.
Mais, tant que personne n’avait prononcé ces mots, ce n’était pas réel. Tant que personne n’avait prononcé ces mots, il y avait encore un espoir, une voie lumineuse, un chemin de sortie. Tant que personne n’avait prononcé ces mots, personne ne mourrait.

“Majestés … commença un conseiller, sur le ton de l'interrogation.
- Oui, répondit le Roi d’Eaque, exactement comme s’il avait répondu à une question que personne n’avait formulée. Beldura ? ajouta-t-il en la regardant.”

Elle n’évita pas son regard, et ses yeux plein de larmes, remplis d’une supplication indicible croisèrent ceux de son confrère Eaquien. Il soupira. Il savait, lui aussi, qu’elle ne donnerait jamais l’ordre, sans jamais le contredire.

Lancez l’attaque, trancha la Reine d’Eaque. Et massacrez-les tous. Débarrassez-nous en, pour de bon.

Un sanglot secoua les épaules de Beldura. Les négociations avaient échoué. La paix avait échoué. Tout avait échoué, sauf la violence, qui avait triomphé, et s’apprêtait à déferler sur le monde.

La Bataille Finale était là, et bien minces étaient les chances de la remporter.

_________________
Je crains la nuit, les rues, le jour et les gens, la pluie, les éclairs et les chats noirs
Je crains les promesses et les serments, les cris, les mots séduisants
Je crains les saints, le mal et le bien
Je crains le monde et ses lois
Soudain je sursaute en ne croisant qu´un miroir
Mais n´ai-je peur que de moi?

Beldura Glow

La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Beldur10

Séléné Saralondë
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La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Empty Re: La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6

Ven 11 Nov 2022 - 16:53
Devant elle, étalées, les cartes du monde connu. Dessus, des traits, à la règle, au compas ou à main levée. Un plan de bataille, en réalité. Avec des espions, des croix, des symboles de couleurs. Il y avait tout, tout ce dont on avait besoin pour vaincre. Pour mettre à mal.
Elle avait une stratégie, oui. Cette stratégie avait été montée patiemment, point par point, des mois durant. Il lui avait fallu du temps pour rassembler des informations, des savoirs, des connaissances. Elle avait trimé, des années durant, à la recherche de la moindre miette de renseignement à propos de cet adversaire.
L’Ombre avait été, des années durant, un conte pour enfant, une chimère pour garnements. Mais son sceau avait été secoué, de plus en plus fort, jusqu'à se briser. Et elle avait senti ces secousses. Elle avait anticipé ce retour, seule. Elle avait monté une équipe autour d’elle, pour être plus efficace, et avait parlé quand c’était nécessaire. On l’avait prise pour une folle, une paranoïaque. On avait osé le lui dire, le lui jeter au visage.
Et aujourd’hui, l’obscurité s'était déversée sur le monde, prenant de plus en plus d’ampleur, de plus en plus de pouvoir. Aujourd'hui, il fallait faire rempart, aujourd’hui il fallait se battre pour que la Lumière ne disparaisse pas.

Et elle était épuisée.

Ce conflit lui prenait toutes ses forces, puisait dans toutes ses réserves. Cette frénésie de bataille la décontenançait, elle avait l'impression de regarder un monde dont les règles lui échappaient. Cette brutalité permanente la lessivait: où trouver encore de la beauté, de la douceur, de la tendresse ? N’y avait-il plus aucun refuge dans tout ce bouillonnement de rage millénaire ? Où s’isoler pour échapper à cette furie, à cette folie ?

Elle soupira, passa une main dans ses cheveux de neige. lasse, elle était lasse. Elle avait vécu dans la violence toute sa vie, de sa naissance à aujourd’hui.
On avait voulu séparer ses parents, car ils s'aimaient alors qu’ils étaient issus de peuples ennemis.
On avait massacré sa famille entière, car ils étaient le symbole d’un métissage honni, d’une union interdite.
On l’avait poursuivie, traquée, emprisonnée, torturée pour avoir réchappé à ce massacre.
On avait fait d’elle l’étendard d’un conflit auquel elle refusait de prendre part.
On avait tenté de l’embarquer dans une guerre intercontinentale dont elle ne voulait pas.
Et à présent, cette guerre totale ?
N’y avait-il pas d'autres modes de vie ? N’y avait-il pas d’autre option ? Etaient-ils condamnés à lutter et à s’entretuer éternellement ? N’y avait-il pas de repos ni de paix ?

Au bord des larmes, elle se reprit. La paix, c’était à elle de la créer.
Elle tapa du poing sur la table, pour se donner force et courage. Elle rassembla ses plans, ses croquis, ses esquisses, ses ébauches. Elle fit de ses notes un rouleau. Elle souffla un grand coup, rangea les pions, les figurines, les instruments, et se redressa. Elle inclina la tête d’un côté, de l’autre, faisant craquer ses vertèbres. Ce simple bruit suffit à la faire grimacer, lui rappelant l’époque où c’était elle qui brisait des nuques pour survivre. C’était un temps, révolu, et heureusement. Aujourd’hui, c’était l'art de la diplomatie qui assurait sa survie.

Avec une lenteur un peu cérémoniale, elle enfila son armure. Elle la portait toujours pour sortir de sa tente. Elle n’avait pas dressé des sorts de protection autour d’elle, alors que sa demeure sur le camp de bataille était blindée de boucliers magiques. Elle avait besoin de son armure, si elle voulait envisager de survivre. Le moindre instant d’inattention pouvait lui être fatal, ici. On ne pouvait jamais savoir ce que préparait l’autre camp.
Elle mit son casque, le heaume remonté, et accrocha ses gantelets à sa ceinture. C’était idiot, mais pour porter tout ce papier, elle préférait conserver toute sa mobilité dans ses mains. Elle attrapa ses notes, son travail, éteignit ses torches, et sortit.

Il faisait nuit sur le camp, mais des tentes étaient encore éclairées. La nuit était peut-être le moment le plus dangereux. C’était le moment où l’Ombre était la plus puissante. C’était son domaine, son royaume. D’ailleurs, elle aurait juré que la nuit se faisait plus longue, plus dense, de manière alarmante, d'une manière qui surpassait le rythme naturel des saisons.
Alors, en marchant jusqu'à la tente de commandement, elle était prudente, prête à réagir. Aux aguets. Elle avait conscience de ce qu’elle dégageait, conscience du contraste entre sa fonction de diplomate et sa manière d’être toujours prête à frapper la première. Mais elle n’en était pas à sa première contradiction. Elle ne dormait pas assez pour s’en inquiéter.

Elle entra dans la tente où tout se décidait. Ils étaient là, ils étaient tous là. Les grands, les pontes, ceux qui décidaient, ceux qui gouvernaient. Ils commandaient des continents, ou des régiments. Ils donnaient des ordres, et faisaient en sorte qu’ils soient exécutés. Ils avaient dans les gens sous leur responsabilité, et plus de responsabilités qu’elle n’en aurait jamais.
Mais elle, elle faisait partie de ceux qui murmuraient à leur oreille, de ceux qui leur donnaient les idées, de ceux qui les guidaient. Elle restait dans leur ombre, certes, mais elle avait tellement d’importance. Après un salut respectant l'étiquette, elle étala sur la table les feuillets, et commença son exposé, prête à répondre à toutes les questions. Elle partait négocier comme on partait à la guerre.

Elle ne ressortit ressortir que des heures plus tard, épuisée, dépouillée de ses plans, de ses notes, de ses croquis. Son travail était accompli. Elle avait négocié, elle avait convaincu. Oui, sa stratégie était la meilleure. Oui, si on l'exécutait à la lettre, elle permettrait de maximiser leurs chances de vaincre. Oui, il fallait avoir confiance.
Il faudrait recevoir l’ennemi. Il faudrait parler avec lui, le traiter en humain capable d’empathie et de compréhension.Il faudrait faire face à son impertinence à sa suffisance, pour le jauger, pour en savoir plus.Il faudrait jouer fin, pour récupérer les informations dont on aurait besoin. Et il faudrait frapper, de la manière la plus inattendue possible.
Elle passa une main très lasse sur son visage. Combien de temps tout cela allait-il encore durer ? Combien de temps, encore, devrait-elle monter des stratagèmes, préférer la violence à la discussion ? Combien de temps devrait-elle faire semblant, combien de temps devrait-elle être dure ?
Elle enfila ses gantelets. Il restait moins d’une journée avant la nuit de rencontre avec l’ennemi. Elle devait aller parler aux autres mages, elle devait aller expliquer et former. Elle devait aller modifier les boucliers, et en dresser d’autres. Elle avait du travail.
Un rayon de soleil s'accrocha aux plaques, pour y rebondir et terminer dans son oeil. Séléné Saralondë fit une grimace. Elle venait d’être éblouie par la Lumière. Si ce n'était pas ironique …
Cette constatation lui tira un sourire douloureux. Elle se serait bien passée de cette ironie, alors qu'elle se préparait à utiliser la Lumière pour détruire l’Ombre. Elle qui craignait tant, justement d’être éblouie, elle qui, à force de ne jamais perdre de vue ses objectifs, craignait de perdre toute son humanité, elle venait d’être éblouie par un rai de lumière. C’en était douloureux, physiquement douloureux, mais elle ne ferma pas la paupière, restant éblouie jusqu'à ce que les larmes montent.
Elle espérait que ce n’était pas le sort qu’elle s’apprêtait à faire subir à tout Elysion.
Angel Dust
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Votre personnage et ses relations
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La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Empty Re: La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6

Ven 11 Nov 2022 - 16:55
A terre, devant lui, un grigri de laine colorée. Un grigri fabriqué pour lui. Le premier cadeau qu’on lui avait offert depuis des années. Et dans sa gorge, une grosse boule, qui prenait toute la place. Il faudrait peut-être qu’il aille voir un médecin. Ce n’était pas normal d’avoir une boule dans la gorge. Il n’avait jamais eu ça avant.
Pourquoi donc ne ramassait-il pas ce grigri ? Oh, c’était très simple. Il y avait face à lui une Réprouvée mécontente de découvrir que son fidèle larbin lui avait fait des infidélités.
Une lame dans chaque main, il la tenait à distance, mais la lueur noir qui émanait de ses maisn n’augurait rien de bon. Vraiment rien de bon.

Calme toi, Eden.

Le rire qui jaillit d’elle le frappa plus sûrement qu'une gifle. Cette femme était folle. Autour d’eux se déroulait une bataille digne des plus grands récits d’horreur et elle, elle, elle ne pensait qu’à le réduire à néant. Et pourquoi ? Car il avait cessé d'obéir, car il avait ôté ses œillères. Car, sur le champ de bataille, il n’avait pas tué la mère de son enfant. Il avait épargné celle qui lui avait offert le grigri que protégeait une poche que la Réprouvée avait éventrée.
Angel Dust avait toujours vécu immergé dans la violence, au point d’en faire son mode de vie au quotidien sans même avoir à y réfléchir tant cela lui paraissait naturel. Il était Arma Hominium, il était littéralement une arme. Que faire d’autre, alors ?
Dès l’enfance, il avait été formé à détruire, à tuer. Sa première mission solo ? débarrasser Elysion d’une famille de métis qui n'auraient jamais du exister. Il l’avait remplie, sans flancher, sans émotion. Même face aux cris, même face aux supplications. Il n’avait rien laissé l’atteindre, et la terre s’était gorgée de sang, le sol s’était nourri de leurs entrailles encore palpitantes. Il avait tuer, oui, bien plus qu'il n'aurait pu compter. Il avait été tueur à gages, tout sa vie. Il savait manier les armes, toutes les armes, n’importe quelle arme. Il avait transformé son propre corps en arme, plus mortelle que n’importe quelle lame.
Et voilà qu’il voulait discuter ? Folie !

Je n’ai rien fait … de mal.

Non, en effet. Il n’avait rien fait de mal. Sauf que c’était contraire à tout ce qu’il avait toujours fait, avant. C’était contraire à toute sa vie, à toute sa trajectoire, et peut-être même à tout son être. Pour une fois, Angel Dust n’avait pas fait de mal. Pour une fois, Angel Dust n’avait pas cédé à la violence, pour une fois, il avait écouté autre chose que ses muscles, pour une fois, il s’était autorisé une percée d’émotions.
Un rictus agita les lèvres d’Eden, alors que la distance entre eux diminuait.
Cela faisait des mois que cette carapace si dure, façonnée au fil des ans, se ramolissait. Il le savait, il le sentait. Il y avait eu quelque chose. Il y avait eu quelque chose quand pendant des mois il avait observé sa fille, loin, renonçant au plus machiavélique des plans dans l'espoir d’un jour pouvoir lui même nouer les rubans qui retenaient ses couettes. Il y avait eu quelque chose quand il était allé frapper à la porte de la maison où vivait la mère de son enfant. Il y avait eu quelque chose lors de leurs entrevues. Il y avait eu quelque chose, à chaque fois, et ces toutes petites choses accumulées, ajoutées, avaient créé autre chose. Quelque chose de différent. Et il avait changé. Il le sentait.
Et aujourd’hui, au lieu de tenter de tuer, de détruire, il faisait autrement. Il épargnait, tentait de gagner du temps, tentait de parler.

Je l’ai simplement manquée. Ca arrive à tout le monde, de louper sa cible.

C’était faux. Il le savait. La femme face à lui le savait. Il n’aurait jamais pu la manquer, cette fille. Pas à cette distance. Pas là, sur ce champ de bataille. Pas comme ça. Elle était une cible facile, un cadeau offert. Il aurait pu la tuer, de mille manières différentes. Et il ne l'avait pas fait.
Parce qu’elle était la mère de leur enfant. Parce qu’il l’avait aimée. Parce qu’elle l’avait aimé. Parce qu’elle l’aimait encore. Parce qu’elle faisait de lui un autre homme. Parce qu’elle méritait de vivre, tellement plus que lui. Parce qu’elle non plus, ne l’avait pas tué.
Alors, il ne l’avait pas tuée. Pour ne pas faire de leur fille une orpheline.

Mais Eden n’était pas dupe. Eden n’était dupe de rien. De ses yeux, elle le transperçait. Discuter ne l’intéressait pas. Discuter ne l’avait jamais intéressée. Elle n’aimait que le chaos, et la destruction totale qui l’accompagnait.

Lui aussi, avant, ne voyait pas l’intérêt de la discussion. Mais Nathalia lui avait parlé. Nathalia lui avait appris les mots, Nathalia lui avait montré comment aller droit au cœur. Nathalia lui avait ouvert son coeur, Nathalia lui avait offert la possibilité de se dépasser. Nathalia lui avait ouvert la porte, Nathalia avait accepté qu’il revienne comme il était, malgré tout ce qu’il lui avait fait subir. Nathalia ne l’avait pas repoussé, et Nathalia avait accepté de parler. Alors, il avait découvert le pouvoir de la parole, le pouvoir du langage. Le poids de toutes ces syllabes assemblées. Il avait découvert que par quelques phrases, on pouvait mille choses. Il avait découvert que par quelques mots, on pouvait rattraper des années perdues, éclaircir des années à venir. Il avait découvert qu’en un instant, le bon mot pouvait tout changer.
Il n’espérait pas arrêter la Réprouvée en lui parlant. Elle avait trop de haine en elle pour être stoppée ainsi. La soif du sang était plus forte que tout. La bataille exacerbait tout. Il voulait juste gagner du temps. Tant qu’il lui parlait, elle ne tuait pas. Tant qu’elle lui parlait, elle ne fauchait aucune vie. Tant qu’elle lui parlait, elle ne pourchassait pas Nathalia. Et c’était tout ce qui comptait. La discussion ne permettrait pas de la faire renoncer à la violence, juste de la repousser. Il le savait.

Quelle différence cela fait, de toute façon ? Elle mourra, comme tous les autres. On le sait tous les deux.

Il mentait. Cette fois, il mentait franchement, de la même manière qu’il respirait. Nathalia ne mourrait pas, il refusait qu’elle meure. S’il ne la tuait pas, si Eden ne la tuait pas, elle survivrait. Car elle était forte. Et car elle était leur cible, tous les autres Réprouvés le savaient et aucun ne voulait s’attirer l’ire de la plus excessive, de la plus dérangée, de la plus cinglée, de la plus détraquée des Réprouvés. Celle-là même qui s’avançait vers lui, avec un mouvement de poupée mécanique cassée. Celle-là même dont la magie faisait luire le corps entier.

Il lui offrit un sourire, avant de plonger. Sa lame entra en elle comme dans du beurre alors qu’un rire dément l’agitait. Il n’eut pas le temps de se poser de questions qu’il avait déjà la sensation qu'une main déchirait sa peau, ses muscles, ses os, pour aller chercher ses entrailles. Elle venait de l’ouvrir en deux comme on ouvrirait un poisson.
En tombant, il ne vit ni l’arme qu’elle avait utilisée, ni la blessure qu’il lui avait infligée. Il la voyait simplement rayonner de pouvoir, plus splendide que jamais, inaccessible. Elle ne l’avait jamais autant dégoûté. Il tomba en arrière, sur le grigri qui s’enfonça dans ses chairs meurtries.

Tu n’es qu’une vermine, et tu resteras à jamais une vermine, Dust. Redeviens la poussière insignifiante que tu as toujours été.

Il serra les dents, sentant le sang chaud lui empoisser le dos, contraste terrifiant avec la boue glacée dans laquelle il reposait et qui déjà maculait les organes qu’elle avait sortis. Il mourrait lentement, il le savait. Et elle le savait, évidemment.
Alors qu’elle se retournait, l’abandonnant à son sort, lui qui l’avait si fidèlement servie durant des années, il laissa son bras se transformer en revolver. Et il lui tira dessus. Six fois. Le dos. La tête.

Eden était persuadée que l’Ombre gagnerait. Angel espérait que l’Ombre serait détruite. Et il ferait en sorte qu’elle le soit. Eden n’était que la première étape. Peu à peu, tous les Réprouvés mourraient, et avec eux, peut-être, mourrait la violence qui empoisonnait le monde.
Alors peut-être, sa fille pourrait vivre avec sa mère une existence faite de douceur et de dialogues.

Et voilà tous mes textes pour cette épreuve !
J'avais aussi l'idée de faire une Douceline en pleine réflexion sur sa trajectoire, et une Senea retrouvant une vieille dissertation, mais je n'ai jamais écrit ces textes. Peut-être une prochaine fois !

_________________
Toute une vie sans te voir
C'est ça qui me fait mal
C'est ça qui me fait vieillir
C'est ça qui me fait maudire
Certains choix du hasard
Voilà
Le temps passe et passera
J'ai déjà des cheveux gris
Et je ne peux plus brûler ma vie

La Loutre sur l'Interforum 15 - Epreuve 6 Angel_11
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